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Marche de Maxxxx

  • pierresauge
  • 17 déc. 2024
  • 34 min de lecture

Dernière mise à jour : 13 févr.

Marche de Maxxxx accompagné par Mathieu

 

Présentation et stage de marche :

 

M : Je m’appelle M. J’ai 14 ans. J’adore le fait que je vais marcher car la Juge m’a demandé ce que je préfère : marcher ou aller en prison. Après voilà, sans téléphone, c’est dur, mais faut prendre sur soi-même.

 

Mathieu : Bonjour, je m’appelle Mathieu. J’ai 41 ans. Cela fait deux ans que Seuil me rappelle intérieurement. J’ai déjà fait il y a une dizaine d’années une marche complète. Que de souvenirs. Il y a sept ans, j’ai fait 25 jours de prise en charge d’un autre jeune qui n’a que peu marché suite à un problème du genou non soignable. Je suis enchanté de recommencer cette puissante aventure avec M arrivé avec un trou dans le genou. Il semble sportif et motivé. Très motivé.

 

Lundi 9 décembre  :

 

M : Je vais vous raconter ma journée. J’ai pris le train avec ma référente. On est arrivés à 11h30 à Rennes, puis après on a été manger un bout avec les moniteurs et après on a pris le métro pour sortir de Rennes, puis on a pris la voiture pour aller faire des courses et chez le médecin. Après cela, nous avons été au gîte. Et mes émotions : triste, content, courageux.

 

Mathieu : M est arrivé seul avec Anthony. Sa référente l’a posé et est partie de suite. Quelle violence ! Nous découvrons qu’il ne peut pas marcher …. Il a un trou dans le genou. Point de suture. Direction le resto, le médecin… les courses pour le gîte, la pharmacie.

Un début de projet Seuil atypique. 10 à 15 jours sans marcher… contrôle des points de suture et on verra. Anthony a peut-être un plan, un lieu vers Toulouse qui pourrait nous accueillir et où l’on se sentirait moins seuls. Arrivée au gîte. Super ! lieu très sympa. On prend le temps de se poser, cuisiner, s’installer, échanger.

 

Mardi 10 décembre :

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : M est plus en forme. Anthony est venu vers 11h. Explications : budget (argent de poche, matos, téléphone, appareil photo). M est plus sur son téléphone (plus ou moins 1h et 30 mn), communication avec Nounou, ami (18 ans) Foyer Belgique et éducateur-référent qui était à côté. M raconte avec enthousiasme notre marche à venir. M  fait à manger seul ce soir (pâtes carbo). Présentation de son album souvenirs photos, puis moitié du film Traffic (vieux film complexe qu’il comprend). Coucher à 22H15

 

Mercredi 11 décembre

 

M :  Aujourd’hui, nous avons été chercher le reste de mon équipement, puis mes éducateurs sont partis se baigner dans la rivière et moi j’étais en train de “cailler” pour eux, puis nous sommes rentrés au gîte. Nous avons fait les comptes et après j’ai fait à manger. Après, je suis sorti me laver et après j’ai pris un temps avec l’éducateur. On a lu un livre.

 

Mathieu : Lever avec réveil pour 9h. Douches matinales, soin du genou, petit déjeuner. Ce matin, j’ai envie de cuisiner. Et voilà, une soupe de carottes, poireaux, patates, bien relevée, un écrasé de pommes de terre. Et maintenant l’heure du repas. M va m’apprendre à mieux manger. Il sait prendre son temps. Cet après-midi, Anthony nous a amené à la rivière.  Aujourd’hui, bain d’eau froide, M avec sa blessure au genou.ne peut que nous regarder, nous “rafraîchit”. 5 mn chrono dans une eau à 5-6°c. Saisissant. Ce soir, nous lisons la BD de Seuil et allons lire quelques lignes des carnets de route des jeunes de Seuil qui marchent actuellement.

Fin de soirée sur le reste du film commencé hier.

 

Jeudi 12 décembre

 

M :  On s’est réveillés. Puis je suis parti me laver, après on a déjeuné. Puis on a fait des jeux. Après c’était l’heure de manger. Après on est partis marcher pendant 2h.

 

Mathieu : Réveil à 8h30 ce matin. On a joué à la pelote à 2 joueurs et à un autre jeu “the game”. J’ai cuