Marche de Lylxxx accompagnée par Manon
Vendredi 27 septembre
L : Bonjour, je m’appelle L. J’ai 17 ans. Je viens du Nord de la France, près de la mer. Un jour, mon éducatrice, m’a proposé un étrange voyage qui consiste à marcher trois mois et j’ai accepté. J’ai pris le train pour Lyon pour commencer ce petit périple. Je suis tout d’abord restée trois petits jours dans un gîte très sympathique pour un stage de préparation. Et me voici aujourd’hui au Puy en Velay à écrire dans un petit carnet pour le blog de Seuil dans un petit café assez sympa lui aussi. Il me manque juste la présence d’une personne. Mais dans la globalité, mon voyage se passe très bien. Mon accompagnatrice, Manon, est super. Elle est à l’écoute, très patiente et fortement sympathique. Je suis très heureuse de marcher et de cohabiter avec elle pendant ces trois mois.
Manon : Et l’aventure commence ! Je suis Manon et j’accompagne L dans cette toute nouvelle expérience pour elle.
J’ai rencontré L il y a trois jours. J’ai découvert une jeune fille extrêmement motivée qui sait ce qu’elle veut et pourquoi elle est là. L chante et joue du ukulélé (elle en porte même un sur son dos. On attend les concerts et les chants en duo, on vous racontera, promis). Elle est fan de rock et de métal. Elle se découvre une nouvelle passion pour les sudokus depuis trois jours. Amoureuse de tous les animaux du monde. Elle est ravie d’apprendre que l’on passera bientôt au milieu du pré des vaches de l’Aubrac. Depuis quelques jours, on se partage des histoires et des souvenirs, on cuisine et on mange à deux le soir, on se prépare physiquement et mentalement. C’est un peu stressées, excitées, heureuses, curieuses, impatientes que nous avons quitté Sylvie, notre référente de marche, à la gare ce matin et que l’on vous écrit après un chocolat chaud au Puy en Velay.
Vrai grand départ demain, je me réjouis de retrouver la marche et d’accompagner L dans cette découverte en douceur, petits pas par petits pas, pour savourer.
Samedi 28 septembre :
L : Et encore une journée de plus. Aujourd’hui a été à la fois dure et simple. Les premiers kilomètres ont été durs pendant les montées. Mais j’ai croisé beaucoup d’animaux, à un moment donné, il y a eu même un chien qui s’est mis devant, mais avec une pierre, il voulait jouer au “va chercher”, puis nous avons croisé des vaches et un petit chat noir vers l’arrivée au gîte. Manon m’aide énormément, elle me motive malgré que je râle toutes les 5 minutes avec mes douleurs aux jambes etc… Je ne sais pas si ça l'énerve ou si elle doit en avoir marre et de vouloir me dire à un moment de fermer ma bouche ou autres. Mais Manon est une personne incroyable, c’est l’une des rencontres qui me manquera beaucoup, je pense. Et là, je vous écris dans l’auberge d’Anne de la première étape. Elle est super, incroyablement zen et plein de bons petits conseils. Voilà le petit topo de ma journée.
Manon : Yes, 1ère étape donc ! Avec des hauts et des bas pour L, les montées ne sont décidément pas (encore ! 🙂) ses meilleures copines… mais dès que le plat est de retour, elle trouve son rythme, stable et régulier, les bâtons en rythme, imperturbable… presque 🙂
Un chien nous a accompagnées quelques mètres en déposant un caillou à nos pieds, puis en se couchant devant nous en attendant qu’on le lui lance. La pluie, elle aussi, nous a accompagnées en mettant légèrement le moral à l’épreuve : l’après-midi et la soirée au gîte nous ont offert de belles discussions avec notre hôte et d'autres pèlerins ainsi que de joyeuses parties de uno. Les montées ont vite été oubliées !
Allez, prêtes pour recommencer demain.
Dimanche 29 septembre
L : Aujourd’hui, ça s’est très très bien passé. Anne en partant m’a encore donné de très bons conseils, c’est une femme extra !! Elle m’a fait un câlin avant de partir de son gîte. Sylvie aussi m’a fait un câlin (c’est une des hôtes dans gîte de ce soir-là). La route m’a semblé un peu plus facile qu'hier. J’étais moins épuisée etc… Puis nous sommes arrivées au gîte du Pont Eiffel, tenu par un vieil homme très gentil qui s’appelle André. C’est un homme super. Il a plein de jolies histoires à raconter et lui aussi, il est de très bons conseils. Il veut une carte postale quand j’arriverais à la fin et bah, il l’aura, vu que je compte aller jusqu’au bout. Et puis, j’ai un peu pleuré aussi car j’évoquais mon passé et mon présent. Manon m’a réconfortée d’un doux câlin qui m’a fait beaucoup de bien. C’est la première fois que je me sens bien quelque part. Ça va faire cinq jours que je ne ronge plus mes ongles, que je dors superbement bien la nuit, que je ne suis pas stressée h24, j’adore. Je me sens super bien ici, c’est un monde très différent qui m’a permis de me rendre compte que j’ai de la valeur et que je ne suis pas une mauvaise personne. Voilà c’est un peu tout.
Manon : La douceur de cette journée. Les mots de notre hôte et des autres pèlerins qui donnent confiance et force à L. Le sourire de L et ses yeux pleins d’émotions quand ils la prennent dans leurs bras et l’embrassent pour lui dire “bonne chance, courage, tu es forte, tu vas le faire, crois en toi, je crois en toi.”
Tous ces mots de motivation, les leurs ou les siens, que je garde moi aussi précieusement écrits quelque part pour les jours coups durs.
Les rayons doux du soleil qui me réchauffent au plus profond de moi-même m’apaisent, me font sourire.
La vue magnifique sur Saint Privat d’Allier vertigineuse.
Les trois femmes belges qui nous cèdent leur place sur un banc et qui nous félicitent de ce projet.
Les mûres tout au long du chemin, à portée de main à cause desquelles L a bien failli me perdre pour toujours
Les montées que L grimpe avec plus de patience qu’hier.
Les descentes pleines de pierres instables que L traverse méticuleusement et attentivement. Ses jambes qui tremblent parfois, mais la tête qui reste calme. Son corps qui accepte déjà doucement ce changement de rythme. Sa tête aussi.
Les petits panneaux jaunes qu’elle attend et qu’elle cherche des yeux pour savoir précisément le nombre de kilomètres déjà derrière nous et ceux qu’il nous reste à parcourir.
Sa promesse d’envoyer une carte à notre hôte de ce soir lorsqu’on arrivera à Santiago.
Sa douceur, son désir de bien faire, de faire plaisir et de rendre service.
Ses yeux pétillants quand elle écoute les histoires un peu magiques du Chemin.
Ses “ je vais le faire”
Ss sourires et son rire
Quelle douce journée.
Lundi 30 septembre
L : Aujourd’hui, mentalement ça a été très dur. Des idées noires me sont revenues toute la journée mais… je ne pouvais trop rien faire pour les atténuer. En revanche au niveau du chemin, je l’ai bien senti, malgré la montée de 2h et encore les 6 km que nous avons faits après. Manon a eu aussi un petit coup de mou qui l’a affecté, et je me suis inquiétée car je ne la sentais pas trop bien et ça m’embêtait un peu. On a discuté et ça va bien, juste un petit coup de mou comme tant d’autres. Demain, je fais l’étape des 19 km jusqu’à Saugues. Cette étape me préparera pour celle des 27 km. Je suis sûre que je vais le faire. Le pull est doux pour dormir et le bracelet m’accompagne toujours. 🙂
Manon : Et puis parfois, il y a des jours où l'énergie est plus basse, sans vraiment de raison. Ou pour plein de petits détails à la fois. Pourtant le soleil nous accompagnait de nouveau. Pourtant on a revu et rencontré plein de chouettes personnes. Pourtant on a mangé un super sandwich ce midi et bu un sirop fait maison. Pourtant il y avait toujours des mûres le long des chemins. Pourtant L marchait bien d'un bon rythme. Elle était même en-tête cet après-midi.
La soirée nous a fait du bien tout de même. Après avoir finalement réussi à faire une omelette avec nos œufs à la coque cuits dans une bouilloire (on a bien ri et puis finalement on se satisfait de peu en randonnée), on a passé la soirée avec une ancienne copine (oui, oui, on l'a rencontrée il y a 2 jours déjà) et de nouveaux gars dont un vraiment très fun (on ne sait même pas comment il s'appelle mais il a égayé ces moments), puis une belle discussion avec L avant de dormir. Demain est un autre jour.
Mardi 1er octobre
L : De nouveau sur le chemin, les premiers kilomètres sont passés tout seul, les derniers étaient un peu durs, j'avais beaucoup mal aux jambes et envie de vomir à un moment. Je pense que c’était dû par rapport à l’effort que j’ai fourni au début.
Aujourd’hui, je me suis impressionnée moi-même, c’était au moment où j’étais presque au point mort, d’un coup dans un petit plat, puis de suite sur une petite montée, je me suis mise à accélérer beaucoup, même Manon qui fait beaucoup de randonnées en montagne était impressionnée par la vitesse à laquelle j’allais. C’est fou à quel point mon corps a des ressources que même moi je ne connais pas. Mais après cet effort, j’étais à sec, je n’avais plus de jus. Puis nous sommes arrivées au gîte du Sauvage où nous avons revu des gens que nous avons croisés sur la route, comme Thomas et puis un autre dont je ne sais plus le nom. Ils sont super sympathiques. Il y a aussi Jean-Michel et sa femme. Je ne sais pas non plus trop comment elle s’appelle, mais ils sont supers sympas. Ils ont même une fille de mon âge. Nous avons mangé un petit repas et après je suis montée dans ma chambre avec Manon. Voilà
Manon : Aujourd’hui, c’était la plus longue marche que L ait faite de toute sa vie ! 19 km ! Elle a déroulé facilement les 15 premiers, ça fait tellement plaisir de la voir trouver son rythme. Les 4 derniers ont, par contre, été un beau challenge mais je pense qu’elle s’est découvert des ressources qu’elle ne soupçonnait pas. Elle en est fière. Et elle peut l’être.
Moi, je vais bien, c’est fou à quel point c’est différent de faire le chemin pour soi ou pour accompagner quelqu’un. J’ai l’impression que toute mon attention, mon organisation sont tournées vers elle et pour elle. Prendre soin d’elle sans être trop envahissante., la soutenir pour prendre sa place dans les groupes sans pour autant trop la pousser ou au contraire trop la laisser seule, respecter son rythme tout en la boostant à la fois. C’est un apprentissage pour moi aussi, d’ajustement, d’équilibre, de patience, d’observation, de confiance c’est précieux.
Demain est une petite étape, ça va être tout doux.
Mercredi 2 octobre
L : Aujourd’hui, c’était très tranquille. Une petite étape de 13 km. C’était tout tranquille. Manon et moi avons fait le début du chemin avec Thomas et Jean-Baptiste qui étaient au Sauvage avec nous hier soir. Jean-Baptiste a tracé sa route jusqu’au Mont Aubrac et Thomas est dans un gîte à même pas 30 m du nôtre. Nous avons été boire un petit verre avec Hélène, Claude, Thomas, Manon, Théo et Emma que nous avons rencontrés à cette terrasse. L’ambiance était super cool. Je suis super contente et puis là, nous sommes dans un gîte super cool avec une hôtesse adorable. Elle m’a rassurée pour vendredi et l’étape 27 km “je vais la faire cette étape !!! 😀 ☀J’ai très hâte mais en même temps j’appréhende. .
Le repas que nous a fait Fabienne était délicieux. Une omelette aux cèpes “miam” avec des pommes de terre sautées et demain soir avec Hélène, Claude Manon et Thomas nous allons manger du vrai aligot au Mont Aubrac, trop hâte de cette petite soirée !!! 💛
Manon : Mais quelle journée encore ! Commencée dans le brouillard en quittant Le Sauvage et en traversant la forêt. Une atmosphère mystérieuse dont on a profité avec nos deux copains, Thomas et Jean-Baptiste. La marche est facile, elle descend en douceur et nous permet de profiter des endroits qu’on traverse. Mais à un moment, L est dans sa bulle, dans sa tête. J'ai eu la chance qu'il y a quelques jours, on a pu discuter ensemble de ce qui se passait à l’intérieur d’elle dans ces moments-là. Elle a pu me donner les codes pour la comprendre. Alors, je m’adapte en tentant d’être la plus adéquate pour elle. Je cherche la juste distance. La juste présence. Quelque chose bascule pendant notre pause de midi et les derniers kilomètres se terminent en chantant le Roi Lion et Pocahontas.
Le soir, après avoir aidé notre merveilleuse hôtesse (une de plus) à cuisiner, nous avons rejoint notre copain Thomas dans un café. Et là, magie du chemin, on retrouve tour à tour Claude et Hélène, on rencontre Emma et Théo, on recroise les trois femmes belges. La table s’agrandit. C’est joyeux, c’est heureux. L s’ouvre. J’ai l’impression de la voir s’épanouir.
Ce soir, après le repas et notre habituelle routine des comptes, elle m’a dit “je commence à bien l’aimer ce petit train de vie”. C’est ma phrase cadeau du soir.
Jeudi 3 octobre : Aumont-Aubrac
L : Aujourd’hui a été dur, les 16 km ne passent pas trop bien, mais je l’ai fait. Demain, avec l’étape des 27 km, on va dépasser la barre des 100 km.
J’ai caressé une vachette et un chat et ce soir Manon et moi sommes allées au restaurant avec tous nos amis (es) du chemin. J’ai passé une super belle soirée, de très bons conseils m’ont été donnés, je reçois tellement de bienveillance, je n’ai jamais eu autant d’amour, d’encouragements et grâce à ces personnes-là, je suis sûre d’aller au bout de ce chemin de Compostelle. Ils seront dans mon cœur à chaque pas posé sur cette terre. Ils m’ont tellement apporté en si peu de jours. Ce sont des gens extras.
Je vous passe un message. Je vous aime très fort, j’espère que vos vies seront merveilleuses. Hélène courage pour ton enfant. Les au-revoir sont durs, j’ai beaucoup pleuré.
Ce soir, je n’écris pas beaucoup mais tous les souvenirs avec vous, je les garde dans un coin de ma tête. Je vous aime ! : 💛
Le bracelet de force et ton pull me servent bien
Manon : La journée commence lumineuse, mais très vite, la grisaille nous rattrape et la pluie se met à tomber, pour ne pas oublier que, tout de même, on est déjà début octobre. Les montées s’enchaînent et s’allongent. Le moral est un peu bas. On attend et espère une pause-café au chaud et au sec qui n’arrive pas. On finit par s’asseoir sur un coin d’herbe au bord d’une route avec du pain (presque) rassis (je prends soin de L, je vous jure) un mini bout de fromage et une tartinade de tomates/oignons grillés d’une petite épicerie locale. Heureusement, on avait aussi le gâteau donné par Fabienne et nos tablettes de chocolat (à la menthe pour L, à la fleur de sel pour moi).
Finally, on arrive à Aumont-Aubrac. On passe l’après-midi avec les mêmes copains, au premier café du coin, fidèles aux traditions des pèlerins, eux avec leur(s) bière(s)., nous avec notre chocolat chaud. Ce soir avec une petite bande, on se retrouve au restaurant pour manger le célèbre aligot. Une première pour L, mais c’est aussi sa première soirée d’au revoir. Claude et Hélène nous quittent demain, nos trois amies belges également, ainsi que deux autres copines françaises croisées plusieurs fois sur la route, (heureusement pas Thomas, ça aurait fait beaucoup trop d’un coup). L reçoit mille félicitations et encouragements. Tout le monde est impressionné par ce projet et sa présence, par sa détermination sur le chemin. Depuis notre départ, j’ai le sentiment qu'une immense bulle de bienveillance nous accompagne et nous protège. Les gestes des pèlerins et des hébergeurs pour nous aider, nous soutenir, nous suivre dans notre périple sont quotidiens et se multiplient.
Je suis tellement heureuse que L goûte à tout ça, tellement reconnaissante envers chacun d’eux. Alors, le flot d’émotions passé, on file au lit.
Demain, nous attend un beau défi. Je me réjouis.
Vendredi 4 octobre
L : J'ai fait mes 27 km. Je suis épuisée, mes pieds sont morts, mais je l'ai fait. Au départ je me disais “ouai, tu ne vas pas y arriver avec ton poids, tu n’y arriveras pas, tu es trop lente”. Bref !
Beaucoup de choses pour me dénigrer. Manon a dû me supporter toute la journée, je râle, je me dénigre, enfin bref ! Ça va, je ne suis pas morte mais vannée de tous les efforts que j'ai fait aujourd'hui. Quand on a fait nos pauses, il y avait beaucoup d'animaux, A un moment, il y avait deux tables de pique-nique où il y avait des chats trop mignons, il y en avait un qui m'adorait.. Je voulais le prendre, mais je ne pouvais pas. Journée très dure, mais Manon a du courage
Manon : Réveil à 6h30 pour notre notre étape de 27 km. Dehors il fait 4°. Le vent est glacial. Très vite L est stressée de ne pas y arriver. Ses pieds lui font mal. J'essaie de la rassurer mais son inquiétude persiste. On avance pourtant. On grimpe un peu pour atteindre le début des plateaux de l'Aubrac. A l'intérieur de moi, la petite chèvre de montagne jubile, pleine d'énergie et bien échauffée après ces premiers jours de marche . Elle a envie de s'élancer, de galoper, Elle a envie de sentir la chaleur de ses muscles fatigués, mais je la retiens. Quelques mètres derrière moi, L a de plus en plus mal. La motivation est en chute libre. J'ai l'impression que rien de ce que je peux dire ou faire ne la rassure, ne lui redonne de l'énergie ou de l'espoir. Notre grande pause de 12h au chaud lui fait du bien par contre. Le moral remonte un peu, on rencontre des personnes de nouveau très attentionnées et un petit chat à caresser. Tout ça lui fait du bien. Mais lorsqu'on se remet en marche les douleurs reviennent vite, la fatiguent, J'essaie de la motiver et de lui donner du courage. J'ai froid. Je fatigue moi aussi. Je perds patience. Les 2 derniers kilomètres se déroulent en silence. On arrive finalement. “Tu vois L; je t'avais dit que tu en étais capable ?” 27 km aujourd'hui, 118 km depuis Le Puy. Une semaine de marche tout pile. Mais ce soir, le moral est un peu bas, petit manque de la “maison” à Lyon, de la famille et des amis à Bruxelles. Je pense à vous.
Samedi 5 octobre
L : Journée très dure pour moi. Hier de nouveaux traits rouges apparaissent sur ma peau, mes pensées sombres m'ont submergée.
Je ne sais pas si je tiendrais encore le coup dans ce voyage. Je suis très fatiguée, j’ai mal partout, mentalement, je suis épuisée et mon corps ne suit presque plus. Mes pensées sombres qui envahissent très fort mon esprit continuent. Aujourd’hui, presque aucun mot ne m'est sorti de ma bouche. Manon quant à elle, elle avance beaucoup plus loin devant, je l’ai sentie tendue et triste.
J’ai l’impression d’être ce boulet dans les prisons que l’on attache aux chevilles des prisonniers. On ne dirait pas qu’elle est heureuse. Je suis très lourde. Je me plains souvent. Je fais semblant. de sourire aux gens que l’on croise. Alors qu’au fond de moi, j’ai cette envie de pleurer constamment, peur que ma voix tremble pendant que je leur parle, peur de trop en dire sur moi ou d’être le centre de l’attention. La peur de ne pas réussir la marche que j’ai entreprise, physiquement comme mentalement, je ne suis pas de taille à supporter cette fatigue incessante qui me ronge le mental. J’ai aussi cette impression de causer du tort à Manon, de la rendre malheureuse, ou de rendre ses journées pénibles. Mes yeux me piquent… La fatigue m’envahit peu à peu, en espérant que je dormirais mieux cette nuit. Demain, nous ne marcherons pas et j’en suis heureuse.
Manon : L a du mal à ouvrir les yeux ce matin. Les nuits de 9h ne suffisent pas à rattraper la fatigue de la marche.
L est taciturne. Elle me répond par des “ça va” qui ont l’air de “ça va pas”. J’insiste un peu. Pas longtemps. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, ça lui fait plus de bien de parler aux autres qu’à moi, alors je la laisse et je laisse les rencontres faire leur travail. Je lui donne son espace. J’espère que ça lui fait du bien. Je ne sais pas vraiment.
Je reste, moi aussi, dans ma bulle. Je redécouvre les plateaux de l’Aubrac que j’ai traversés il y a plus de trois ans dans le brouillard et la pluie. Je m’émerveille et j’admire la couleur vive du pré des vaches aux yeux maquillés, le ciel bleu et le soleil qui nous accompagnent. L’horizon si large. Les collines douces. Une vache qui lèche son petit. La première pancarte de l'Alchimiste qui nous dit “tout peut encore t’arriver”. Puis plus tard, la lumière basse dans le feuillage des arbres. Une forêt ouverte et large dans laquelle je ne me sens pas écrasée comme dans d’autres. Je me demande si L voit tout ça elle aussi, peut-être que c’est trop tôt encore. Je marche à petits pas. Je m’arrête souvent. L a mal. Elle en a marre. Parmi le peu de mots que l’on s’échangera aujourd’hui, elle me dira que cette marche ne lui sert à rien. Qu’elle ne fait que souffrir. J'essaie de lui faire voir autre chose, tout ce qu’elle a découvert en huit jours, tous ceux et celles qu'elle a rencontrés, toute la bienveillance et la chaleur qu’elle a reçues. Mes mots n’ont pas beaucoup de poids aujourd’hui. Nos derniers kilomètres sont trop longs. Le soleil descend doucement. Il est 19h quand on arrive.
On a finalement décidé d’avancer notre jour de break et de s’arrêter demain pour que L récupère avant de continuer.
Ce soir, l’atmosphère est déjà plus légère. Demain pas de réveil, ça fera du bien à tout le monde.: 🙂
Dimanche 6 octobre
L : Ah ! Ce jour de repos m’a fait TROP de bien, ça m’a fait du bien de ne pas stresser pour les kilomètres qu’il nous reste à faire etc….
Avec Manon on a fait de petites activités comme lire, dessiner, jouer du ukulele, chanter un peu aussi. Et aussi, je lui ai fait un bracelet car il y avait de quoi dans le gîte. Elle était super contente, ça m’a fait du bien de voir sourire une personne, un sourire vaut de l’or surtout d’une personne heureuse.
Et on a discuté Manon et moi de ce que j’ai écrit hier et je me rends compte à quel point ma vision des choses et mon comportement peuvent impacter une personne… Je ne suis pas facile à vivre et je le sais d’ailleurs. Je dois juste tempérer mon comportement. Oh ! et aussi je viens de me rendre compte que je voyais Manon comme une grande sœur. Fière de cette impression d’ailleurs, cette journée a été reposante et pleine de douceur, en espérant que demain ira bien.
Manon : Une journée toute en douceur et en chaleur au coin du feu entre lecture, sudoku, dessin, Asturias en ukulélé, la journée est passée si vite. L m’a même confectionné un bracelet avec des perles qui se trouvaient dans le gîte.
Ce soir, la propriétaire de cette petite chaumière, Nadège, passe nous faire coucou. Elle reste finalement un peu. Quelle femme inspirante. J’ai l’impression que ce qu’elle exprime résonne tellement avec ce que traverse L, je suis heureuse d’écouter ses mots justes. Heureuse que L les entende elle aussi. Encore des leçons humbles ce soir. Une fois partie, L me demande si ce qu’elle a écrit hier m’a mise en colère. De là découle une discussion sur notre marche ensemble, sur nos vécus personnels et la façon dont ils nous influencent l’une et l’autre, sur le binôme que nous formons, sur nos failles et les pensées qu’on se crée, sur ce qu’on peut améliorer ensemble sur ce chemin. Cette journée était précieuse et nécessaire. Cette discussion aussi. Merci L ♥️
Lundi 7 octobre
L : Aujourd'hui était très doux. Les 20 km sont passés tout seuls, un peu mal aux pieds sur les deux derniers kilomètres. J'ai été très performante.
Nous avons fait 12 km en une matinée. Je suis impressionnée par moi-même.
Avec Manon, à notre arrivée à Espalion, on a visité un peu la ville. Manon a aussi chanté dans une église, C’était trop joli. J'ai aussi joué avec le chien de notre hébergeuse. Du pur bonheur.
J'ai aussi donné de l'eau à un chat qui avait soif et qui attendait pour boire de l'eau devant un robinet. Bref que du bonheur.
Manon : Dur dur de se lever ce matin. Et pourtant, très vite, L prend le lead et marche d'un bon pas. Puis, on a vite rencontré Adrien qui marche à bonne allure avec ses grandes jambes, mais L a gardé le rythme toute la journée. Elle est impressionnante. Son énergie aujourd'hui n’a tellement rien à voir avec les journées précédentes. Elle “insulte” encore bien quelques montées, mais malgré l'effort et la difficulté, elle s'accroche, elle ne s'arrête que lorsqu'on arrive tout en haut. Elle va jusqu'au bout.
Aujourd'hui, c'est la première fois qu’en marchant, elle lève la tête et me dit “wouah, c'est beau, c'est incroyable”
Aujourd'hui, c'est aussi la première fois qu'elle me dit qu'elle prend du plaisir à marcher.
La journée de break a été bien utile, l’anti-inflammatoire que je lui ai donné ce matin sans doute aussi, puis notre discussion d'hier soir.
Ce soir, elle a pu aller promener le chien de nos hébergeuses pour son petit shot de zoothérapie du jour.
Elle dormira bien ce soir. Moi aussi, c'était si léger et joyeux avec elle aujourd'hui.
Mardi 8 octobre
L : Aujourd’hui, petite étape. Après avoir dit au revoir à Stéphane et Sophia, nous avons pris la route avec François et Adrien pour aller jusqu’à Estaing.
Après 4 km, une très grande montée est survenue. J’ai essayé de la monter sans m’arrêter, mais je suis tombée sous le poids de mon sac de par l’épuisement et d’une petite crise d’angoisse. J’ai fait une petite pause et nous sommes reparties tout doux. Puis Adrien et François ont tracé, mais on les a revus 5 mn avant d'arriver à Estaing et nous leur avons dit au revoir. 😮. Mais bon, comme dirait un monsieur qui s’appelle Thomas “c’est le chemin”. Plein d’autres personnes le disent aussi.
Avec Manon, en visitant une église tout à l’heure, on a chanté chacune notre tour. C’était cool. Voilà 🙂
Manon : Malgré nos 12 petits kilomètres aujourd’hui, belle fatigue ce soir. L s’attendait à une matinée facile et à des pas qui déroulent. Surprise donc au moment de la montée qui se présente, attendue mais plus raide que prévu. Deuxième surprise, 2 km avant d’arriver à Estaing, quand le chemin quitte la route pour grimper à nouveau dans la forêt, aïe, aîe, elle râle, mais je vous jure, elle gère !
En atteignant le pont qui mène à Estaing, on croise et on dit au revoir à Adrien et François rencontrés hier qui poursuivent leur route.
Aujourd’hui, petit goût de trop peu avec eux. J’aurais aimé avoir plus de temps pour vous rencontrer et vous découvrir les gars ! Mais c’est aussi ça le chemin, les rencontres éphémères. Mais c’est aussi, parfois, des retrouvailles inattendues. Who knows !
A Estaing, on a bu un verre au café “Chez Lilou” 🙂. On a visité le château, on a lu, on a joué du ukulélé. On a mangé une truffade, on a discuté de la magie du corps humain et des mystères de la vie sur terre et puis “zou” on va au lit !
Mercredi 9 octobre
L : La journée a bien commencé ce matin. Mais la montée m'a un peu retiré le sourire mais après je l'ai vite retrouvé. Manon a su me divertir l'esprit dans la montée. Nous avons revu nos amis comme Agathe, Bruno et Lucie et on a repris le chemin ensemble jusqu'au Soulier. J'étais en tête de la petite file des randonneurs et pour la première fois j'ai aimé marcher 20 km, Manon m'a toujours encouragée. Voilà 🙂
Manon : C’est l’automne et l’été indien à la fois. On marche sous le soleil, il fait doux. On traverse des bois et des tapis de feuilles mortes. Nos pieds roulent, avec maîtrise, sur les centaines de châtaignes qui jonchent le sol, on tente d’échapper aux bogues qui nous tombent dessus, chahutées par le vent dans les arbres. L a une énergie incroyable aujourd'hui. Elle marche en tête, un petit groupe de pèlerins dans son sillage. Parfois, elle se retourne vers moi, j’ai l’impression qu’elle s’assure que je suis bien là.”T'inquiète ma L, je ne te quitte pas, je veille sur toi et si je m’éloigne, je reviens toujours”.
On chante encore évidemment, je raconte et j’invente des histoires pour la distraire dans les montées, on retrouve des copains, on en rencontre d’autres. On rit. On mange. On se réjouit des petites choses. On arrive au Soulier juste avant la pluie. Que demander de plus ?
Jeudi 10 octobre :
L : Etape de 15 km aujourd’hui. Dans l’ensemble ça a été, quelques petits coups de mou, mais ça va. On a revu Thomas, j’étais trop heureuse !!! j’avais peur de peut-être ne plus le revoir. Et puis avec de nouveaux et aussi d’anciens/nes amis/es. Nous avons fait un restaurant. C’était super bon.
Après on a eu la présentation du tympan de Conques, un concert de piano tout en visitant l’abbaye.
Thomas m’a acheté une petite bougie pour que je l’allume devant la statue de Saint Jacques. J’ai exprimé dans ma tête ce dont j’avais besoin et Thomas et Manon m’ont fait un gros câlin. Voilà, voilà !! ⭐
Manon : Oups il est déjà 23h12 ! je serai rapide (pour une fois 🙂)
Réveil et départ tranquilles du Soulier. J’avais dit “ que de la descente jusqu’à Conques” et L m’a prise au mot. Évidemment, j’avais oublié les quelques montées… Mais nous sommes bien arrivées ! Gros programme cet après-midi et ce soir entre l’appel avec Sylvie, responsable de marches, les retrouvailles avec les copains, anciens et nouveaux ! Thomas is back ! On a passé plus de temps avec Gaël qui vit à Lyon, on a mangé avec Lucie aussi et Bruno. Une belle et joyeuse bande. Ensuite explication du tympan et concert dans la cathédrale. Cette nuit, ce sera concert de ronfleurs dans le dortoir de 16.
Souhaitez-nous bonne chance !
Vendredi 11 octobre
L : Aujourd’hui, ça a été tranquille. Je n’ai pas trop de choses à dire hormis le fait que j’ai fait le plus dur du chemin ; j’ai croisé un alpaga sur la route, dans une prairie, mêlé avec des chevaux. Mais une chose manque toujours.
Manon : La nuit fut, en effet, entrecoupée par des soupirs un peu bruyants, mais ça n’a duré qu’une nuit. !
La fameuse et célèbre montée en quittant Conques ne fait pas très plaisir à L. Elle me dit même à un moment qu’elle préfère faire demi-tour. Pas sûr que la redescente aurait été agréable, mais heureusement, elle n’a pas testé.
Comme d’habitude, elle s’est accrochée, comme d’habitude, elle a tout donné. Quelques insultes évidemment, parce que, bon, quand même, c’est important d’exprimer son mécontentement. Mais, comme d'habitude, elle y est arrivée. Et comme d’habitude, trois minutes après avoir atteint le sommet de la montée, elle retrouve toute son énergie et toute sa bonne humeur, comme si rien ne s’était passé. Je commence à la connaître un peu, mais tout de même, elle m’étonne encore :)
La suite de la journée défile et vous savez quoi ? La fin de cette journée marque la fin de notre deuxième semaine de marche. C’est un peu fou. J’ai l’impression que c'était hier qu’on fêtait nos 100 premiers kilomètres (237 km aujourd’hui). Mon corps les sent pourtant ces kilomètres.
Étant toute concentrée et focus sur L pendant la journée, c’est lorsqu’on s’arrête le soir que j’ai l’impression de reprendre conscience de mes muscles, de mes pieds, de mon dos. Le coup de fatigue.
On passe une belle soirée avec nos hôtes. Un chien dort avec nous dans la chambre ce soir. J’espère qu’il ne ronflera pas. Au pire, ce ne sera qu’une nuit :)
Samedi 12 octobre
L : Aujourd'hui ça a été. Mais ce soir j'ai encore eu cette pensée qui me dit de tout arrêter. Mais bon tant pis Je sais comment ça finira.
J'ai dû dire au revoir à Thomas, j'ai eu beaucoup mal au cœur, car il avait pris une place super importante dans mon cœur. C'était le père que j'aurais voulu avoir, aux petits soins, plein de bons conseils et de leçons de vie, super encourageant et j’en passe.
Mais comme d'habitude, j'ai pleuré comme une gamine de 4 ans. Surtout Thomas prends soin de toi 💛 ⭐
Et ce soir, on est dans un gîte très particulier, il y a des chats, des chevaux, des poules, des ânes. Bref plein d'animaux. Je suis contente de ça, mais j’hésite à m’arrêter. Voilà 🙂
Manon : Ça devait être une journée facile et fluide… 15 petits kilomètres. On démarre sans se presser. Mais très vite j'ai la nausée. Je me sens barbouillée. J'ai l'impression d'avoir trop mangé. Je n'ai pas d'énergie. On passe faire des courses. On embarque quelques kilos en plus sur nos dos. On marche avec Lucie. On recroise Thomas à qui on dit réellement au revoir. L est très émue. Dans sa grande bonté, il nous laisse un morceau de chaussette (un mélange d'odeur de crème Nok, d'huile essentielle de lavande et…. bah des pieds un peu quand même). L l’accroche à son sac. C’est véridique. Dans les derniers kilomètres, alors que je reprends tout juste un peu d'énergie, ce sont les pieds de L qui commencent à souffrir. .
On arrive finalement accompagnées de Lucie dans un gîte très rustique. Une limace a même réussi à se retrouver sur la cuisinière. C'était atypique.
Ce soir, en planifiant nos futures étapes, c'est la douche froide pour L à qui j’annonce que nous allons devoir enchaîner des étapes à plus de 20 km parce que je ne trouve pas de gîte proche ouvert à cette saison. Le moral est en chute libre. La motivation et l'envie disparaissent. On dirait que tout à coup tous les bons moments, toutes les belles rencontres, les mots d'encouragements et d'espoir, tous les rayons de soleil, les chats, les chiens, les chevaux les poules, les rapaces, les heures accumulées à chanter dans les champs, les forêts, les églises, tous les sourires, les rires, les câlins, la tendresse, toutes les découvertes, toutes les victoires, ont été balayés et oubliés. On essaie d’en parler, mais le mood a changé d’un coup, alors je propose de ne plus en discuter ce soir, d'aller cuisiner nos pâtes et d’essayer de passer une belle soirée à trois. L reste encore quelques minutes devant le coucher de soleil et les poulains qui jouent dans leur pré. On mange ensemble, on boit le thé au jasmin de Lucie et on mange du chocolat en jouant au Uno.
---> Ne jamais prendre de décision le soir.
---> Demain est un autre jour.
Dimanche 13 octobre
L : Aujourd'hui c'était cool, on a fait une quinzaine de kilomètres. C'était dans l'ensemble très bien. À un moment, il y a eu deux chiens, des borders collie, qui nous ont suivi pendant une bonne heure et demie, puis après ils sont partis avec d’autres pèlerins Je voulais les adopter, mais je ne pouvais pas, triste.
Demain, c’est 26 km…J’ai très peur et j’appréhende beaucoup. Vu dans l’état où j’étais après les 27 km…. Bref tant pis. On a dû dire au revoir à Lucie et de nouveau à Thomas qu'on a vu dans un café. Comme d’habitude. J’ai pleuré… mais pas autant qu’avant. J’essaie d’être forte mais c’est dur. Bref. Voilà 😥
Manon : On ne parle pas d'hier soir. Lucie et sa bonne humeur nous accompagnent presque toute l’étape jusqu'à Figeac, deux borders collie aussi, apparemment délaissés par leurs maîtres et en manque d'affection. L se retient très fort de ne pas trop les caresser, ce n'est pas facile
Nos 16 km roulent tout seul. A Figeac, on prend un verre avec nos copains traditionnels. On dit, pour de bon cette fois, au revoir à Thomas et Lucie. De nouveau plein d'émotions. Ce soir, on mange des pâtes courgettes chèvre, Ce n’est pas si mauvais.
Nos copines de table sont comme cinq mamans qui prennent soin de nous et nous offrent plein de bonnes choses à manger. Aie ! Aie ! Attention au poids du sac ! Parce que demain notre étape annoncée de 24 km est en fait finalement de 26 et 2 km de plus à ce niveau-là ce n'est pas négligeable. Mais j'ai confiance, la forme physique de L a bien évolué depuis la semaine dernière ! On vous racontera demain évidemment !
Lundi 14 octobre
L : Aujourd'hui était long. Une étape de 26 km nous attendait. Donc ce matin, nous nous sommes levées à 6h du matin, mais nous sommes quand même arrivées à 18h
On a aussi beaucoup marché avec notre ami Florian qui hésitait à faire la voie du Célé (ce nom je l'aime beaucoup ^^, mais avec la terminaison qui change). Finalement, il l’a fait. Des gros coups de mou… Voilà
Manon : “My god”, nous nous sommes levées à 5h du matin ! Quitter Figeac à 6 heures à la frontale, c'était tout de même assez fou. Vigilance extrême pour ne pas se tromper de chemin. La montée raide mais avec la nuit c'est pratique (ou pas ça dépend des points de vue), on n'en voit pas le bout ! Quand le soleil se lève, on est enfin en haut. On trouve une petite table de pique-nique pour prendre notre petit déjeuner et la magie du chemin, deux hospitaliers viennent déposer du café et du thé, un bruxellois et une future accompagnante Seuil. Et puis là, boum, Florian débarque, vous savez le gars super drôle qu’on avait croisé le soir de l’omelette avec nos œufs à la coque !
Bref, on se remet en route trop tard, mais on a bien ri. On repart avec une belle énergie et avec Florian qui tourne le dos (pour aujourd'hui) à la voie du Célé pour nous accompagner. Les idées noires de L arrivent en flèche en début d'après-midi. Elles sont lourdes et sombres. Je donne tout ce que je peux pour l'accompagner. On se remet finalement en route.
Et vous savez quoi, aujourd'hui, les quelques derniers kilomètres roulent tout seul. L chante, elle fait des blagues, on parle comme dans une émission télé pour décrire les paysages qu’on traverse.
Notre gîte se trouve dans une immense ferme. Je vous laisse imaginer le bonheur de L. Une fois arrivées, c'est elle qui m'entraîne partout pour voir tous les animaux.
Gros coup de fatigue pour moi. Il faut encore faire à manger, se doucher, prévoir les étapes, réserver les hébergements, écrire aussi. Je n'arrive jamais à m’arrêter. L s’impatiente à côté de moi, curieuse de ce que j’écris depuis quatre pages. Allez hop on s’échange nos carnets pour se lire mutuellement, puis zou au lit.
Mardi 15 octobre
L : Journée compliquée. On devait faire 7 km à la base, puis 17 et j'apprends ce soir qu'on en a fait 20. On avance, mais c'est dur.
Ce soir, on dort chez Floflo. Quelle coïncidence ! Hé - hé !
On a croisé quelques chats et voilà.
Manon : C'était censé être une journée douce et facile avec nos 7 petits kilomètres prévus initialement, mais ce matin, un hébergeur nous conseille vivement d'avancer en profitant du beau temps (oui parce qu'on marche en short et t-shirt depuis trois jours) avant la tempête qui débarque jeudi. Douche froide pour L. Changer de plan et laisser de côté pour quelques jours encore l'idée d'une journée tranquille et sans effort. Elle passe d'abord par la colère, pendant que je tente de trouver des alternatives pas trop ambitieuses pour nos trois prochaines étapes. Puis elle passe dans la frustration et le “j'en ai marre, qu'est-ce que je fous là, je vais tout envoyer péter”. Elle ne me répond plus. Elle traîne les pieds. Elle marche le plus lentement possible.
Moi, je travaille mon équilibre intérieur, ma stabilité émotionnelle, mon équanimité, comme dirait Goenka. J'apprends à rester ancrée aux côtés de L, à ne pas me laisser happer par ses yoyos émotionnels. Ce n'est pas facile
Mais dans notre dernier kilomètre, quelque chose se passe. Elle pleure et elle s'ouvre. On parle de ses petites voix intérieures, de celle qui la pousse à s'auto-saboter et de l'autre, chaleureuse et bienveillante, positive et encourageante. Peut-être qu’il peut servir à ça ce chemin, à laisser de la place à cette voix-là ?
Je repense à une phrase écrite sur la vitre de notre hôte hier “prenez garde à tenter d’être heureux, vous risquez de l’être”. Allez viens ma L, on essaie.
Mercredi 16 octobre
L : n’a pas écrit ce jour
Manon : Si le corps de L avait plutôt bien tenu le coup malgré ces deux derniers jours compliqués, aujourd’hui, c'était la cata. Brûlures aux cuisses, ampoules qui reviennent, plante des pieds douloureuse. Je me sens tellement impuissante. On a fait 21 km aujourd’hui, normalement 26 demain jusqu’à Cahors. On n’y arrivera pas. On annonce aussi une tempête demain et vendredi. Je tourne et retourne dans ma tête toutes les options d’étape et de jours de break. On finit par décider de faire du stop jusqu’à Cahors demain, pour faire les achats nécessaires pour soigner L et pour empêcher de futures brûlures, prendre notre jour de break là-bas et samedi faire du stop en arrière pour marcher les étapes qu’on aura sautées. L râle un peu de devoir revenir en arrière dans quelques jours, mais c’est comme ça.
On passe une super soirée à La Rose de Bach avec Nicolas et sa famille. Ça nous fait du bien après ces trois journées éprouvantes tant physiquement que mentalement.
Repos bien mérité.
Jeudi 17 octobre
L :: Bon hier, j’avais pas envie d’écrire et là non plus. Mais aujourd’hui on a fait du stop jusqu’à Cahors pour soigner mes ongles incarnés et mes brûlures aux cuisses. On a retrouvé Adrien à Cahors, on a mangé une bonne pizza transportée sous la pluie lol. Super petite soirée.
Manon : Ce matin, L a fait du stop pour la première fois de sa vie ! En trois voitures nous étions à Cahors. Première mission : pharmacie pour les ampoules et les brûlures aux cuisses. Deuxième mission : trouver un rendez-vous chez un podologue. Dur, dur. Je laisse une dizaine de messages vocaux en espérant que quelqu’un me rappelle. En attendant, on va boire un café avec Adrien qu’on a retrouvé ! Puis, miracle, le téléphone sonne, un créneau vient de se libérer dans 1h. On va pouvoir prendre soin des pieds de L.
Le soir, on retrouve Adrien pour une pizza. Il pleut mais ça me semble moins qu’annoncé. On verra demain. On se rend compte qu’on a beaucoup de chance à côté de toutes les inondations qui ont lieu partout en France et en Belgique. Gros planning demain. Je vais faire un bel to do list (ceux qui me connaissent ne seront pas surpris. !)
Vendredi 18 octobre
L : Aujourd’hui, petite journée sympa. On a dit au revoir à Hadrien, puis nous sommes allées faire de petites emplettes, on a déjeuné avant dans un café super cool, un peu vintage etc… On a été faire les courses pour manger et après nous sommes allées à Intersport pour un legging de marche pour que mes cuisses ne me brûlent pas.
Ce midi, c’était canette houmous, moi je dis “moumous” avec du fromage et j’ai goûté un fruit étrange mais super bon, c’est le kaki. J’ai fait avec Manon un tri dans mon sac. J’ai appelé aussi la personne qui a une très grande place dans mon coeur, du coup, j’étais bien. Voilà !¨¨ ❤️.
Manon : Journée de break à Cahors. On démarre à 8h30 pour dire au revoir à Hadrien avec un H. On enchaîne avec un café très francy pour notre petit déjeuner. L et moi reparlons d’une tension qui a eu lieu entre elle et moi hier et qui dévie sur mon besoin de prendre aussi soin de moi pendant cette aventure. Mais c’est difficile de trouver le temps et l’espace quand toute mon attention est tournée vers elle. Encore une discussion importante et nécessaire.
La suite de la journée me semble si fluide, on fait des courses pour notre repas de ce soir et les deux jours prochains, on prend le bus pour lui acheter un legging pour marcher et éviter les brûlures, on se balade un peu avant de retrouver notre gîte où elle passe son premier appel depuis notre départ (trois semaines aujourd’hui !) pendant que je planifie nos prochaines étapes. Elle revient rayonnante, apaisée et boostée. ça fait plaisir de la voir comme ça. Yvon, notre nouveau référent de marche et en passant directeur de l’association, nous a d’ailleurs permis de ne pas retourner sur nos pas et d’avancer demain à partir de Cahors. Le retour en arrière aurait, en effet, fait un gros coup au moral de L alors on se réjouit ! La pause a fait du bien, mais j’avoue, je me réjouis de retrouver la marche demain. 🙂
Samedi 19 octobre
L : Hey, vous ça va ? Moi oui ! même ça va superbe. On commence par une matinée brumeuse, nous nous sommes un peu perdues, mais nous avons vite retrouvé le chemin, mais là ! une montée RAIDE ! avec de gros escaliers se dressent devant moi, mais nous l’avons montée. Je n’ai pas trop râlé et elle est passée toute seule. On a envoyé des lettres ce matin à Cahors et un colis à renvoyer avec nos affaires en trop, mon sac est plus léger. J’ai pas eu mal aux pieds Waouh !! Incroyable et merci Sylvie pour ta lettre trop mims ♥️ J’ai fait mon premier pipi nature (lol) Manon était trop contente ; elle disait un truc du style “L a fait pipi nature wouuu ! Elle m’a fait trop rire et puis nous sommes passées à plusieurs endroits qui lui ont rappelé des souvenirs avec des personnes avec qui elle faisait le chemin auparavant. C’était trop cool quand elle voyait un de ces lieux, elle faisait “Oh, ça je me rappelle” Elle a envoyé la photo du lieu à un de ces anciens amis du chemin, c’était trop bien.
Puis à 15h et quelques, nous sommes arrivées au gîte. Notre hôte Rémy nous accueille, on s’installe, on joue à “va chercher” avec son chien qui est trop mimi, mais il est sourd de naissance le petit bébé bouh 😥 et vient le soir, on fait à manger des pâtes succulentes et après le repas, Rémy nous a joué du piano. Il a joué “La Bohème” de Charles Aznavour, cette musique qui nous suit depuis le départ, du Renaud “Le Mistral Gagnant”. On a tous chanté et j’ai chanté du Goldman “Il changeait la vie” en duo au piano avec Rémy. Il a dit que je chantais bien. Ha, ha ! Mais Manon aussi joue super bien du piano. Allez là si elle combine les deux, le chant et le piano, ce sera super joli. Voilà le petit topo de ma journée. Demain, une petite étape de 18 - 19 km du flan. Je ne m’inquiète plus, j’en ai plus de 300 km dans les pattes. Ha, ha allez, bizouilles !!
Manon : Une petite étape toute douce de 14 km. L qui, dans la grande montée pour sortir de Cahors, me raconte avec plaisir et sans perdre son souffle, son appel d’hier.
----> Après les fines gouttes et le brouillard, le soleil qui fait une tendre apparition
----> L qui, derrière moi, chante pour elle-même
----> Tous les jours depuis Conques, le plaisir de sentir ressurgir les souvenirs de l’été 2022. La table de pique-nique où j’ai rencontré Thierry. La pancarte indiquant “Thabor” dont j’avais envoyé une photo à ma sœur. Un café où on avait fini par bivouaquer avec Thierry et LoÎc
----> L qui m’offre, au détour d’une conversation, un petit “quand on sera en Espagne” et plus tard “je sais que je suis forte”. Mini victoire. Je souris. Rester équanime Manon
----> L qui ose faire pipi dans la nature pour la première fois depuis trois semaines ! ça c'est une immense victoire.
----> Sa facilité à se remettre en route après notre pause de midi improvisée au milieu d’une montée (pardon Hadiren) parce que vraiment quand même elle était longue.
----> A notre arrivée chez notre hôte, mon moment tranquille pour prévoir nos étapes prochaines. Le plaisir de nous imaginer avancer pas après pas, jour après jour.
----> Le chien sourd de notre hôte qui ne veut jamais s’arrêter de jouer et qui, les yeux rivés sur mon pied, gratte ma chaussette extrêmement patiemment en espérant que je lui relance son morceau de bois.
----> Notre repas ce soir, frugal mais vraiment bon (pennes et tomates cuites avec de la féta, si vous n’avez pas d’idée, je recommande). Un délice ! (pour toi Chouchou)
----> L qui prend ses marques dans le quotidien de marche, qui s’organise et pense à prendre soin d’elle et de ses affaires sans que je ne le lui rappelle
----> Votre hôte Rémy qui nous retrouve à la fin de notre repas qui nous joue au piano La Bohème, elle qui semble nous accompagner, L et moi, depuis mon tout premier jour ensemble. Puis Rémy qui clôture cette veillée musicale en jouant et en chantant une chanson sur le chemin qu’il a composée lui-même. L’émotion d’avoir l’impression que ces mots sont écrits pour nous tous, les pèlerins, pèlerines. Pour l’amour de la marche et de ces moments où plus rien d’autre ne compte que d’être présents, là, maintenant, dans ce monde hors du temps.
----> Merci
Dimanche 20 octobre :
L : Akunamatata, journée de 18-19 km qui a fini en 21 km parce que nous étions diverties. Hé hé, mais sinon dans l’ensemble c’était très cool.
Ce qui m’a le plus marqué dans cette journée, c’est Rémy, notre hôte d’hier qui m’a fait un câlin. C’était trop cool. 🙂 Sinon rien de plus. Voilà
Manon : Ce matin avant de partir, Rémy a pris L dans ses bras. Un élan paternel et d’encouragement à la fois. C’était beau, ça l’a touchée. Notre marche s’est à nouveau déroulée de façon très fluide, hormis 2 km qui se sont rajoutés à la fin parce qu’on s’est trompées de chemin (bon, 1ère fois en trois semaines quand même) mais ça a tout de même un peu sapé le moral de L. Bon, à coup de chansons d’encouragement inventées, elle y est, évidemment et comme toujours, arrivée. 🙂.
Quelque chose a switché chez L depuis quelques jours. Déjà mercredi dernier, dans une de nos journées de l’enfer plein de souffrance (les brûlures, les ampoules, les ongles incarnés, bref, vous vous souvenez) j’avais osé lui demander ce qui la motivait encore à continuer. Elle m’avait alors répondu qu’elle y avait justement pensé un peu plus tôt, qu’elle en avait tellement marre qu’elle avait essayé de s’imaginer s’arrêter etc… qu’elle n’y arrivait pas. Que chaque fois qu’elle s’imaginait un scénario où elle arrêtait, elle regrettait tout de suite. Je me suis dit que là, il était en train de se passer quelque chose, que là, on tenait un truc. Hier, pour la première fois, elle a dit à quelqu’un qu’elle commençait peut-être bien à prendre un peu de plaisir dans la marche. Et je le sens. Je ne dois plus la tirer pour se mettre en route. Elle râle toujours un peu dans les montées, mais vraiment juste un peu, elle avance, elle regarde et elle admire. Hier en fin de journée (ou aujourd’hui je ne sais plus), elle m’a dit : “Manon ?” (elle attend mon “oui ?) “j’ai pas mal aux pieds” et je vous jure que ces petits mots avaient le son d’une victoire. ---> une de plus.
Lundi 21 octobre
L : Hey, comment ça va vous ? J’me demande comment vous allez installés derrière vos petits écrans ^^ Moi ça va assez bien je trouve.
Aujourd’hui, nous avons fait 14 km. C’était une petite journée éprouvante, nous nous sommes trompées deux fois de route, mais c’est pas grave, ça arrive même aux meilleurs.
Puis, nous sommes arrivées dans un petit village magnifique du nom de Lauzerte qui est très sympa ? Ce soir, nous sommes avec Luc, un hôte super sympa et très chaleureux. J’aime l’énergie et la bienveillance qu’il dégage. Voilà ^^:
Manon : Départ tranquillement ce matin sous un immense ciel bleu et un grand soleil. La lune nous accompagne encore, claire et douce. Pensée pour toi ma p’tite mam.
Je lance à L l’idée d’inventer de nouvelles paroles à La Bohème pour parler de notre chemin. On laisse nos pensées et la mélodie se perdre. Et apparemment nous perdre également puisque, par deux fois, on loupe le marquage du GR et on s’égare dans la forêt. Aîe ! mais pas trop longtemps, ni de trop loin. Ouf ! je rattrape le moral de L de justesse.
J’ai l’impression que c’est un peu plus difficile pour L aujourd’hui. J’essaye de l’encourager, de lui rappeler que chaque difficulté, chaque épreuve, ont une fin. Cette montée, cette journée, ce chemin, cette période de la vie, un jour, tout ça, sera derrière toi. Terminé. C'est une certitude. Et qu’à ce moment-là, ce jour-là, tu seras plus loin, plus forte, plus solide, plus aboutie, grandie.
Je ne sais pas si elle m’entend. Peut-être plus tard. Je sais que, parfois, certains mots la touchent, la traversent et restent : “tu as ma force à ton poignet”, “sur son chemin de Compostelle, qu’elle est belle”. Moi qui crois tant dans le pouvoir des mots, j’aimerais tellement qu’elle puisse poser ceux-là sur le papier, les ancrer, ceux qui la portent et lui donnent de la force, de la confiance. Aujourd’hui, je le fais pour elle. Une chose à la fois, Manon. Patience, douceur.
Ce soir, on passe une magnifique et douce soirée chez notre hôte Luc. Un belge qui a vécu à Fisenne. C’est fou non ? Ses mots et son histoire me touchent. L en face de moi a pris le petit chien de Luc sur ses genoux pour une séance de zoothérapie. Elles sont bien là toutes les deux. Petite douceur du soir.
Mardi 22 octobre
L : Hello ! Comment vont-ils ? Moi, ça peut aller, j’me fais la réflexion de savoir si je fais les 20 km par jour pour pouvoir arriver jusqu’à Santiago à temps, mais je réfléchis.
La petite route d’aujourd’hui a bien été, beaucoup de gadoue, le chemin était difficilement praticable lol mais voilà pour moi.
Ah aussi on va peut-être revoir Florian demain parce qu’il y a un monsieur dans notre gîte qui s’appelle Edouard qui a retrouvé sa carte bleue, mais Edouard est trop cool.
Bref bizouilles.
Manon : Il a plu cette nuit. L quitte notre gîte après une dernière séance de zoothérapie qui la lance sur le chemin, mais très vite, d’autres pensées la rattrapent. Elle s’est pesée hier et le résultat ne lui a pas plu. Difficile de bien la soutenir quand je sais à quel point les injonctions à l’amour de soi et les phrases du type “tous les corps sont beaux” n’aident pas et semblent creux dans ces moments-là. Je fais de mon mieux. Elle aussi.
Le chemin est boueux, nos chaussures glissent et s’embourbent. On longe des routes et des champs de tournesols fanés, leur coeur noir est tourné vers la terre. C’est différent de mon passage en été il y a deux ans. On traverse Durfort Lacapelette et je revois le terrain de foot où j’avais bivouaqué.
Plus que 3 km jusqu’à notre gîte.
Grande discussion avec L sur les limites qu’elle semble s’imposer. Difficile pour elle d’imaginer des étapes à plus de 20 km, mais je ne peux pas m’empêcher de penser à notre destination finale que l’on n’atteindrait pas à temps si l’on garde notre rythme actuel. Je pense aussi qu’avec nos petites étapes des jours derniers, mes jambes, ma tête et mon cœur restent un peu sur leur faim. Mais je sais aussi que ces petites étapes peuvent peut-être permettre à L de trouver petit à petit du plaisir dans ses efforts quotidiens, dans ce rythme simple et répétitif de la marche. D’ancrer ce plaisir. Alors j’essaie de lui offrir le temps nécessaire.
Ce soir, on passe une soirée tranquille au gîte. La vue de notre chambre donne sur le jardin et la vallée. Ce sera un beau réveil.
Mercredi 23 octobre
L : Woua ! Quelle journée chargée de changement !
Aujourd’hui, je vais très bien. On a marché avec Edouard que l’on a rencontré hier soir au gîte Saint Martin et on a fait 12 km ; on est parties à 8h45 et on est arrivées à 11h !! Vous vous rendez compte, n’empêche, je suis carrément capable. Je crois que le chemin fait son taf. J’étais trop heureuse de marcher aussi vite, je ne me plaignais pas, c’était trop cool !
Manon était très heureuse et fière de moi et je suis sûre que d’autres personnes derrière leur écran sont fières, elles aussi.
On a aussi recroisé Florian, notre ami du chemin. C'était trop bien ! Bref, je suis heureuse de cette journée ! Voilà ☀️❤️
Manon : Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé aujourd’hui. Est-ce notre conversation d’hier sur la longueur de nos étapes et la nécessité de les allonger si on veut espérer arriver à Santiago, qui aurait mûri pendant la nuit ?
Est-ce la rencontre d’Edouard qui lui aurait fait prendre conscience que les étapes à plus de 20 km sont tout à fait réalisables ? ou le fait de savoir que notre copain Florian est déjà à Moissac et que Edouard le rejoint pour midi aujourd’hui et poursuivent leur route ensemble, mais que du coup, si on fait nos 12 km en une matinée, on pourrait nous aussi voir Florian ce midi ? Ou un peu de tout ça à la fois ?
En tout cas, ce matin, L a démarré comme une fusée. En moins de 3h, on était à Moissac. Elle n’a jamais aussi bien marché avec un tel élan, avec un tel plaisir.
Aujourd’hui, elle dit à nouveau des choses qui me marquent, tant son évolution est flagrante même si elle refuse de le voir et de l’entendre :
“Ah, mais c’est pas une montée ça”, en parlant pourtant d’une vraie montée, je vous jure.
“Pour une fois, je vais me battre pour moi” ;
“Il y a quelque chose qui s’est passé. Je pense que le chemin a mis quelqu’un sur ma route pour me faire switcher. C’est son énergie, il m’a fait comprendre que ce n’était pas si difficile et que c’était possible”.
“Ah mais Manon, j’ai réfléchi, j’ai décidé, je suis d’accord de faire les 22 km pour y arriver, parce que j’ai fait des calculs très savants, on doit se lancer dans une moyenne de 22 km/jour pour arriver à Santiago avant Noël”. Challenge accepté.
Ce soir, on dort chez Anne à la “Petite lumière”. Elle nous dit que souvent, il y a une tension électrique dans les binômes de Seuil “avec vous deux, on sent que c’est doux, ça fait du bien”. Oui, ça fait du bien.
Jeudi 24 octobre
L : Hello ! Comment ça va !
Aujourd’hui, ça a été pour moi, à part mon orteil qui me fait souffrir un peu, mais voilà.
Les 19 km sont passés comme de l’eau ; nous sommes parties à 9h30 ce matin et arrivées à 14h40. Je suis trop fière.
Le long du canal c’était super beau ; c’était trop chouette.
Ce soir, au gîte “Le Par’Chemin”, on a rencontré un chouette groupe de 8 personnes. Ils sont tous trop adorables. ^^ Nous allons tous les revoir samedi à Lectoure. Trop heureuse. On a de nouveaux amis !
Eh mes chers lecteurs (je prends la grosse tête ha ha ha !)
J’apprécie enfin de marcher !! et ouais, les gars houuu !! Incrédible ha ha ! Trop fière de moi. Bizouilles ❤️ ☀️
Manon : On quitte Moissac et Anne après un lever de soleil incroyable et de grands câlins. On se met en route pour nos 19 km avec notre nouvelle rencontre d’hier soir, Solène. Probablement, l’étape la plus plate de tout le chemin. On longe le canal du Tarn en marchant dans les feuilles d’automne, toujours sous un grand ciel bleu. Ça roule tout seul.
L a, par contre, à nouveau mal à un ongle incarné, mais elle avance bien. On verra ce soir. On arrive à notre étape au “Par’Chemin” à 15 h. En découvrant le gîte, je me souviens que j’y avais dormi il y a deux ans. C’était une belle soirée. Et ce soir aussi. On se retrouve à une tablée de 14 avec uniquement des nouvelles personnes. On va même boire un verre presque tous ensemble à 2 km d’ici. C’est joyeux et léger, ça papote et ça rit dans tous les sens. On a convaincu tout le monde d’adapter leurs étapes pour qu’on se retrouve à Lectoure samedi.
L switche vers ce nouveau plaisir qu’elle découvre et continue de se lier et de s’attacher. Mais, en fait, moi aussi. Je plonge avec elle dans ce chemin pour moi aussi le plaisir prend de plus en plus de place et moi aussi je m’attache. J’essaie que ce ne soit pas trop, parce que je sais que l’arrachement arrivera vite. Rester équanime.
Au milieu de notre moment d’écriture, notre hospitalier vient nous trouver. Sylvie, responsable de marche, a envoyé une lettre pour L. Quelle belle surprise. Merci de nous accompagner de si loin. Allez, une journée de plus.
Vendredi 25 octobre
L : Hey oh ! Comment vont-ils ? Moi ça va.
Aujourd’hui, on a fait une petite étape de 19 km. Nous sommes arrivées à 15h30. Les étapes de 19 km sont faciles pour moi, j’ai l’impression.
On a recroisé Mégumi, une japonaise que nous avons rencontrée au Par’Chemin. Elle est super cool ! Et elle est trop mimi à prendre des photos de tout et d’être émerveillée à chaque chose qu’elle voit.
On a revu Florian à Auvillar. Il était avec sa voiture qui est magnifique ! Vraiment cet homme est aléatoire mais super gentil ^=). Et j’ai eu l’appel d’une personne très importante dans ma vie que j’aime et que j’adore ❤️ Voilà pour ma petite journée =)
Manon : ça roule, L gère les étapes de 19 km, ça fait plaisir. On se croise entre pèlerins, on retrouve les rencontres d’hier, Bryan, les deux bateaux-stoppeuses, Marie et Victoire, Megumi, la japonaise, Solène rencontrée à Moissac. On a même recroisé l’éternel Florian qui apparaît toujours là où on ne l’attend pas.
Ce soir, on mange des pâtes au pesto dans un gîte où notre hôte belge me fait prendre en photo, la procédure administrative que je devrais suivre pour déménager dans quelques mois. Merci, petite étoile, Rachel.
Demain, petite journée sous la pluie, mais avec la récompense à la fin, d’un restaurant avec les copains, alors tout va bien.
Samedi 26 octobre
L : Booh ! Je sais que je vous ai fait peur. Ha ! Ha ! ^^
Cette journée était TROP cool ha ! ha ! Nous sommes tout d’abord parties vers les 9h et quelques sous une brume de pluie et nous sommes arrivées vers 13h40 et quelques de l’après-midi. On a retrouvé tous les copains et avec Solène, nous sommes allées aux thermes ! C’était trop cool ; pour la première fois de ma vie, je suis allée dans un hammam et un sauna, mais le hammam était plus supportable que le sauna. J’ai aussi été dans un jacuzzi ; c’était super bien ; j’étais relaxée et posée, toute détendue 😄 ⭐
Puis là, nous sommes allées avec tous les copains au resto ; nous étions une tablée de 20 personnes !!
Mais là je suis vannée, il faut que j’aille faire dodo ; A demain 💚
Manon : On part dans la bruine ce matin. On marche dans des chemins de terre pleins de boue. On glisse, nos bâtons nous rattrapent de justesse à plusieurs reprises. On patine, on n’arrive pas à avancer aussi vite qu’on le voudrait. A certains moments, la boue colle tellement à nos chaussures que ça nous rajoute 1 kg à chaque pied et trois semelles supplémentaires. C’est comme la neige qui s’agglutine dans les raquettes en montagne. On ne fait que 16 km aujourd’hui, mais après 10, j’en avais vraiment marre. Je marche en mode automatique. Derrière moi, puis devant moi, j’entends L chanter “Feeling good”, puis toute la panoplie de Michael Jackson et me montre son pas de moonwalk qu'elle imite dans la boue (pas toujours exprès 🙂) ça me fait sourire. On arrive enfin à Lectoure. Il n’est que 13h30. Ma deuxième journée commence. On retrouve tous nos copains d’il y a deux jours dans une joyeuse atmosphère. Je m’occupe de réserver quelques étapes de plus. On va faire un petit tour avec L. Elle allume une bougie pour notre Saint Jacques dans la cathédrale. On s’offre ensuite une petite folie, plaisir et on va aux thermes avec Solène. Un petit moment hors du temps qui nous fait du bien. On enchaîne avec un resto mêlant plusieurs pèlerins et hébergeurs. On est 20 à table ce soir, entre Anne et L, Bryan en face de moi, Paola, Alfredo, Michel, Frédéric, Hendrick, Alexi et Florian en ligne de mire, c’est doux et heureux, tendre et joyeux, comme une grande famille recomposée touchante et attachante.
Demain matin, plein “d’au revoir”, mais d’abord au lit, L s’endormait presque sur la table du resto. Alors zou ! On file !
Dimanche 27 octobre :
L : Ah ! Ah ! Ouais chelou comme entrée de journal (lol). Comment y vont ? Oui, je ne m’arrêterais JAMAIS avec cette petite expression héhé ! Moi ça va. On a dû dire “au revoir” à des copains ce matin, et oui encore cela fait mal à mon petit coeur de beurre, mais il s’en remettra ^^
Les 19 km sont passés super facile comme d’habitude ; et ouais ! je gère, je sais lol ^^
Florian est en face de nous sur un canapé avec son macbook et son casque en train d’écrire son livre. J’le vois comme un grand frère ^^ Voili ; voilou ❤
Manon : Hé , vous savez quoi ?! Cette journée clôture notre premier mois de marche !! Une évolution incroyable dans le mental de L, mais également au niveau physique. Aujourd’hui, on a fait 19 km et, à nouveau, c’est passé tout seul. On a beaucoup ri avec notre copain Florian avec qui on a marché toute la journée. Enfin, “glisser dans la boue” serait plus exact. Il a d’ailleurs rattrapé L de justesse avant que le moindre petit bout de son corps ne touche le sol. Merci petite étoile Florian 🙂. Ce matin, on a encore dit “au revoir” à des copains, petit goût de trop peu once again, mais avec certains on a tout de même réussi à se prévoir des petites retrouvailles dans quelques jours. Et puis, pour les autres, qui sait, le chemin fait parfois de jolis cadeaux. On verra bien :).
Récit décidément pas très structuré aujourd'hui, sorry !
Ce soir, c’est tout doux, lecture !
Lundi 28 octobre
L : Hello vous, ça va ? moi ça va plutôt bien. Petit coup de tristesse… Paola a dû arrêter le chemin car elle s’est blessée à la cheville, ça m’a fait mal au cœur
Mais beaucoup de bonheur aussi avec une lettre que j'ai reçu ce midi de l’homme que j'aime. Je suis très heureuse. Merci beaucoup I: ❤️you .
Et puis voilà ^^
Manon : Ce matin, on démarre à 8h30, le changement d’heure nous fait partir naturellement plus tôt. Le froid pique mes jambes. Comme tous les matins, je suis pleine d’énergie, j’avance d’un pas vif et rapide, remplie du plaisir de me remettre en mouvement.
L, quant à elle, démarre plus tranquille, mais une fois échauffée, sa cadence s’accélère, son pas s’allonge. Il faut dire aussi qu’on doit parcourir 13 km avant 12h pour récupérer à la poste de Condom, le courrier qui l’attend et qu’elle attend avec grande impatience. Alors tout à coup, elle trace. J’adore. J’ai l’impression qu’on vole toutes les deux. Elle a le pas d’une battante. On arrive à Condom. Je vous fais le dialogue :
- Bravo, L. Tu as super bien marché, tu peux être fière.
- T’inquiète, me répond-elle.
-
Je la regarde avec de grands yeux ;
- ça veut dire que tu l’es aussi ?
Elle me sourit avant de laisser échapper un petit “oui”. Une autre victoire.
Elle récupère ses lettres. Elle est littéralement aux anges, à la fois surexcitée et tellement sincèrement et profondément heureuse. C’est touchant de la voir comme ça.
Ce midi, on retrouve nos copains de Lectoure. Coup de blues quand on apprend que Paula s’est fait mal à la cheville et ne pourra certainement plus marcher et tellement triste pour elle et Alfredo qui commençaient à rêver et organiser leur chemin jusqu'à Saint Jean Pied de Port.
On se remet en route tranquilles pour nos 5 derniers kilomètres. On a quand même fait une pause pendant 2h au café.
Oups ! Ce soir, grande soupe chez nos hôtes avec une belle tablée.
Demain soir, on sera au gîte “Le Mille Bornes”. A 1000 bornes de notre destination. On avance.
Mardi 29 octobre
L : Hello, comment va ? Moi ça va dans la globalité ^^
Je suis grandement fatiguée. J’ai eu la tête qui tournait mal au crâne et un gros coup de barre. Et voilà pour la journée. On a juste marché et on est chez des hôtes super cool. ♥️
Voilà voilà !
Manon : 20 km, encore plein de boue ! Aïe ! on commence quand même à en avoir un peu marre de celle-là.
Belle discussion amorcée par L sur la reconnaissance et les “merci” qu’on s’offre ou qu’on oublie parfois. “Merci pour ce moment, biche”.
Longue pause à nouveau ce midi. On a le temps. On prend le temps.
Gros coup de mou pour L cette après-midi, mais au gîte le Mille Bornes où l’on dort ce soir nous attend un chien. Alors tout va bien :).
Cette après-midi au coin du feu, j’ai organisé notre plan d’attaque pour nos étapes jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port, validé par L. Yes ! On devrait y être dans 10 jours. C’est un peu excitant, je vous avoue ;).
Belle soirée ensuite avec nos hôtes et d’autres copains pèlerins. On a même eu droit à un conte en attendant la tortilla (pas aussi bonne que la tienne chouchou). Un beau moment. Demain toute petite étape, ça va faire du bien !
Mercredi 30 octobre :
L : Hey, vous ça va ? Moi, je sais pas (lol). Chelou, hein ! Ouais, je sais, mais bon, ça se passe pas toujours bien là d’dans. Mais sinon, ma journée s’est bien passée. On a fait 16 km aujourd’hui. Plutôt tranquille. A part que ça fait trois jours que je suis vannée, épuisée, mais c’est supportable.
Marie m’a appris à jouer à un jeu de cartes super cool et pour une blague, Florian m’a acheté un bilboquet (mdr). J’étais plié de rire, mais il m’a aussi acheté un super carnet très beau pour écrire des choses pour moi que je n’ai pas envie de dire ou des poèmes etc… Je l’adore Florian (moment aussi ❤️) Des bisous
Manon : Je me réveille dans un brouillard émotionnel, à fleur de peau. Ce matin, tout est un peu de trop. Je marche à distance. J’ai envie de courir, de me dépenser, de m’arrêter seulement une fois vidée. Je m’apaise un peu plus tard. On s’arrête après 8 km pour faire une pause à Eauze. Je réserve tous nos hébergements jusqu’à Saint Jean Pied de Port, ça m’enlève un poids.
Pendant ce temps-là, Florian, pour poursuivre une blague, offre un bilboquet à L, puis un carnet pour qu’elle puisse aussi écrire juste pour elle. Avant de quitter Eauze, on chante avec Anne dans l’église, chacune à notre tour. Dans les derniers kilomètres, L me dit qu’elle a mal aux jambes. Elle semble se fermer tout à coup, mais me dit que tout va bien. On arrive au Chalet du Bonheur et on passe la soirée avec deux femmes que nous ne connaissons pas. On papote beaucoup, L reste toujours dans sa bulle. Ça ira peut-être mieux demain.
Ce soir, on dort dans un petit bungalow tout mimi. J’ai même mon lit dans une petite chambre solo !
Jeudi 31 octobre
L : Bon anniversaire Hugo et Roméo aussi, vu que c’est bientôt. Je vous aime fort ❤️
Bon aujourd’hui, plus de peur que de mal. J’ai glissé dans la boue et je me suis fait mal au genou et à mon ongle incarné. J’ai eu du mal à marcher après, du coup on a dû appeler la dame du gîte pour qu’elle vienne nous chercher lol.
Ce matin, ce n'était pas la grande forme non plus, j’ai pleuré dans une église. Florian était là à côté, cela m’a rassurée ; ce soir on a passé une super soirée. On a tous cuisiné des pâtes carbo; il y avait aussi un des chiens de notre hôte qui m’a fait mal au cœur. Il s’appelle Mika, il a 8 ans et il a été récupéré avec de grosses blessures, on les voit encore et rien qu’à son regard, tu peux tout lire de lui c’est dingue. Je veux travailler dans un refuge, c’est décidé. Bisous
Manon: Journée en montagnes russes. Démarrage difficile pour L qui n’a pas d’énergie, pas envie de manger, pas envie de boire, juste une envie de rester dans le fond de son lit. Ça dure depuis quelques jours. On réfléchit et on tente de comprendre ce qui a pu se passer. On ne trouve pas vraiment. On arrive dans une église. L‘acoustique est belle. On fredonne la chanson du dessin animé Le Prince d’Egypte. Vous savez, celle toute douce qui commence par “ tais-toi, mon bébé, sois sage, ne pleure pas”. Florian passe sa tête par la porte de l’église et nous rejoint. L lui explique nos réflexions et tentatives pour comprendre ce qui se passe en elle. Elle parle d’une angoisse, de quelque chose de lourd, d’une impossibilité à pleurer, d’une perte de plaisir et de désir. Je finis par m'éclipser et je sors de l’église. C’est là que quelque chose lâche. Elle pleure. Elle semble ressortir un peu plus légère.
Un peu plus tard, notre directeur nous appelle et rassure L par rapport aux questionnements et inquiétudes qu’elle portait sur l’après-marche. Ses mots l’ont rassurée. C’était de ça dont elle avait besoin. Elle retrouve son sourire et son rire. Elle partage sa joie avec nos amis pèlerins. C’est un joyeux bal de rigolades, de blagues, d’imagination et de projection dans un bel avenir. Moi au milieu de tout ça, j’ai du mal à trouver ma place.
Dans nos derniers kilomètres, L glisse dans de la boue et se fait mal au genou. Panique à bord. Notre hôte vient nous chercher en voiture et nous épargne les deux derniers kilomètres. Au gîte, fatiguée, en prise avec mes propres émotions, je partage mon vécu avec nos amis pèlerins. Quand j’explique la même chose à L, elle n’entend et ne retient que le négatif. Elle plonge à nouveau et se culpabilise. Je tente de l’apaiser et de la rassurer mais comme si mes mots n’avaient plus de poids à son oreille. Aurélien prend un moment avec elle. Je ne sais pas ce qu’il lui a dit, mais ça semble lui avoir fait du bien. On termine la journée par des pâtes carbo et beaucoup de rires. On reste là-dessus pour aujourd’hui.
Vendredi 1er novembre
L : Booh, comment vont ? Moi ça va plutôt bien. Je n’ai plus mal à mon genou, enfin presque mais la journée a été dure. J’ai eu une grosse baisse de moral qui a fait que j’en avais marre de marcher etc… Florian nous a raconté son histoire qui m’a fortement touchée.
Puis nous avons été dans un bar où il y avait des musiciens et un chanteur ; ils faisaient de la pop rock ❤️ Et voilà 🦋
Manon : Novembre ! C’est un peu fou ! Finalement, plus de peur que de mal, le genou de L est bien solide. On se met en route sans souci. Ce midi, on trouve une petite cabane aménagée pour les pèlerins avec tout le nécessaire (du café). Non c’est pas vrai, il y a aussi des toilettes, des tables dedans et dehors, des pommes et des madeleines en donativo. On retrouve notre petite clique et on grignote ensemble là-bas. L en a marre de marcher avant d’arriver, mais on y est presque. Ce soir, on va au restaurant avec notre petite bande de copains parce qu’on se sépare (pour quelques jours seulement, mais il fallait une excuse pour le restaurant 🙂) On a même été écouter quelques musiques d’une jam dans un bar. Mais notre rythme de pèlerins nous rattrape vite : 21h15 retour au gîte, 22h extinction des feux ! Presque :) Je suis à la bourre, d’ailleurs, je file. !
Samedi 2 novembre
L : Hey, comment vont ? Moi, ça va.
La journée a été courte ; le début était embêtant et énervant car il y avait toujours le même paysage, une ligne droite et un soleil de plomb. Tout ça accumulé m’a fait avoir un débordement d’émotions négatives, puis nous avons rejoint Anne que l’on a dû quitter aujourd’hui. Ensuite Florian est arrivé après et j’ai tout de suite eu un bonheur. En repartant de notre break, on a marché avec eux et j’étais en appel avec la personne la plus importante au monde, ça m’a fait du bien, mais je m’inquiète fort pour lui.
Ce soir, on est avec Florian dans un gîte, on a chanté tous les trois dans une église, puis on a mangé un super bon repas et j’ai bien ri. Voilà ^^
Manon : Journée paysagement plutôt inintéressante, c’est vrai. Tout plat, tout droit, au milieu des champs de maïs coupé, personne à l’horizon, ni devant, ni derrière. Florian et Anne ont disparu. On en profite pour chanter fort et n’importe quoi, pour faire les folles et rire beaucoup. Grand soleil ; mais tout va bien, on a trouvé une casquette et un marcel pour L ; elle est parée. Mais à un moment, tout à coup, elle en a marre du chemin tout droit, tout plat et du soleil qui tape, marre de marcher et des kilomètres qu’il nous reste encore. J’essaie de lui faire voir tout ce qu’il y a de beau pourtant dans cette journée. Échec. On se prend un peu la tête, c’est vrai, et on finit par marcher chacune de notre côté. Jusqu’à ce qu’on retrouve Anne assise sur un tronc d’arbre, et puis, magie, Florian qui débarque lui aussi. Leur énergie à tous les deux est super positive. Et ils entraînent L avec eux.
A Miramont, ce soir, nous ne sommes que trois, Florian, L et moi, au gîte communal. Accueil incroyable, tellement chaleureux et bienveillant par les deux hospitaliers. Avant de manger, on va voir le coucher de soleil et chanter à trois dans l’église plongée dans l’obscurité, puis repas délicieux, belles discussions et plein de rires, ça fait du bien.
Demain, encore une petite journée avant d’accélérer un peu le rythme jusqu'à Saint Jean Pied de Port !
Dimanche 3 novembre
L : Hey ! Ils vont bien ? Moi ça va ^^
Aujourd’hui, je n'ai rien fait de spécial à part marcher comme d’habitude lol.
On a marché avec Florian et nous avons eu une discussion très constructive.
J’ai lavé mon sac car il blairait la mort et c’est à peu près tout. AH NON, C’EST PAS TOUT ! On a vu les Pyrénées ! WOW ! Et puis c'est tout ❤
Manon : Ce matin, L parle longuement avec Florian. Je les laisse dans leur petite bulle et retrouve un peu la mienne. J’en profite pour appeler ma sœur, ça me fait du bien. On grignote à Pimbo puis on continue notre route avec les rires de L, la voix et le personnage de Tatie Floppy et l’énergie de Manon dans les montées. Arrivées à Arzacq, Florian trace sa route pour rejoindre d’autres copains 12 km plus loin. (vous savez, les mêmes que depuis quelques jours, Aurélien surnommée Aurlito, Anne de Bretagne (juste parce qu’elle vient de Bretagne mais ça lui si bien) et Victorie et Marie (les deux boat stoppeuses), L et moi. On prend un sirop et une glace. Pur plaisir. A notre chambre d’hôte, grande discussion à nous deux, ça fait du bien aussi. On mange en tête à tête L et moi. Y a plus de pèlerins à cette période de l’année et là on fonce faire une partie de Uno dans nos lits toujours en tête à tête. Attention aux +16 mouahaha !
Lundi 4 novembre
L : Hello ! Vous allez bien ! moi ça va.
Aujourd’hui on a fait 22 km ; ça s’est très bien passé. On a écouté un podcast avec Manon sur la route. C’était cool. On a vu un chat noir super mignon qui se roulait par terre pour qu’on le caresse ^^
Et puis ce soir, on est dans une chambre d’hôte, on s’y sent bien, comme chez nous. J’ai fait des cookies avec l’aide de Manon et de Katie, notre hôte de ce soir. Ils sont super adorables. Elle m’a donné des conseils et me félicite de mon chemin déjà parcouru ❤ Je n’ai eu aucune pensée négative, du moins j’ai essayé parce que c’est pas facile quand c’est habituel d’en avoir lol. Merci Floppi 🙂 Bref ! Bonne nuit.
Manon : Journée douce et fluide. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas marché une journée entière juste à nous deux ! Les 22 km sont passés tout seuls, j’ai l’impression que la discussion avec Florian porte ses fruits.
On arrive avant 16h à Pomps. Souvenirs intenses et tout doux du château. L fait des cookies avec notre hôte pour notre p’tit déjeuner de demain. J’ai failli manger toutes les pépites de chocolat, mais L m’en a empêché. Heureusement, les cookies auraient été moins bons. Allez vite au lit, vite dodo, vite les cookies !
Mardi 5 novembre :
L : Bonsoir ! Je vous écris avec la fatigue. Manon est en face de moi emmitouflée dans sa couverture.
Aujourd’hui, c’était 19 km au lieu de 25 ! Tout bénéf pour moi, j’étais bien heureuse lol !
Mais aujourd’hui, avec Manon, on a eu une grande discussion sur Roncevaux. J’ai énormément peur de ce col à traverser. Mais Manon a tant bien que mal essayé de me rassurer, mais ça me panique, parce que 6h de montée, c’est énorme, même presque insurmontable pour moi… Même si le col est fermé et que nous passerons par la route à camions. J’ai les jetons…. Bref !
Notre hôte de ce soir est très sympa et exceptionnel, avec plein de bonnes histoires et de bons conseils.
Bon allez au pieu, comme dirait m’grand-mère.
Manon : Il est tard, je vais (essayer 🙂) d’être concise ! 19 km à nous deux aujourd’hui. L se plonge dans la perspective de notre passage des Pyrénées et elle a très peur. Difficile de la rassurer.
Pique-nique dans l’herbe. L a du saucisson et du jambon, elle est aux anges. Moi, je retrouve le fromage de brebis du Pays Basque. Souvenirs doux et chauds des vacances familiales chez mon parrain. Je pense à vous ♥️
Grand soleil, il fait très chaud, dur dur pour L. On manque d’eau. On se ravitaille dans un cimetière. Nous sommes presque arrivées. On passe l’après-midi et la soirée avec notre hôte qui nous conduit même au Décathlon pour qu’on puisse s’acheter en urgence des sacs de couchage pour l’Espagne. Repas à nous trois, longues et belles discussions, comme souvent sur ce fameux chemin. Allez zou, demain 22 km
Mercredi 6 novembre :
L : Salut vous ! Comment ça va ? Moi aujourd’hui, ça va ^^
Le soleil tape très fort ? pour un mois de novembre, on se croirait en été, c’est fou !
Aujourd’hui, j’ai eu un appel de mon éduc, j’étais super super contente !!! ça me donne le smile ! 🙂 Merci à vous, Madame Cordier, sans vous je ne sais pas ce que j’aurais fait.
Je passe un coucou à mes petits frères, je vous aime, vous me manquez très fort.
Roméo, j’espère que le collège se passe bien, je suis sûre que ça se passe bien et Hugo aussi, j’espère que tu vas bien et que l’école aussi. Vous me manquez énormément ❤️ Je vous aime.
Et aussi coucou à toi ma petite sœur d’amour. J’espère que ce n’est pas trop dur pour toi ma puce, mais ça va le faire, je te promets, mais sache que tous les jours, je pense à toi.; Ah, comment tu vas ? et le collège aussi, mais de là où je suis sur le chemin que je fais, je te porte dans mon cœur. Prends soin de toi et aimes toi. Tu peux écrire dans les commentaires si tu veux. Prends soin de toi. Je t’aime ❤️
Bon voilà, ma séquence émotion est finie là, sinon je vais tremper mon carnet après, je ne pourrais plus écrire et vous aurez plus de divertissement (j’déconne).
Mais sinon, on a passé une bonne soirée, on a emprunté les vélos de notre hôte pour aller près de la plage aménagée de Navarrenx et c’était très beau ! L’eau était bleue ; il y avait des galets, on a essayé de faire des ricochets, mais on n’a pas réussi après beaucoup de tentatives. On a trempé nos jambes jusqu’à mi-genoux ; c’était très agréable
Notre hôte est superbe et peut-être un nouveau copain de route ^^ Il s’appelle Ludovic ; il est super gentil ^^. Enfin, voilà tout. Bisouilles.
Manon : Ce matin, avant de quitter notre hôte Béa, L écrit ses intentions à l’univers, qu’elle roule dans un petit flacon en verre et qu'elle accroche dans le jardin au milieu d’autres. Moi, sur un petit caillou, je dessine ma force et mes intentions.
On se met en route. Il fait frais ce matin, malgré le soleil qui nous accompagne toujours et depuis plus d’un mois.
Je marche la tête tournée vers les Pyrénées. J’aimerais leur crier que j’arrive. « T’inquiète p’tite Man, promis, on bouge pas ». Alors j’ai envie de prendre L par la main et de lui dire « bichette, viens avec moi, viens voir la haut, je te jure elles sont si belles »
Ce midi, différentes ambiances : dans le café alternatif où l’on s’arrête pour grignoter, un fond musical de rock espagnol, une alarme du style d’une base militaire qui sonne au loin, et, d’encore plus loin, le résultat des élections américaines. Drôle de mélange.
Le soleil, toujours.
L a très chaud. On manque de nouveau d’eau. Je vais nous ravitailler à la maison d’un vieil homme qui m’accueille avec le sourire. Encore 6 km dans l’ombre de la forêt. La lumière à travers les feuillages d’automne est un peu magique.
En arrivant à Navarrenx, on rêve d’aller tremper nos pieds dans le Gave, la rivière qui passe ici. Sauf que notre hôte n’est pas tout à fait à côté et qu’on a la flemme de marcher 1km de plus (enfin 2 en comptant le retour !). Alors elle nous prête des vélos. L me motive parce que j’avoue que la douche me tentait pas mal aussi. Mais, sur nos vélos, plaisir fou de retrouver une autre allure que celle de nos pas. L’eau est froide et mord nos orteils. Nos chevilles. Nos mollets. Nos genoux. On s’arrêtera là quand même 😁 je récupère des petits cailloux, immense envie d’y dessiner des mandalas avec des feutres posca et de pouvoir les semer sur le Chemin. Je me lance après le repas. Notre hôte a mille feutres de mille couleurs différentes. Minimum. Elle m’en offre deux ❤️
C’était la journée des petits cailloux. L et notre nouveau copain pèlerin de ce soir m’ont appelée « la petite Poucette » 😁
Jeudi 7 novembre
L: Hello, comment vous allez ? Moi, ça va moyen, un peu fatiguée.
La journée est passée lentement je trouve ; on a fait 23 km aujourd’hui ; je suis un peu épuisée.
On a fait trempette dans une rivière, ça m’a fait du bien 🖤. J’ai un peu mal sous le pied, peut-être la fatigue ?
J’ai trouvé notre hôte de ce soir très sympa ; il a de beaux discours et il dégage un truc super !
Bref, je vais aller dormir ^^ Bisous.
Manon : Douce journée dans la forêt, L est ravie. Si hier j’avais le nez en l’air, les yeux rivés vers les Pyrénées, aujourd’hui j’ai les yeux tournés vers les feuilles mortes, les racines et le lit des ruisseaux, à la recherche de cailloux à décorer. Ce midi, on traîne sur une table de pique-nique à côté d’un petit bar aménagé dans un hangar. On décide qu’aujourd’hui, on a envie de prendre le temps. Pas grave si on arrive un peu plus tard, on a envie de profiter. Alors je sors mes petits cailloux ramassés le matin et je teste les deux poscas que Véronique m’a offert hier. L se lance dans des sudokus, on mange nos crackers, du fromage, une banane et du peanut butter. Avec nos traditionnels diabolo violette ou cassis pour L et allongé noir pour moi. Ludovic nous retrouve après une petite heure et on se remet en route ensemble. Sur notre chemin, je sème mes petits galets colorés. Quelques km plus tard, on arrive à une rivière où L et moi prenons, à nouveau, le temps de faire tremper nos pieds. Je repars à la recherche de mes prochains cailloux. On rit, on fait des photos. On se remet en route pour nos 8 derniers km. Vers la fin, toutes les douleurs de L se réveillent en même temps. Au niveau des talons, jusque dans les mollets, le ventre, toute la plante des pieds, les genoux, le dos. Je la fais chanter pour faire passer le temps et la distraire. Ça marche hé hé. On arrive au gîte en chantant avec un brin d’herbe en guise de micro. Mais la petite pause à Saint Jean Pied de port fera tout de même du bien.
Ce soir, des petits chats et un repas avec notre hôte. Discussion politique et sur la société, agrémentée de quelques désaccords. Je vais peindre quelques galets avant de me coucher.
Vendredi 8 novembre
L : Hello ! Comment allez-vous ? Moi, ça va pas du tout
Les douleurs ont repris le dessus et j’ai eu mal toute la journée. C’était fort désagréable. Je suis explosée de fatigue ; enfin bref, dure journée.
Notre hôte est venu nous chercher parce que je pleurais de mal.
Et un gros chagrin aussi du fait qu'on ne verra plus les copains du Chemin, ça m’attriste quand même, même si je ne le montre pas, ça m’impacte. Pas cool cette journée…
J’ai eu un appel avec la personne la plus importante sur cette terre 🖤
On a bien vu les Pyrénées.
Notre nouvel ami, Ludovic, m’a offert une carte d’un oracle qui me correspond bien. Et puis, j’ai dessiné mon premier caillou que j’ai disposé sur le chemin. Voilà ; A demain.
Manon Dur dur dur cette journée. L démarre avec les mêmes douleurs qu’hier. On se lance dans une journée de 24km avec des montées et des descentes tout le temps. Magnifique mais ça fait long pour L. On traverse des forêts avec des marches en pierre. Presque comme Poon Hill, Sophie ! Je retrouve la chapelle de Soyarza où les fameuses belles bêtes avaient fêté l’anniversaire de leur Loulou et où on avait monté nos tentes devant un coucher de soleil incroyable. Je sème mes petits galets colorés. Mais il reste encore 8 km. L n’en peut plus. Il fait nuit. Notre hôte vient nous chercher. Après nos douches, nos copains arrivés à Saint Jean Pied de Port aujourd’hui nous contactent. Ils changent leur plan et continuent leur route demain. On ne les rattrapera pas. Gros coup dur pour moi. Je me réjouissais de fêter auprès d’eux cet aboutissement d’avoir parcouru toute la voie du Puy avec L. Ludovic avec nous ce soir nous remonte le moral et nous rappelle plein de beaux moments de notre journée. Les montagnes. Les nuages et les lumières du soleil qui les traversent. Toutes les belles photos prises en souvenir. La tisane de ce soir. La grasse mat autorisée jusque 8h demain. Le feu qui fait sécher nos vêtements propres (plus ou moins, il faut le dire). Allez, on fêtera l’arrivée à Saint Jean Pied de Port ensemble demain :) Merci Ludovic
Samedi 9 novembre
L : Booh ! Comment ça va ? Moi ça va à peu près. Les douleurs sont toujours présentes, mais c’est supportable.
JE SUIS A SAINT JEAN PIED DE PORT !!! C’est fou ! J’ai un peu pleuré, j’avoue ^^
C’est super bizarre de me dire que dans 2 ou 3 jours on traversera Roncevaux (ou 3/4 jours parce qu'on va faire une pause ha ha !).
On a revu notre Flopi ! Je suis trop heureuse. Il m’a battu aux bras de fer, il faut que je reprenne la musculation lol.
On a fait un bon resto, on a bien fêté ça, je suis trop contente.
J’ai aussi mis une pièce dans la rivière qui traverse Saint Jean Pied de Port. Mon éducatrice voulait que je jette une petite pièce, et celle que j’ai trouvée par terre a brillé dès que je l’ai approchée, c’était celle-là que je devais jeter.
Je le dis, je suis fière, même super fière de moi. Jamais, je me serais dit dans ma vie que j’allais faire ça, mais je l’ai fait.
Merci Madame Cordier, merci Seuil ; merci Yvon ; merci Sylvie ; merci Manon et merci à moi d'avoir accepté ce chemin.
Allez bisous 🖤
Manon : On quitte Larceveau tranquillement, un peu plus tard que d’habitude. On sait qu’on a une petite journée et le moral est bon : notre copain Florian nous attend ce soir pour fêter notre arrivée ensemble ! La journée se passe de façon fluide, L avance super bien, elle met ses douleurs dans un petit coin de sa tête et le Chemin se déroule sous nos pas. L’excitation grandit à chaque km qui passe. On passe la porte de Saint Jean Pied de Port en milieu d'après-midi, pas trop le temps de se laisser prendre par l’émotion de l’arrivée et de ce premier immense accomplissement que la personne du gîte qui nous attend nous reconnaît et nous fait entrer directement. On pose nos affaires et on sort rapidement pour se balader et prendre doucement conscience de où on se trouve. Prendre conscience de tout le chemin déjà réalisé. On retrouve ensuite notre copain Florian et on termine la journée par un resto joyeux à 5, avec en plus notre copain Ludovic et une nouvelle copine Sandrine. Mais tout ce petit monde se remet en route déjà demain vers Roncevaux et l’Espagne. Nous, on prévoit de se poser au moins jusque lundi. Repos bien mérité pour rebondir et mieux repartir pour la suite de cette grande aventure !
Dimanche 10 novembre
L : Hello, comment vont ? Moi, je retrouve de l’énergie doucement. Cette journée était fort agréable ! Ce matin, on a un peu traîné dans le gîte, on a un peu trié nos affaires pour savoir ce que l’on allait renvoyer par la poste, puis nous sommes parties au Carrefour pour laver notre linge et faire nos courses. Nous avons aussi dit au revoir à Ludovic qui était un nouveau copain, mais nous avons dit pour la 6ème fois au revoir à Flopi. mais, ce soir, il est revenu dans l’église pendant que nous écoutions de belles harmonies basquaises que j’ai adorées ! Mais Flopi a fini par nous dire qu’étant donné qu'il n’avait pas de papier d’identité, il n’a pas pu aller en Espagne. C’est triste pour lui… Mais il va refaire sa carte.
Voilà ; puis nous avons rencontré Jean-Benoît, un des correspondants de Seuil ; Il était trop adorable, super marrant et plein de bons conseils de vie, et de bons conseils tout court. Je l’ai adoré ; il est super attachant ; le jeune qui l’a eu comme accompagnant devait être super content.
On a été boire un café ensemble, puis il nous a fait faire une balade au bord du fleuve qui traverse Saint Jean Pied de Port ; c’était super joli. Puis nous avons été voir un concert de chants basques ; c’était trop bien, magnifique. Du miel mélodieux pour mes oreilles.
Bref, cette journée a été magique et mes trois mois avec toi aussi sont magiques, mon bourriquet ^^
Bonne nuit 🖤Kiss ! ☀️
Manon : Une journée de break comme on les aime. On se réveille doucement au son des tirettes de sacs de couchage qui s'ouvrent et des clips de sacs qui se ferment. A la table du petit déjeuner, une tasse de thé ou de café dans les mains, on regarde le bal des pèlerins qui se préparent et s’en vont, trainent ou reviennent quelques instants. Nous on papote, on grignote, on trie nos sacs, ce qu’on va renvoyer, ce qu’on va laver. Je fais une liste de courses, un to do list (pour faire semblant de maîtriser mon angoisse du vide de ces journées de pause ‘(oups). On dit au revoir à Florian qui trace pour l’Espagne, mais on se reverra, c’est sûr. Il nous attendra quelque part et réapparaîtra par hasard, notre Flopi. Petite émotion quand même.
La journée continue, les courses, la lessive, petit call avec le Loulou.
Ensuite, on retrouve Jean-Benoît pour un café, le correspondant de Seuil à Saint Jean Pied de Port, son rire est communicatif et sa voix est posée. Ancien accompagnant, il nous raconte ses chemins. Il encourage L. Il nous entraîne ensuite pour une petite balade le long de la Nive. On rejoint ensemble l’église pour un concert de chants basques. L a mal aux joues tant son sourire est large, ses yeux pétillants pleins de joie. J’adore la voir comme ça. On est bien, je l’embête parce que j’applaudis trop fort et après tout le monde, mais elle rit, alors je continue encore un peu. Puis à un moment, entre deux chants, quelqu’un vient s’asseoir à côté de moi. Florian a oublié sa carte d’identité et n’a pas pu passer la frontière. Aïe, Aïe, Aïe. Les séparations furent encore plus courtes que prévu. Après le concert, L et moi nous cuisinons une salade de folie. Et après nos devoirs du soir, quelques parties de Uno en tête à tête.
Pas si vide la journée de break finalement 🙂
Lundi 11 novembre
L : n’a pas écrit
Manon : deuxième journée de break. On dort plus longtemps, toutes seules dans notre grand dortoir. Journée un peu vide. On recroise Florian à qui on redit au revoir, peut-être pour une dernière fois ! Il rentre chez lui.
On appelle Yvon qui parle encore à L de son projet de retour. Elle est toute excitée :).
Dans ma bulle cet après-midi, je me vide la tête dans mes galets. Demain, on se remet en route vers une toute nouvelle aventure vers l’Espagne et son atmosphère si particulière dont on nous parle tant. On nous dit que c’est festif et international, plus jeune, tourné vers une renaissance et le futur. On nous parle d’une vie et d’une entraide encore plus grandes et plus fortes entre pèlerins. Pleine de curiosité, L est plutôt stressée pour le passage des Pyrénées. Mais j’ai confiance, on coupe cette grosse étape en deux, ça va le faire. On sera portées par ce nouvel univers.
Mardi 12 novembre
L : Salut, ça va ? Moi oui et non
A l’heure où j’écris, il est 15h48 et j’avoue j’ai la flemme d’écrire ce soir. Ce matin, la journée démarre bien à mon goût. Nous sommes parties du gîte vers les 8h et demie pour pouvoir attendre que la poste ouvre pour aller chercher la lettre de l’homme le plus incroyable du monde ; d’ailleurs merci ! Je suis trop heureuse, tu as illuminé ma journée !! Et non, tu ne m'as pas déçue. On en discutera quand je t’appellerai 🖤
Jusqu’à Valcarlos, ça montait, ça descendait, c’était fatiguant. J’en avais marre, mais le paysage était très beau.
Demain, on fait la fin de la montée, j’ai les pétoches, j’avoue.
Mais cet après-midi, Manon et moi avons discuté et elle m’a dit que je “manipulais” elle, le directeur de Seuil et Sylvie et que je jouais de mes difficultés pour faire des étapes plus courtes.
Franchement dans son discours d’après, c’était pfff… enfin bref. C’est détestable. Mais je garde le positif de la journée, le reste m’importe peu et puis basta.
Je ne sais pas quelle heure il est, mais, je sais qu’il doit être dans les alentours de 19h et quelques. Je l’ai toujours en travers de la gorge, même pas envie de lui parler, que dalle, je suis en colère. Mais bon tant pis. Bref… Super… Bye… Bonne nuit à vous
Manon : La maladresse des mots.
Dans un échange pour tenter de lui faire comprendre que je pense qu'elle est capable de plus et que j'ai l'impression qu'elle s'auto-sabote, qu'elle s'empêche d'explorer ce dont elle est capable, que ses limites sont plus dans sa tête que dans son corps, je laisse s'échapper le mot "manipuler" en parlant de la longueur de nos étapes qu'elle refuse d'allonger. J'ai beau revenir sur ce que j'ai dit, reformuler, elle a tiqué. Je la comprends.
La maladresse des mots.
La journée avait pourtant bien commencé, en entamant doucement la montée de Roncevaux sous le vol des oiseaux. Les migrateurs en V, prenant le relais les uns des autres, les rapaces tournoyant en cercle, à la recherche de leur proie, et les palombes ou les étourneaux comme un essaim, dansant sous nos yeux et nous offrant un spectacle que l'on aimerait ne pas quitter du regard.
Mais l'après-midi et la soirée se terminent dans le silence et la distance. C'est fou comme tout peut être balayé si facilement. Ne plus exister. Ne plus compter.
Quelques galets. Quelques couleurs.
Chercher la douceur.
Attendre demain.
Un peu d'apaisement.
Peut-être.
J'espère.
Attendre demain.
Mercredi 13 novembre
L : Hello, vous.
La journée a démarré dans le plus grand silence. J’étais en rage contre Manon jusqu’à ce qu’elle décide encore de venir faire ses excuses, mais je les ai refusés. Je ferai comme si elle n'existait pas, comme si je marche seule.
Le paysage était magnifique, la rivière était tellement belle, une nature, ma foi, super jolie. Et là, le drame. J’arrive à Roncevaux seule car Manon est passée devant, mais je ne la trouve pas ; il y avait qu’une bande de touristes espagnols. Je me suis mise à avoir une crise d’angoisse car je ne la trouvais plus. J’ai beaucoup pleuré, je m’en voulais d’avoir agi de la sorte. J’ai fait plusieurs fois le tour du village, mais toujours pas de Manon. Et puis, je croise trois japonaises que nous avons souvent croisées qui me disent “your friend cherche you”. Moi, dans ma panique et mon angoisse, je refais le tour de la ville et là j’entends la voix de Manon, les larmes aux yeux, elle me fait un grand câlin car elle ne savait pas dans quel état elle allait me retrouver. Voilà tout est bien qui finit bien !
Et coucou, ma soeurette d’amour, je suis heureuse pour toi et ton copain et dis-lui que s’il ne prend pas soin de toi, je demanderais à l’univers de lui casser ses dents (hi, hi), non je déc…
Je savais que tu allais dormir dans ma chambre et prendre mes vêtements, mais s’il te plait ne prends pas mes tee-shirts de groupe, j’y tiens trop même les pulls, ce serait gentil, mais le reste tu peux..
Mais je suis super contente que tu me lises, ça me fait plaisir. Je t’aime 🖤
Manon : La journée commence dans le froid, le silence et la distance. L et moi marchons chacune de notre côté. J’arrive à Roncevaux seule, L s’est posée le long d’une petite rivière, une centaine de mètres avant l’arrivée. Je me sens un peu perdue, toute seule, sans aucun autre pèlerin, seulement plein de touristes espagnols. Je me pose à un endroit où je suis presque sûre que L passera sur le chemin vers l’auberge de ce soir, mais 30 mn plus tard, je croise trois coréennes qui étaient derrière moi et qui me disent ne pas avoir vu L. Vent de panique en moi. Je retourne sur mes pas et reviens à la rivière. Elle n’est plus là. Je retourne vers le village et je fais le tour de différents endroits. Je l’aperçois de loin après 15 mn, on se rejoint, on a eu peur toutes les deux. On s’imagine souvent n’importe quoi dans ce genre de moment et parfois le pire, compte tenu du contexte de ces deux journées, mais ce stress vécu chacune de son côté nous permet de nous retrouver. Une fois l’angoisse redescendue, je retrouve sa légèreté, son rire et ses blagues. Soulagement.
On passe l’après-midi avec Duolingo espagnol, ça y est, L est lancée !
Moi, avec mes étapes et mes galets.
Ce soir, on est à une table de 9 pèlerins, entre coréen, espagnols, italien, français et belges, les langues, les discussions et les rires se croisent. On termine même la soirée par une joyeuse partie de Uno à 7.
Ça y est, la voilà qui commence cette fameuse atmosphère espagnole.
Jeudi 14 novembre
L : Holà, como estas
Ouai, je suis bilingue. Non c’est une boutade mdr ^^ Cette journée s’est très très bien passée, la route jusqu’à Zubiri (quel drôle de nom de ville ?) s’est très bien passée aussi. La ville est super belle. Le paysage est incroyable. Nous avons un peu marché avec notre ami Kangsah, un coréen trop cool ^^ : ☀️ Un coup de fil incroyable. Je suis heureuse. 🧡 Bisous bye !!!
Manon : Le givre dans les prairies. La lumière dorée à travers les arbres. Le son des feuilles d’automne froissées sous nos pieds. Quelques montées. Plein de descentes. On avance d’un bon pas, dans une bonne humeur, on chante, on rit avec notre copain coréen qui déteste les montées autant que L. Les 22km passent tout seuls.
Au gîte ce soir, on repasse la soirée avec des copains rencontrés hier à Roncevaux. Et dans un mix de français, anglais, espagnol, flamand, on joue à UNO, on fait des exercices de percussion et de rythme avec notre prof italien, on mange du chocolat (always), on se réjouit de la nuit qu’on passera demain dans une église transformée en auberge, on attend un call pour L dont elle revient avec un sourire jusqu’aux oreilles. On ne voit pas trop le temps passer. On sent juste les yeux qui commencent à piquer, déjà 22h39, ça fait tard pour notre petit rythme de pèlerines ! Allez on file !
Vendredi 15 novembre
L : Como estás ? Bien y tú
On est en Espagne, il faut parler espagnol (lol). La journée a démarré super bien, nous avons pris la route avec notre nouvel ami Adriá qui lui est espagnol, mais parle le français, l’anglais, l’allemand, le catalan et l’espagnol, ça fait beaucoup non ? puis nous avons pique-niqué au bord d’une jolie rivière où j’ai fait des ricochets pour la première fois !!! Incroyable 🖤. Et ce soir, nous dormons dans une église désacralisée, aménagée en dortoir pour pèlerins, quelle drôle d’idée, mais 11 € la nuit ça vaut le coup.
Manon a trouvé des pescas pour dessiner ses cailloux ; elle était très heureuse. Hé hé !
Et ce soir, on a mangé dans un petit resto à Pampelune, mais c’est super grand Pampelune, il y avait des gens partout, même à 21h30, ils étaient encore tous dehors. Je n’ai plus l’habitude des grandes villes, ça m’a fait un peu peur de voir tout ce monde, mais on a passé une super bonne soirée. Bisous.
Manon : Aujourd’hui on marche toute la journée avec notre nouveau copain espagnol Adrià. On est de bonne humeur, c’est léger et joyeux, L râle sur quelques montées mais rien d’inhabituel :D on chante encore le canon que je lui ai appris hier (« I like the flowers, I like the daffodils, … » coucou la famille ❤️)
L’arrivée dans Pampelune est longue et L a mal au talon mais on arrive finalement dans l’auberge aménagée dans une église. C’est particulier mais pas autant qu’imaginé. Alors L, qui redoutait un peu cette nuit dans une église, est plutôt rassurée :)
Moi, j’apprends à lâcher prise. A lâcher sur tout ce que j’ai envie de transmettre à L. Je prends conscience que c’est en ne disant rien de particulier et en n’essayant pas à tout prix de faire évoluer les choses dans une certaine direction que le mouvement et les pensées naissent. Alors je tente de lui laisser cet espace et cette liberté, de lui rendre sa responsabilité et ses choix. En étant simplement là.
Et alors je souris et me réjouis intérieurement (pas trop quand même hein, on a dit qu’il fallait rester équanime) de ses petites phrases que je regarde surgir et évoluer. Ses « je suis fière », ses « non mais ça ne servait à rien d’avoir peur en fait », ses « Manon j’ai compris comment faire pour les montées ! Il faut faire des petits pas ! » (c’est ce que je lui dis depuis 7 semaines quand même 🫣❤️).
Ce soir on mange des tortillas avec nos copains. C’est bizarre Pampelune. J’ai l’impression d’être catapultée dans l’autre monde, celui d’avant le Chemin, avec plein de jeunes partout qui font la fête un vendredi soir. Je me sens un peu dans un univers à part auquel je n’appartiens pas. Plus. Enfin plus pour le moment 😁
On rentre pas trop tard pour nos devoirs, et on se couche plus tôt qu’hier. Demain, 24 km !
Oh ! Et j’ai trouvé des nouveaux poscas pour colorier mes galets, je suis contente !
Samedi 16 novembre
L : Holá ! Vous allez bien, moi oui, à peu près.Nous avons fait au moins 2 km dans la ville, c'était si grand.
J’ai eu mal, mais très mal au talon aujourd’hui, mais je m’en sors.
Ce soir, nous sommes arrivées à Puente la Reina avec tous les nouveaux copains et nous nous sommes arrêtées pour boire quelque chose avant d’aller au gîte et là petit resto de pèlerins, petit Uno où j’ai gagné 4 fois sur 7 parties et 2 parties de bras de fer que j’ai gagnées !! Ha ! ha !
Et là petit (grand) dodo ☀️
Manon : On marche à quatre avec Adriá et Yolande. Les paysages sont larges et vallonnés. Une belle côte suivie d’une belle descente dans les cailloux. On retrouve notre copain Giuseppe. Tout le monde a adopté la chanson “Alleluia” que j’ai revisitée en “Allez L”. Je vous laisse essayer, ça fonctionne super bien ! Ce soir, petit resto, plein de Uno, une chouette ambiance entre nous. Giuseppe fait un break demain. On continuera à quatre. On continue d’élargir notre vocabulaire espagnol, j’adore ! Allez, on avance bien.
Dimanche 17 novembre
L : Hola, como estás ? Bien y tú
Aujourd’hui, mentalement, c’était dur. Ces derniers temps, j’avais du mal à extérioriser ce que je ressentais. Du coup, je rumine tout ce qui se passe dans ma tête, les questions, les doutes, les actions de chacun…
Cet après-midi, j’ai tout lâché. J’ai pleuré et j’avais du mal à dire ce que je ressentais. Mals là ça va un peu mieux, mais ce n’est pas encore ça, et ce soir, c’était super avec les copains. On a bu un verre, on a bien mangé, j’ai commandé mon repas en espagnol. J’ai appris les directions en espagnol, on a parlé avec Manon et voilà ^^. Allez bye kiss kiss
Manon : Réveil compliqué ce matin, petite nuit après toutes ces belles parties de Uno. Les douleurs de L reviennent vite, ça va être difficile aujourd’hui. S’adapter à l’Espagne et au côté international dans une autre langue, est compliqué pour L. Difficile aussi pour moi de jongler entre l’anglais et la traduction, la rencontre de nouvelles personnes tout en apprivoisant ce nouveau chemin dans ce nouveau pays.
Elle lâche finalement tout ce qu’elle a dans la tête et, même si elle aurait aimé pouvoir parler à quelqu’un d’autre que moi, ça me permet de mieux la comprendre et de s'adapter.
Veiller à ce qu’elle se sente incluse malgré la langue, trouver comment gérer le fait qu’elle ait besoin d’être sans moi, mais qu’elle ne se sente pour autant pas suffisamment en sécurité que pour être seule.
De nouveaux défis pour les semaines à venir.
On passe une belle soirée encore avec Adriá et Yolande. Je suis heureuse qu’ils partagent un petit bout de chemin avec nous.
Douce soirée, j’espère une meilleure nuit pour toutes les deux.
Lundi 18 novembre :
L : Hello, vous allez bien. Moi à peu près.
Je n’ai pas grand-chose à dire mais aujourd’hui, la journée est passée vite.
Ce soir, j’ai dit que Yolande et Adriá étaient mes amies et ça a touché Adriá. Je les aime beaucoup.
Papa, merci beaucoup pour ton commentaire. Manon me l’a seulement montré ce soir ; j’étais heureuse et je voudrais te raconter mes histoires, si tu veux que je t’appelle, mets ton numéro. En tous cas, j’étais émue. Merci beaucoup 🖤
Manon : Une belle journée pleine de soleil, en short et tee-shirt, la route est toujours belle, nos deux copains toujours aussi drôles et précieux à nos côtés.
Avant de commencer à marcher, on passe par une pharmacie pour trouver de nouvelles semelles pour L, en espérant que ça soulage son pied. On marche parfois seules, parfois à deux, parfois à trois, parfois à quatre. On rit en parlant avec l'accent de notre ami Giuseppe, on répète avec L un autre canon que je lui ai appris et on prend du plaisir à enregistrer nos voix. Ce soir, on se cuisine des pâtes et on se fait mettre au lit trop tôt à notre goût par la responsable du gîte. Pas grave, demain on marche encore ensemble !
Mardi 19 novembre
L : Hola, como estas , Bien y tú. Moi ça va à peu près. Beaucoup de douleurs aux pieds, aux jambes. Je pense que mon corps récupère de moins en moins d’énergie et que les douleurs s’accumulent… Mais, je vais tenir jusqu’à Santiago. Demain, nous faisons un break à Logrono et je ferai l’étape de 28,3 km. Je vais la faire, je le sais, j’ai juste eu peur à cause de l’étape que j'ai faite de 27 km de Aumont Aubrac à Nasbinals. Mais je vais y arriver.
J’ai parlé avec Manon de ma vision de la situation et de notre relation actuelle. Elle a entendu et je lui ai dit “je ne veux pas que tu penses que je vais être méchante, mais simplement que j’ai besoin de remettre tout en ordre pour mieux se retrouver”. Pour la rassurer, mais ça n’empêchera pas que l’on passe de bons moments ensemble.
Bref, demain, on va dire “au revoir” à Adriá, passer le début de la matinée avec Luis et il prendra son train à 1h de l’après-midi. Il va fortement nous manquer, ça me rend un peu triste qu’il parte, mais c'est le chemin. Voilà 🖤
Manon : Une journée avec beaucoup de montées pas tout à fait attendues, L stresse un peu pour réaliser nos 20 km dans les temps mais elle avance à un rythme incroyable malgré la fatigue et sa douleur au pied qui ne s'est pas arrangée aujourd'hui. On arrive à Logrono où, après avoir fait un point sur nos prochaines étapes, on décide de faire un break demain pour tenter ensuite d'enchaîner deux grosses étapes. C'est L qui a d'elle-même décidé qu'elle voulait se lancer ce défi et dépasser sa peur des 27km qui la poursuit depuis nos premiers jours. Je suis tellement heureuse pour elle qu'elle ose affronter cette peur, c'est un pas immense.
Ce soir on passe la soirée avec nos deux acolytes du moment, Adrià et Yolente, ainsi que deux coréens, notre copain Kangsah et Kihong. On rit beaucoup, toujours. C'est une belle soirée. La dernière avec Adrià qui s'en va demain et avec Yolente qui continue de marcher. Ça va être triste de les perdre tous les deux. Mais ce sera peut-être aussi la place pour de nouvelles rencontres et de nouvelles aventures à deux !
Je vous laisse, c'est l'heure des boules quies, on a droit au pire concert de ronflements ce soir !
Mercredi 20 novembre
L : Coucou vous, comment vous allez ? Moi un peu stressée pour l’étape de 28 km demain, mais je sais qu’après deux mois de marche, je devrais être habituée, mais je ne me sens pas en pleine forme, donc on verra. Je tente et si ça ne marche pas, c’est pas grave, j’aurais eu le courage de vouloir les faire.
Aujourd’hui, on a dit au revoir à Adrià qui devait prendre le train, encore un copain de partie et on a aussi dit “au revoir” à Yolente qui elle a continué le chemin. A force on s’habitue aux “au revoir” ; ça fait toujours mal… mais c’est la vie !
J’ai eu une grande réflexion aujourd’hui. Je me suis dit que nous étions si loin de Santiago, mais en même temps tellement proches. J’ai hâte que ça se termine pour une meilleure vie, mais en même temps penser au retour me rend triste, car même si cette routine de marche peut parfois m’énerver, je l’aime quand même. Voilà 🖤
Manon : Ouille réveil difficile ce matin, nuit un peu trop courte. Mais la soirée était joyeuse et, ce matin, on prend le petit dej de bonne heure avec nos deux copains avant que la famille de ces quelques jours ne se sépare. Yolente continue son chemin et Adrià arrête le sien et nous, on fait un break ici. Les “au revoir” sont intenses. C’était vraiment de belles rencontres. Who knows, on se reverra peut-être un jour ?
Journée tranquille ensuite avec L. On déambule dans Logroño, on boit des cafés à gauche à droite, on se pose à l’auberge et là, magie, plein de nouveaux pèlerins, plein de potentiels nouveaux copains. Des francophones en plus de ça ! L est trop heureuse, ça me fait plaisir. Moi je dessine quelques cailloux, ça faisait quelques jours que je n’avais plus pris le temps. Ce soir on refait nos traditionnelles pâtes au pesto améliorées miam miam ! On clôture évidemment par quelques parties de Uno puis zou au lit : demain une journée défi nous attend !
Jeudi 21 novembre
L : Hola,comment ils vont ? Moi pas trop bien, douleurs complexes à gérer et à des endroits pas pratiques. La fatigue, la routine etc.
Nous n’avons finalement pas fait 28 km, mais nous avons quand même fait 18 km pour aller à Ventosa, mais tout était fermé. Alors une gentille dame nous a conduit à Najera et nous sommes allées au gîte, avec les copains, puis nous sommes allées au resto. On a fait plusieurs parties de “Président” et j’ai fait un appel avec mon père. C’était trop chouette. J’étais heureuse !! et voilà 🖤
Manon : Journée pleine de rebondissements !
On démarre un peu tard après un p’tit déj avec nos deux nouveaux copains français, Thomas et Nicolas. Il fait froid, gris, le vent souffle fort. 28 km au programme.
La sortie de Logrono est longue. On traverse la ville, on passe par des parcs. On croise des petits écureuils en recherche de nourriture pour l’hiver. Ils viennent même manger dans la main de L. Je vous laisse imaginer son bonheur. Mais le temps passe, et à 11h30, on n’a fait que 7 km. Le stress de L monte. La fatigue aussi, le corps a du mal à récupérer, les douleurs ne font qu’augmenter, la tête n’arrive plus à accrocher aux défis qu’elle se lance. Alors on change de plan et on finit par décider de s’arrêter à 18 km aujourd’hui. On redémarre le cœur et les pieds plus légers. Mais un peu plus tard, Thomas qu’on essayait de motiver à s’arrêter avec nous ce soir nous appelle avec une mauvaise nouvelle. Et une bonne aussi, évidemment. Il nous apprend qu’il n’y a aucun hébergement ouvert à 18 km comme espéré mais qu’une femme rencontrée dans un café est prête à nous amener en voiture jusqu’à la fin de notre étape de 28 km prévus au départ. On continue d’avancer, la route n’est pas très agréable, on longe une autoroute. La femme qui nous attend en voiture est adorable. En 10 minutes, on a parcouru les 10 km qui nous restaient.
Ce soir on va manger un bout avec nos deux copains français. L appelle son papa et ça se passe tellement bien, waw, elle rayonne, ça fait trop plaisir ❤️ on joue ensuite à Président (pour changer un peu de Uno quand même parfois).
Encore une journée de plus. L compte le nombre de jours qu’il nous reste avant que notre aventure se termine. 29. C’est fou. Beaucoup et si peu à la fois. Plein de choses encore à vivre !
Vendredi 22 novembre :
L : Aujourd'hui c'était très dur, j'ai pleuré toute la matinée. Mais nous ne sommes arrivés qu’à 17h et quelques. Nous allons faire une pause à Burgos.
Voilà
Manon : Réveil difficile pour moi aussi ce matin. Le rythme en Espagne semble avoir changé. On mange et on se couche plus tard, mais on doit toujours avoir quitté les auberges pour 8h le matin. On a du mal à rattraper la fatigue de la journée.
Aujourd’hui, tout est too much pour L. Chaque caillou sur le chemin lui fait mal au pied. Chaque km fait naître une nouvelle ampoule. Elle en a marre, elle est fatiguée, elle a mal. Pas de plaisir dans cette marche. Aucune envie d’avancer. Difficile de la motiver mais on n’a malheureusement pas vraiment le choix, personne ne viendra nous chercher et il n’y a pas de bus.
La pause de midi nous fait du bien et les 6 derniers km sont heureusement plus fluides et plus doux.
Il fait froid, malgré le soleil timide, le vent est glacial. Ça y est, chez nous aussi, winter is coming.
Moi aussi je fatigue. Mes chaussures pareilles d’ailleurs. Elles craquent, se cassent et se lissent de tous les côtés. Encore quelques centaines de kilomètres, chicos, après ce sera repos éternel promis.
En arrivant, on appelle Yvon pour parler du mood des troupes et du plan des jours qui arrivent. On décide de prendre un bus pour rejoindre Burgos demain et faire un gros break là- bas, avec des longues nuits et pas de réveil. Je me rends compte qu’on n’en a eu qu’une seule depuis notre départ. C’était dans notre deuxième semaine de marche. Les futures grasses mat’ de Burgos seront bien nécessaires. Et méritées :) Ce soir, on s’endort un peu plus légères.
Samedi 23 novembre
L : n’a pas écrit
Manon : Journée de transition. On attend le départ de notre bus vers Burgos qui part en début d'après-midi.
Alors on traîne dans un café, on mange des churros avec un chocolat chaud (apparemment c’était typique du café, on n’a pas dit non). Dans la matinée, je me rends compte que je ne trouve plus ma boucle d’oreille vélo qui fait un peu partie de moi. Panique à bord et tristesse immense. L a d’ailleurs aussi oublié sa gourde à l’auberge alors on se dit qu’on va vite passer voir (par chance, elle ouvre 55 minutes avant le départ de notre bus). On croise tout juste la femme de ménage, je lui parle de mon « earing bicycletta » et elle sourit directement, elle me raconte que la boucle d’oreille s’est plantée dans la semelle de sa chaussure. Et là elle me montre un petit panneau en liège sur le lit du hall d’entrée avec plein d’infos pour les pèlerins. Et ma bicycletta qui m’attend dessus ❤️ elle ne lira jamais ces mots, mais je lui dis encore un énorme merci.
On fonce ensuite prendre notre bus, on ne sait pas trop ce qui se passe mais il y a une fanfare qui joue. On rit et on danse pour se réchauffer et attendre. Oui parce que tout à coup il fait vraiment vraiment glacial hein. On a troqué le short et le tee shirt contre le bonnet et les gants.
1h30 de route jusqu'à Burgos, on longe le chemin qu’on aurait dû emprunter à pied.
Une fois arrivées, on trouve le airbnb qu’on partage avec Sandrine, une copine rencontrée à Saint Jean Pied de Port et une espagnole, Laia. On passe une belle soirée ensemble, pleine d’histoires, de rires et de partages.
Ce soir, on dort dans un lit avec une couette, on a de vraies serviettes pour la douche et, demain, pas de réveil. Douce saveur de vacances.
Dimanche 24 novembre
L : Hola. Comment allez-vous ? Moi, je récupère doucement. Aujourd’hui, grasse matinée, j’ai dormi jusqu’à midi, ça m’a fait un bien fou.
Nous avons fait des recherches sur nos ascendants astrologiques ; moi je suis “lion” ascendant “scorpion” et ça colle tellement avec moi, c’est fou.
Nous nous sommes promenées dans Burgos, puis on a retrouvé KhangsE et Yolente. J’étais super contente, puis on a mangé un bout, puis nous sommes rentrées, mais je ne suis pas fatiguée.
Et demain, l’anniversaire de mon étoile de ma vie 🖤Bisouilles 🖤
Manon : Je me réveille à 11h30 ce matin, L 30 minutes plus tard. On en avait besoin.
Début de journée toute tranquille avec nos deux copines Sandrine et Laia, on traîne dans notre petit salon, ça nous avait manqué :) Vers 15h on se met en route pour se balader dans Burgos. On retrouve par hasard notre copain Khangsa qui vient prendre un café avec nous et Yolente qui vient d’arriver à Burgos aussi et à qui je fais un petit dessin dans la crédentiale :) Soirée entre ville et appart, demain encore un petit jour de repos !
Lundi 25 novembre
L : n’a pas écrit
Manon : Deuxième journée de repos à Burgos. L dort mal, on se réveille plus tôt qu’hier. En début d'après-midi, on téléphone à Yvon pour faire le point sur la suite de la marche. Difficile de relancer la motivation de L, mais pour que son projet de retour se réalise, elle n’a pas trop le choix, elle doit continuer à avancer. Difficile à avaler, tout ça lui restera dans la tête, dans la gorge et dans le cœur toute la journée.
Ce soir, on retrouve d’autres copains qu’on rejoint dans l’appartement qu’ils louent. On passe de joyeux moments qui font un peu oublier le reste.
Allez demain dernière journée à Burgos où on construira à deux notre plan d’attaque pour les trois dernières semaines qu’il nous reste.
Mardi 26 novembre
L : n’a pas écrit
Manon : On quitte notre Airbnb pour aller déposer nos sacs à l’auberge municipale. On se remet dans le bain de la vie pèlerine. C’est fou comme on s’y ré-habitue vite à cette autre vie où on ne marche pas tous les jours. Nos copines Sandrine et Laia sont parties ce matin et nos copains d'hier soir, Thomas, Nico, Victor, So Ye, Kihwan, …, émergent encore de la veille. Alors on se balade, on cherche des tapas et des pinchos, un petit café et un dessert. On attend que la cathédrale ouvre pour aller la visiter mais il semblerait que 4 écoles aient décidé d’y aller en même temps que nous. La file est immense et il fait si froid… On renonce.
Ce soir, on retrouve nos copains et on se laisse entraîner sur la patinoire de la petite foire de la ville. L et moi sommes très nulles, mais en se tenant la main on s’en sort beaucoup mieux ! On enchaîne avec des pizzas du supermarché qu’on mange chez eux. Mais depuis notre arrivée dans leur appartement, L ne se sent pas bien et tremble. Elle commence une crise d’angoisse. Il y a beaucoup de choses à gérer ces jours-ci. On s’isole et on gère ça le mieux possible. On quitte nos copains précipitamment, prises entre le souffle encore court de L et le stress de louper l’heure de fermeture de notre auberge qui barricade (littéralement) ses portes à 22h. J’aurais aimé qu’on puisse avoir plus de temps pour mieux prendre soin de ce moment. Les portes de l’auberge sont fermées quand on arrive, il est pourtant 21h58. Je les appelle et quelqu’un vient nous ouvrir. Ouf. L prend un moment pour elle dans la petite bulle de son lit. J’espère qu’elle s’apaise doucement.
Demain ça y est, on quitte Burgos et on fait 3 heures de bus pour rejoindre Léon d’où on recommencera à marcher. Au compteur, il nous reste 16 jours de marche jusqu'à Santiago ! Plein de nouvelles aventures et de nouvelles rencontres encore à venir !
Jeudi 27 novembre
L : n’a pas écrit
Manon : Petit déj et au revoir avec nos copains ce matin. Mini espoir qu’ils nous rattrapent avant notre départ dans quelques semaines mais rien de certain… On se lance dans 3 heures de bus à travers la meseta. Il y a beaucoup de brouillard, tout semble plat et aride. On parle de ces presque 200 km comme d'une épreuve psychologique tant le paysage est linéaire et redondant. L est très heureuse de la skipper, quant à moi, j’avoue que ce genre d'expérience qui confronte intensément à soi-même a plutôt tendance à éveiller ma curiosité et mon amour du challenge mais ce n’est pas le moment de se lancer là-dedans.
On arrive donc à Léon, une grande ville qui bouge et qui vit. On y retrouve rapidement notre copain Ludovic qu’on n’avait plus vu depuis Saint Jean Pied de Port. Plein de plaisir et de joie de le retrouver, de le découvrir transformé depuis notre rencontre avec lui, de le suivre dans notre balade dans Léon a la recherche de tortilla, puis de cheesecake. On n’aura rien eu de tout ça mais c’est pas ça qui compte :). Je les laisse un peu se balader à deux pendant que je rentre déjà à l'auberge.
En refaisant le planning des étapes, je me rends compte qu’il ne nous en reste pas 16 mais bien 17. Oups. Et que j’avais tout compté comme si on commençait à marcher aujourd’hui. Re oups. Bon au final rien de grave, tout ça nous fait arriver le 14 à Santiago. On est toujours dans les temps !
Ce soir, on mange avec Ludo à l'auberge et on joue à… UNO évidemment !
Allez au lit ! Demain c’est reparti !
Jeudi 28 novembre
L : Hola, désolée mais chers téléspectateurs, ça fait trois jours que je n’ai pas écrit. Veuillez m'excuser. Cette journée commence avec beaucoup de stress comme depuis quelques jours et se finit avec un poids en moins et plus de légèreté. Merci beaucoup.
Mais le chemin aujourd’hui était tout plat, tout linéaire et monotone. C’était d’un ennui. Mais ce soir, nous sommes dans un gîte avec des gens que l’on a vus vite fait sur la partie française, ça fait trop plaisir de faire plus connaissance !
Là, je compte lire un livre et me coucher paisiblement. Bisous 🧡
Manon : Ce matin, on prend notre petit déj avec Ludo et on lui dit au revoir car il doit régler ses soucis de téléphone. On espère qu'il nous rattrapera plus tard dans la journée...
On se met en route pour nos 15km, sauf qu'on découvre en cours de route que ceux-ci ne prennent pas en compte les 4 km qu'on a déjà faits pour sortir de Léon... Aïe, il faut donc rajouter 4 km à la journée et ça passe mal pour le moral de L qui en a marre marre marre. Heureusement l'étape est facile, toute plate et presque toute droite. On avance vite et finalement onarrive pas si tard ! Ludo ne nous rejoindra finalement pas ce soir... On espère qu'il nous rattrapera plus tard ! On rencontre de nouveaux copains, avec qui on ne restera pas longtemps car ils font déjà une étape plus longue que nous demain. Pas grave, c'était un chouette repas avec eux !
Ce soir, L reçoit de belles nouvelles. Elle pourra s'endormir plus légère. Apaisée. Je suis heureuse de voir et de partager son émotion.
Et demain, vraie petite journée de 16km (promis L ! 🫣)
Il est 21h, on n'a jamais été se coucher aussi tôt ! Je vais en profiter pour colorier quelques cailloux ramassés aujourd'hui !
Vendredi 29 novembre
L : Booh ! Et ouai je sais j’vous ai fait peur. lol
La journée s’est bien passée en globalité. Nous avons marché avec Katia et Justine. Elles sont superbes et super gentilles, mais malheureusement, elles ont fait 32 km et nous 13… Donc les copines sont devant. Nous sommes arrivées à 11h45, puis nous nous sommes installées dans l’auberge, puis pris une douche, puis nous nous sommes assises près d’une jolie et calme rivière avec des poissons et des grues qui volaient au-dessus de nous, c’était magnifique. Manon dessine ses cailloux et moi j’essaie ; le soleil qui nous accompagne toujours 🖤 ! bis !
Manon : On démarre ce matin plus tôt que d’habitude. Très vite, le pas de L la fait rejoindre Katia et Justine, deux pèlerines croisées il y a plusieurs semaines en France. Je leur laisse leur avance, je lui laisse son espace et son moment avec elles. À distance et dans ma bulle, j’ai l’impression de reconnecter avec mon corps et mes sensations.
On arrive tôt à notre étape d’aujourd’hui. On prend un café et une tortilla avec Justine et Katia avant qu’elles ne continuent leur route. L et moi, on retrouve ensuite nos âmes d’enfants en allant jouer dans la plaine de jeux à côté de l’auberge. Elle ose redécouvrir le plaisir de la balançoire que j’aime tant moi aussi. On se dirige ensuite vers la rivière où on s’assied sur les cailloux. Je me lance dans mes dessins sur les galets évidemment, L se joint à moi aussi. Doux soleil, tranquillité. Petit bonheur partagé. Le temps passe et on espère voir arriver notre copain Ludo. Et puis une ou deux heures plus tard, magie ! Le voilà de l’autre côté du pont qui nous appelle !
Une belle soirée à quatre, avec Claude également, un autre pèlerin croisé plusieurs fois depuis Saint Jean Pied de Port. On rit beaucoup, ça fait du bien.
Demain matin, on marche peut-être un peu avec eux, ce serait chouette !
Samedi 30 novembre
L : Whou - Whou !!!
Maintenant sur les blogs, je peux dire que je vais avoir une SUPER FAMILLE D’ACCUEIL que j’aime mon copain avec qui je suis depuis trois mois et demi. Que je suis enfin libre !!! Un poids en moins ha ha ! Merci Compostelle. Merci mon éducatrice ! Merci Yvon et merci Manon.
Je vais avoir une suite de vie incroyable, prendre soin de moi et de ma sœur et de ceux que j’aime. Surtout de mon couple. Une vie saine s’offre à moi ; Houra !!!
J’ai hâte d’aller dans ma famille ! 🖤Bisous !!! ☀️ 🙂
Manon : On démarre notre journée en marchant avec Ludo et Claude. Mais assez vite, on se dit au revoir, ils doivent accélérer le pas pour leur grosse étape. On continue à deux, c’est fluide, le chemin est plutôt plat. On mange une super tortilla dans un petit café le midi et on termine tranquillement notre étape. Cet après-midi, on va se poser dans un petit café pour colorier nos cailloux, c’est chaleureux et familial, un peu bruyant, c’est l’effervescence espagnole :) L passe un appel à sa sœur et lui annonce son projet de nouvelle vie. Elles ont l’air bien toutes les deux ensemble, ça me fait plaisir de les voir se retrouver après toutes ces semaines de distance.
De retour à l’auberge, on enchaîne la cuisine, le repas, une dizaine de parties express de UNO à deux, du chocolat (always ❤️), on se fait un peu enguirlander par l’hospitalier parce qu’on a changé de lit sans demander (oups), lecture, planification d’étapes (impossible d’avoir les infos correctes pour savoir quels gîtes sont ouverts et je dois donc constamment ré adapter le plan en contactant directement les auberges…) et puis zou dodo !
Allez, une journée de plus qui s’achève !
Dimanche 1er décembre
L : Holà tout le monde, comment vous allez ? Moi ça peut aller.
Cette après-midi, j'ai été un peu malade donc pas folle folle la journée.
Des douleurs par-ci par-là tout aussi désagréables.
Mal aux pieds, mal dans le creux du genou, mal au ventre, à la tête etc...
Mais dans cette journée de fatigue et de douleurs, des petites choses sympathiques se sont passées !
Notre hôte de l'albergue d'hier, nous a fait un câlin tout ému avant que l'on reprenne le chemin. Il était adorable !
Et puis sur le chemin nous avons croisé une personne qui était dans la même albergue que nous, il s'appelle Javier (Ravièr en français) qui a une soixante dizaine d'années super sympas qui m'a dit à un moment que j'étais mignonne. Beaucoup de personnes sur le chemin me l'ont dit, dont plusieurs coréens et coréennes. Manon m'a dit «C’est qu'il y a quelque chose à comprendre ». Je n'arrive toujours pas à me dire que je suis belle si c’est ça dont elle voulait que je me rende compte...
Mais ça viendra avec le temps !!
Ce soir, nous sommes dans une chouette albergue. Notre hôte est super sympa, trop mimi, il nous a aidé à essayer de trouver des solution pour le kilométrage des étapes !
On est à 12 jours de Santiago WAOUUUH!!! C’est fou comme c’est proche hehe !!
J'ai hâte ! ^^
Je me pose devant un bon feu pour cheminer avec mon merveilleux livre.
Kiss kiss 🌑⭐️
Manon : Décembre !! C’est fou non ?
Ce matin, notre hôte nous a fait un câlin avant de partir. C’était un peu comme un papa d’un soir, qui se fâche mais qui prend soin en même temps.
On quitte l’auberge à 8h, il fait encore nuit. Un dimanche matin à Astorga, c’est la rencontre de deux mondes : celui de la nuit et de la fête, avec celui des pèlerins. On croise ceux et celles qui terminent leur journée alors qu’on entame la nôtre. Ça m'amuse de sentir ces univers tellement différents qui se frôlent.
On sème plein de petits cailloux colorés partout. Les ptites poucettes.
L se sent barbouillée et a mal au ventre, pourtant on avance bien. L’excitation de l’arrivée à Santiago commence à monter. J’ai envie de tracer et d’avancer vite.
Les derniers km sont difficiles pour L et elle fait même une sieste en arrivant à l’auberge, je pense que ça ne lui est encore jamais arrivé depuis notre départ.
Notre hôte d’aujourd’hui est un autre papa d’un soir. Il nous parle en espagnol comme si on comprenait chacun de ses mots. Il m’aide à adapter les étapes et appelle pour nous certaines auberges pour demander s’ils sont ouverts ou pas. Il allume le poêle à pellets et vient vérifier plusieurs fois qu’on va bien, qu’on a assez chaud, que nous sommes bien installées, que L va mieux, qu’on a tout ce qu’il nous faut.
La santé de L semble d’ailleurs s’améliorer dans la soirée, chouette !
Plus que 250 km jusqu'à Santiago, c’est dingue ! Et 25 km demain ! Vamos !
Lundi 2 décembre
L : Comment vous allez ??
Moi ça va bien, aujourd'hui, nous avons fait 25 kilomètres et ils étaient plutôt "faciles" en tout cas, j'ai su gérer mes douleurs !
Avec Manon, ce matin, nous sommes arrivées à la Croix de Fer.
J’ai gardé un caillou que j'avais depuis Saint Martin en France, que Édouard, un ancien copain qui lui est arrivé à Santiago il y a plus de 1 semaine, m'avait donné.
Manon et moi, nous avons pleuré car ce lieu est tellement fort et chargé d'énergie !
Et puis après avoir posé ce caillou avec tout ce dont je ne voulais plus et que je voulais abandonner, je me suis sentie très légère.
Dans le petit village de Molinaseca qui est un lieu très charmant, j'ai vu une petite bande de cats🐱. Ils étaient trop mimi ! Je leur ai fait partager un bout de jambon, ils avaient l'air d'avoir faim.
Voilà, je retourne à ma nouvelle addiction qui est la lecture et je vous laisse sur ça !
Bisouilles ⭐️
Manon : Ce matin, la lumière est magnifique. Le soleil qui se lève doucement à travers les nuages leur donne une teinte rosée à côté de ceux qui restent encore gris foncé. Ça ne donne rien en photo. Alors je les photographie avec mes yeux.
L ne se sent à nouveau pas très bien, comme si elle n’avait plus d’énergie et plus de force. Je me lance alors, le temps de nos 3 derniers kilomètres de montée, dans une histoire inventée de licorne et de monsieur à la guitare rose. Ça la distrait un peu :)
On arrive enfin à la célèbre « cruz de ferro », la Croix de Fer, à 1500m d’altitude, où les pèlerins qui passent ont pour tradition d’y laisser un caillou rempli de tout ce qu’ils ne veulent plus garder, tout ce qu’ils désirent déposer, ne plus porter sur leur dos et laisser sur le Chemin. Des souvenirs, des pensées ou croyances, des souffrances et traumatismes, des morceaux d’histoire, des tristesses, des déceptions, des colères, … L’émotion qui me gagne en y arrivant est inattendue. On dépose nos galets colorés tous les deux avec les milliards d’autres cailloux déjà posés avant nous. Je me mets à pleurer. On se prend dans les bras et L pleure aussi. C’est intense.
On s’assied quelques minutes sur un banc avant de repartir. Peut-être une impression d’être plus légères. Peut-être. En tout cas, les presque 20km qu’il nous reste défilent. On trace, L a repris de l’énergie et on dévale cette pente. En arrivant à Molinaseca à 17h, elle a presque envie de faire 8km de plus pour atteindre Ponferrada ce soir. Bon, une chose à la fois quand même. 25 km avec ce plaisir et cette légèreté-là, c’est une victoire de plus. On ne va pas gâcher ça avec 8 km éventuellement de trop 😉 alors on s’arrête là pour ce soir, on fait plein de machines, on va manger un bout dans un petit resto parce que ça fait deux jours qu’on mange des pâtes au pesto et, vite vite vite, on file lire nos livres respectifs.
Demain, pour la première fois, on ne sait pas trop jusqu'à où on va (pour celles et ceux qui me connaissent, vous remarquerez le lâcher prise ! 😁). 17 km ou 23 ou 32. On verra en fonction des hébergements ouverts et de l’énergie des troupes ! Hâte !
Mardi 3 décembre
L : Le réveil sonne. L'heure de se lever du lit et de commencer à se préparer, soi et ses affaires.
Nous prenons notre petit déjeuner, nous nous brossons les dents etc...
Puis on commence à marcher dans la nuit.
Plus tard, je me demande combien nous allons faire de kilomètres sachant que rien n'était spécialement prévu. Je me pose alors la question de combien allons-nous faire de kilomètres ? Sachant que je n'ai pas bien dormi, du moins très peu, que je me sens un peu mal à cause des douleurs etc..
Je ne sais pas trop quoi faire. J'en parle à Manon qui me partage ces différents points de vue et j'essaie de prendre une décision.
J'avais le choix de 3 étapes. Une à 8 à Ponferrada. Une à 16/17 km je ne sais plus où et une autre à 23 et si nous ne trouvions pas à ces étapes, nous ferions 32, soit à pied ou en taxi.
J'ai pris l'option 1 j'ai écouté mon corps.
Nous sommes arrivées à Ponferrada dans un café assez joli. Nous y sommes restées 2 bonnes heures pour prendre quelque chose à boire et à manger.
Nous sommes parties vers l'albergue qui n'était pas ouverte. Nous y avons posé nos sacs puis nous sommes parties faire des courses.
On est revenues attendre pour qu'elle ouvre, on s'installe, on mange un peu, puis gros coup de tristesse...
Nous sommes ressorties après pour m'acheter un livre de Leïla Slimani dont le titre est «La chanson douce».
La bibliothécaire a dit que tout le monde connaissait ce livre et que c'était un très bon choix.
Les lumières de Noël illuminent la rue et mes yeux, c'était tellement joli j'étais super contente 😊
On rentre, on fait à manger et tout le tralala et maintenant au dodo. Bye !
Manon : Bon eh bien l’énergie des troupes n’était pas très haute ce matin ! Après quelques kilomètres, L me dit qu’elle se sent fatiguée et qu’elle aimerait pouvoir se reposer aujourd’hui. Et vu qu’on avait avancé plus que prévu les journées passées et que notre étape du jour dans notre planning initial était Ponferrada, à 7km donc de notre départ de ce matin, L s’est dit que c’était l’occasion de profiter d’un petit répit qui ne nous mettrait pas en retard sur le programme (j’ai l’impression que cette phrase est incompréhensible et beaucoup trop longue, pourtant je l’ai beaucoup retravaillée je vous jure, mais si ce n’est toujours pas clair, c’est pas grave, je vous autorise à faire semblant et à passer à la suite l’air de rien).
Mini journée donc, marquée cet après-midi par une grosse déception liée à son retour, rien de très très très grave, mais bon, tout ne se passe pas exactement comme elle en rêvait, et ça reste évidemment difficile à digérer. Pour se changer les idées et se mettre un peu de baume au cœur, on sort à la recherche d’une librairie qui vendrait des livres en français. Et là, magie, non seulement on trouve un nouveau livre pour L, mais en plus de ça, ce soir, pour la première fois, les illuminations de Noël sont allumées dans les rues qu’on traverse ! C’est kitsch, mais ça nous fait trop plaisir de nous y balader.
Ce soir, au programme c’est cuisine et lecture !
Mercredi 4 décembre
L : Ce matin, commence une journée à la fois désagréable et agréable. De par les douleurs, l'humeur et ce qui se passe autour.
De temps en temps, je reste un peu fermée mais sans plus.
Le paysage est joli, les villes pareillement.
Ces 24 kilomètres se sont bien passés, mais demain j'hésite. Soit faire 16 km ou soit en faire 27/28. Ma tête me dit que je peux le faire et que j'en suis capable. Mais mon corps, quant à lui, n'a pas la grande pêche. Donc, je ne sais pas… Mais la décision je la prendrai demain ou en dormant.
Ce soir je broie un peu du noir, ça arrive de temps en temps. Je m'apaise avec mon nouveau livre et les cailloux que je dessine avec Manon.
Ps: oui, elle a réussi à me convertir aux cailloux lol.
Bonne soirée 🌃
Manon : Plutôt bien reposées, on se lance dans notre journée de 24 km qui se passe plutôt en fluidité. On croise d’autres pèlerins avec qui on discute tant bien que mal en espagnol et en anglais, on mange notre traditionnelle tortilla du midi, il y a même un p’tit bout de soleil pour nous garder un peu au chaud. La journée me semble avoir filé tranquillement.
Ce soir, on se fait une omelette aux champignons avec une salade, petit plaisir ! On colorie des cailloux, L se passionne, elle aussi !
Demain L hésite entre s’arrêter comme prévu après 16km, ou tenter une étape à 28, avec 8km de belles montées à la fin. Le suspense est à son comble, on verra demain ! No pressure :) Et vous savez quoi ?! Il nous reste 10 jours de marche pour arriver à Santiago !!
Jeudi 5 décembre
L : Cette journée était courte, 16 km au compteur lol.
La Petite bruine, nous accompagne pour ce début de chemin.
Je donne à manger à des chats en attendant une Américaine se nommant Amy, puis en attendant aussi on discute avec Beatrix une italienne super sympa qui m'a dit que ce que je faisais était brave et courageux, je suis fière.
Puis, nous marchons et discutons ensemble (en Anglais ces conversations étaient très ludiques). Puis, nous nous sommes séparées peu après.
Nous arrivons à un petit village, dans une albergue sympathique, nous mangeons une paella et dodo !^^
Manon : Les journées de marche se ressemblent. On se met en route avec d’autres pèlerins, on marche un peu ensemble. Les kilomètres passent tranquillement, on a une petite journée devant nous, on ne se presse pas.
On dort ce soir dans un mini village. Notre auberge est également le seul restaurant et café ouvert. Bon, on passera donc l'après-midi et la soirée ici, en tête à tête parce que tous les autres pèlerins d’aujourd’hui ont continué leur route. Le temps me semble long dans ce lieu un peu bancal. Il n’y a pas d’eau chaude dans la douche. Il fait glacial dans chacune des pièces de l’auberge.
Pourtant, petit à petit, l’atmosphère se réchauffe. Je m’assieds près du feu qu’ils ont allumé et je termine mon livre avec un doux happy end. Quand L me rejoint, on enchaîne joyeusement les Uno, elle s’en sort de mieux en mieux dans le mélange de cartes en mode poker et casino, avant de manger une immense et magnifique paella, préparée par notre hôte. On regarde avec passion le dernier concert de Amy Winehouse qu’ils passent à la télévision. Le couple qui nous accueille est aux petits soins pour nous.
Une belle soirée à deux donc, dodo pas trop tard, demain lever pas trop tôt, c’est encore une petite journée… si l’hébergement prévu est ouvert ! Suspense !
Vendredi 6 décembre
L : n’a pas écrit
Manon : Petite journée prévue donc. Elle nous a pourtant semblé interminable. Une longue montée de 700 m de dénivelé, il faut dire que L n’a plus trop l’habitude après tous ces kilomètres très plats en Espagne. Les douleurs se réveillent, l’essoufflement, le ras le bol, les arrêts tous les quelques mètres pour tenter de retrouver une motivation qui serait peut-être cachée quelque part, la comparaison aux autres qui nous dépassent. Puis quand on arrive en haut de la montée et qu’on se dit que c’est terminé…en fait ça continue encore un peu, de descendre et de monter. Il fait froid, le brouillard est épais, une fine bruine accompagne nos derniers kilomètres. Je fais un peu la fofolle pour changer les idées de L. Ça marche un peu.
Nous sommes heureuses d’arriver dans l’auberge qui est bien ouverte (ouf !). On est 3 ce soir, mais on ne croisera pas le 3ème gars qui est déjà dans son lit.
L retrouve de l’énergie et le sourire, tandis que c’est moi qui me prends un petit coup de blues. Les copains et la famille me manquent, mon amoureux, Bruxelles et Lyon, qui abritent la douceur et la chaleur des lieux où je me sens chez moi. Je pense beaucoup à vous tous/tes là-bas. Demain une nouvelle petite journée, plus douce. Après la montée d’aujourd’hui… la descente évidemment.
Samedi 7 décembre
L : La journée commence avec la pluie et le froid et ouai, les gars, nous sommes dans la Galice à une semaine de Santiago. ah ! ah. Je suis si contente que ça se termine, hâte de ma nouvelle vie, hâte de ce qu’elle va me réserver. Je suis si fière de moi et de ce p…. de chemin parcouru. C’est dingue de se dire qu’il y a deux mois, je disais que je n’allais pas tenir trois semaines et que là, je suis en Espagne à Triacastela et que je vais écrire encore.
Merci aux gens qui m’ont soutenue. Merci à mon copain, sa famille. Merci papa et Abby, merci Thomas, mon ange gardien du chemin. Oui, j’ai perdu ton bout de chaussette lol. Merci à Seuil, Yvon, Manon. JE SUIS FIERE DE MOI et plein d’autres gens encore, Sylvie et j’en passe. Merci à tous. Bonne nuit 🖤
Manon : Je me réveille comme je me suis couchée, je traîne mon petit coup de blues. Dehors, il pleut, il fait froid, il y a du brouillard, le vent est fort. Ça ne fait pas bon ménage avec mon moral et puis il y a cette montée, alors qu’on ne pensait que descendre. J’ai peur pour le moral et la motivation de L, 3 km plus tard, on trouve un café. On marche depuis seulement 1h, mais il arrive comme une délivrance. A l’intérieur, il y a un chat, un immense bébé chien, un feu, une poule (je vous jure) et une immense tortilla. Tout ce dont on avait besoin. On y reste 1h. Oups ! En se remettant en route, L se met à chanter tout ce qui lui passe par la tête (les Beatles, des chants anarchistes, Amy Winehouse, nos canons des dernières semaines), puis, en roue libre, elle récite toutes les répliques de vidéos TikTok, Youtube, Insta, qui me sont parfaitement inconnues, mais elle a l'air de bien rigoler 🙂
Ce soir, on retrouve des pèlerins qu’on avait rencontrés bien plus tôt en Espagne et qu’on avait dépassés en bus et notre Jolente 🖤
Je découvre aussi la magie de nos petits cailloux que l’on colorie et sème dans notre sillage. Je me rends compte qu’ils nous accompagnent, mais qu'ils accompagnent aussi les autres
Dimanche 8 décembre
L : Cette nuit pèlerins qui les voient, les prennent en photo et parfois les retournent et y trouvent alors nos petites annotations. Ils découvrent qu’ils sont de nous et on se retrouve alors, nous aussi, un peu avec eux. Quand ils nous connaissent déjà, ils prennent plaisir à savoir qu’on n’est pas loin et que, peut-être on se recroisera. Ça me fait plaisir.
Demain, on marche avec Jolente, joie immense de la retrouver !
, j’ai mal dormi. Un homme qui partage notre chambre n’était pas discret, mais la journée commence avec un petit déjeuner avec notre amie Jolente et nous marcherons avec elle toute la journée.
Nous nous arrêtons dans un endroit assez chouette, joliment décoré et puis là, aïe ! Les douleurs reviennent en flèche, le mal de pieds, de hanches, assez désagréables. Donc, je me mets à chanter n’importe quoi. Nous passons une super soirée en la terminant avec des cailloux. Bisous 🧡
Manon : Une journée entre pluie et brefs rayons de soleil en compagnie de Jolente. On s’arrête peu, il n’y a pas de café ouvert sur la route et la pluie ne donne pas très envie de se poser. Alors on arrive tôt à notre auberge et ça fait du bien aussi. On retrouve plein de copains pèlerins avec qui on va manger. En rentrant, on se lance dans une session “décoration de cailloux” avec Jolente qui nous accompagne. On se rend de plus en plus compte que la fin est toute proche, que dans six jours, on franchira la ligne d’arrivée à laquelle on pense depuis deux mois et demi. Alors que, vraiment, à de nombreux moments, on n’y croyait plus à cette ligne d’arrivée ultime, la voilà qui devient bien réelle. C’est un peu dingue quand même ce qu’on vit ici, tellement fière de cette L qui s'accroche jusqu’au bout.
Lundi 9 décembre :
L : Bah ! Comment allez-vous ? Moi moyen. Je trouve le temps long. J’ai vraiment hâte d’arriver à Santiago. Demain, il nous reste quatre jours de marche et cela fera quatre mois que je suis avec mon amoureux !! Trop contente pour ça.
Petites douleurs, mais ça ira mieux demain 🖤
Manon : Il pleut, j’ai froid, mes chaussettes sont mouillées. En quelques heures, ça fait “splotch - splotch” dans mes chaussures. On marche en mode automatique, nos capuches tombent sur nos visages pour nous protéger de la pluie.
L a mal, je m’inquiète pour son moral.
Le soleil du jour arrive quand on atteint la borne qui nous indique qu'il ne nous reste que 100 km avant d'arriver à Santiago. C’est la fête, c’est un peu fou d’être là.
Ce soir, on cuisine un repas avec quelques copains. Demain, grosse journée, la dernière avant quatre dernières étapes plus courtes. J’espère que ça ira. Allez !! J-5
Mardi 10 décembre
L : Ce matin, je me réveille le cœur lourd comme plusieurs jours qui se sont passés.
Je marche, avec une immense douleur. A la tête et au cœur. J'ai envie d'exploser ! La colère, la tristesse, la haine.
Tout ça regroupé dans un seul corps ne fait pas bon ménage.
Alors toute la journée, je me suis retenue en faisant de mon mieux pour que ce soit agréable pour moi et les autres. Mais, les émotions revenaient de plus belle.
C'était très dur, mais demain, dans 3 jours nous y serons ENFIN !!!
Aujourd'hui cela fait quatre mois que je suis avec mon copain, je l'aime tellement !!
Merci beaucoup pour tout à l'heure vraiment.
Ce soir, j'ai discuté de ce que je ressentais à Manon, elle comprend comme à chaque fois et ma discussion se finit par des pleurs de ma part et de la sienne...
Je mange pour combler ma tristesse et mon angoisse.
Pas très joyeux aujourd'hui...
Manon : Journée longue et difficile. Pour L, beaucoup de douleurs, beaucoup d’émotions négatives à gérer, beaucoup de pensées compliquées. Moi j’essaie d’ajuster ma présence, ma distance, ce que je dis, ce que je ne dis pas, mes réactions. Peut-être pas toujours de façon optimale ou adéquate. La pression monte, le ras le bol aussi.
Ce soir, fatiguées et à fleur de peau toutes les deux, on lâche tout. Sincères et cash l’une envers l’autre, ça fait peut-être un peu mal à entendre, mais ça fait du bien aussi. On en ressort, il me semble, un peu plus apaisées, avec le désir commun que nos quatre derniers jours de marche se passent le plus en douceur possible, en profitant des bons moments qui existent aussi. On va faire tout ce qu’on peut pour que ce soit le cas.
Demain petite journée, ça nous fera du bien.
Mercredi 11 décembre
L : Ce matin, le froid est au rendez-vous, mais le soleil, quant à lui, nous accompagne.
Nous disons au revoir à Jolente qui fait 29 km et nous la reverrons à Santiago.
Ces 14 km se passent tranquillement avec les douleurs qui m'accompagnent.
Nous arrivons au village, et nous prenons une chambre d'hôtel.
Nuit tranquille sans personne irrespectueuse !
Manon : On quitte ce matin notre copine Jolente qui trace pour sa longue journée. La nôtre est plus courte, heureusement. Le soleil est de retour, ça fait du bien. On marche toute la journée avec notre copain belge Emmanuel, je pense que ça fait du bien à L. Mais les douleurs sont toujours là. Le moral est bas, le besoin d’arriver immense. Elles sont difficiles ces journées, même si elles sont plus courtes. Pour L, chaque journée qu’il nous reste est une journée de trop.
Ce soir, on commence par se retrouver dans une auberge avec d’autres pèlerins qu’on croise depuis plusieurs jours. Mais certains d’entre eux, très gentils dans le fond, boivent et fument beaucoup. On ne se sent pas à l’aise. On décide de repartir. On trouve un petit hôtel pas trop cher. Yvon valide le changement de plan. Une nuit tranquille. Pas d’heure de check out demain. On va pouvoir dormir un peu plus longtemps avant d’entamer encore une petite journée. L’avant-avant dernière 😀
Jeudi 12 décembre
L : Nous nous réveillons à 9h30 ce matin. Cette journée s'annonce tranquille. Nous commençons à marcher doucement en prenant le temps. Puis nous croisons Stéphano et Alex qui sont deux amis que nous avons rencontrés sur le chemin quelques jours avant celui-là. On continue notre route, ma douleur m'accompagne toujours, mais elle est moins forte. Les paysages sont magnifiques, les passages de chemin dans la forêt pareillement.
La petite chaleur du soleil sur notre peau que je commence à apprécier. Cette journée était une "balade de santé".
Nous arrivons à Arzua vers 15 /16h de l'après-midi puis nous prenons un café. Puis Sandrine, notre amie belge, nous rejoint ! J'étais super contente de la voir ! Nous allons marcher ensemble demain, puis elle tracera pour revoir un ami une dernière fois avant qu'il s'en aille.
C'est dingue de dire que demain on marche et que le lendemain on arrive à Santiago !!!!!!
JE L'AI FAIT!!!!!!! J'AI REUSSI BORDEL!!!! Trop hâte d'arriver !!
Manon : Départ tardif pour une petite étape encore aujourd’hui. La longue nuit dans notre chambre à deux nous fait du bien. Ce midi, on s’arrête pour profiter du soleil pendant une heure. Même L apprécie le moment. On recroise les autres copains pèlerins, on les dépasse, ils nous re-dépassent.
Jolente nous envoie un message cet après-midi : elle est arrivée à Santiago, après une journée de 38 km de marche. On est si proche…
Ce soir, on retrouve Sandrine qu’on avait laissée à Burgos et qui nous a rattrapées depuis. On passe la soirée ensemble et on mange du poulpe, typique de la région. Franchement, c’est très bon !
Demain, on marchera ensemble pour notre AVANT DERNIÈRE journée ! Je ne sais pas si on réalise vraiment, même si, on en parle tout le temps.
Allez demain 19 km ! Ça va le faire !!
Résumé du vendredi 13 au dimanche 15 décembre 2024
L : JE SUIS A SANTIAAAAAGOOO!!!!!!
Je l’ai fait !!! Je suis très fière de moi !
Pour le dernier jour j'ai marché 40 km avec notre amie Sandrine pour finir en beauté 🤩
Merci à tous de m'avoir soutenue. Merci à Seuil; Merci à mon éducatrice !!!
Manon : La journée de ce fameux vendredi 13 commence par un petit dej où on retrouve notre amie Sandrine avec qui on devait marcher nos 19km du jour. Elle avait quant à elle prévu de poursuivre son étape avec 20km de plus pour arriver à Santiago ce soir-là. Mais en quelques mots, entre le café con leche et la napolitana (couque au chocolat, pain au chocolat, chocolatine, … je vous laisse choisir 😉), elle souffle l’idée à L de tenter l’étape de 39km aussi, pour arriver ensemble le soir même.
Et là. Incroyable surprise : L accepte ce défi immense. On commence à marcher à 9h. J’avoue avoir des doutes sur le fait qu’on y arrive, on n’a quand même jamais marché plus de 27km et L en garde un très très mauvais souvenir. Et puis, ses douleurs persistent toujours. Et pourtant aujourd’hui, plein d’éléments semblent rassemblés pour que, cette fois, ça fonctionne : on marche avec notre copine Sandrine, il fait beau, le chemin n’est pas trop compliqué. Et surtout, l’excitation est immense : cette journée pourrait être LE fameux jour dont on nous parle et dont on rêve depuis longtemps, cette fameuse arrivée, le passage de la ligne finale sur la place de la cathédrale de Santiago.
Alors on avance d’un pas incroyable, on ne s’arrête que pour manger le midi et pour boire parfois, pour enlever ou remettre un pull. Les kilomètres défilent et les bornes qu’on dépasse nous montrent à quel point on est de plus en plus proche.
Il est 19h quand on atteint la cathédrale. On se sert dans les bras, on pleure, on rit. C’est tellement fou, un accomplissement dingue pour cette L qui découvre que quand elle le veut, elle en est capable. Le soir on mange avec d’autres copains pèlerins arrivés la veille ou le jour même comme nous.
C’était il y a deux jours.
Le temps, depuis notre arrivée, me semble comme suspendu. On se balade dans la ville, on va boire des cafés, on cherche le marché de Noël (spoiler : il y en a un mais, vraiment vraiment, jamais plus je ne critiquerai celui de chez moi), on entre et on sort dans plein de petites échoppes pour touristes (= nous désormais), on va accueillir sur la place les prochains copains qui arrivent, on dit au revoir à celles, ceux qui s’en vont. Je me sens un peu en errance, simplement dans l’attente de la suite. Qui arrive demain.
Demain ce sera une autre aventure pour L qui prend l’avion pour la première fois !
Le lendemain, mardi, sera encore une autre aventure car j’accompagnerai L dans sa famille d’accueil, qu’elle rencontrera pour la première fois !
Et le surlendemain, mercredi, ce sera un autre grand moment. Nos au revoir à L et moi, chacune prête à se lancer dans ses nouveaux projets, fatiguées mais plus fortes. Un peu plus abouties personnellement, un peu plus loin qu’au moment de notre départ, grandies.
Merci ma biche pour tout ce que j’aurais appris à tes côtés. Tu es forte et je suis si fière que tu sois arrivée jusqu’au bout, en t’accrochant toujours, malgré tout ce que tu as traversé et ce qu’on a traversé ensemble pendant ce Chemin. Tu te souviendras toute ta vie de cette aventure qui aura semé plein de petites graines en toi, qui grandiront encore longtemps, j’en suis certaine 🧡
Merci immensément à tous les pèlerins et pèlerines rencontrés en route, nos copains du Chemin, compagnons de marche ou de repas partagés, merci à tous nos hébergeurs et hébergeuses en France, ces petits foyers tout doux qui nous accueillaient tendrement et avec chaleur, merci à vous tous/tes pour votre soutien de tous les jours. C’était précieux de vous avoir à nos côtés 🧡
Et merci mille fois à vous tous/tes pour tous vos commentaires ici, vos petits cœurs, vos petits messages, vos pensées. Ils nous ont toujours accompagnés en ajoutant des petits rayons de soleil à nos journées ☀️
Et voilà ! Clap de fin !
Et le début de belles nouvelles aventures !
L et Manon : Demain nous prenons l'avion pour rentrer 😄
BISOUS A TOUS ET MERCI MILLE FOIS DE NOUS AVOIR LUES !!!💙💙💙
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Oh lala bravo les filles et bravo. L. Tu peux être fière de toi. Tu vas avoir une grande confiance en toi et tu ne douteras plus jamais de toi OK 👌. Tu as réussi un gros challenge alors maintenant tu réussiras tous les challenges de ta vie future. Bravo également à toi Manon d'avoir accompagné cette jeune fille car pour toi aussi quelle magnifique aventure. Milles bravos !!!! Je.vous embrasse. La petite Marie d'Auvergne.
Courage les filles ! Plus qu'une dizaine de jours à ce que je lis pour accrocher un bout de chaussette à St Jacques !!! et si perdu en chemin, ou trop nauséabond, pas bien grave !!! le principal est l'avancement !!! BRAVO A TOUTES LES 2, VOUS ALLEZ LE FAIRE !!!
suffisamment d'indice ici pour savoir qui vous écrit :)
Prévoir de remettre une petite bougie à l'arrivée devant la statue de St Jacques ;)
Prenez soin de vous 2 et encore BRAVO pour le chemin parcouru jusqu'ici !
Good luck pour la suite du chemin !!!!
Avec l'Esprit du Chemin que vous emmenerez avec vous au retour pour le poursuivre dans vos vies respectives !!!
Le meilleur est à…
Hello.
Aller les filles ont quitte pas l'objectif de vu.
On prend soins de ces petits pieds le soir on se préserve..
Comme on dit au crossfit tout et dans la tête.
Conseil d'un gars dans sont canapé devant un dessin animé avec sont fils 🤣.
Courage à vous deux .
Bonne soirée.
PS: moi aussi j'ai étais heureux de parler avec ma fille gros bisous je t'aime.
Bonjour à vous deux.
Je suis heureux de te voir t'ouvrir au monde voir tous ces beaux paysages rencontré toutes ces belles personnes.
Nourri toi de tous ça et tu découvriras la belle personne que tu es❤️ .
C'est un très belle expérience.
Merci Manon pour ton accompagnement je m'aperçois en te lisant que tu commence à voir L . J'espère qu'elle ne ralle pas de trop il ne faut lui en vouloir elle tient ça de moi 😁.
Je vous plein de belles rendo de beaux paysages et de belles rencontres.
L voilà mon tel 0667254864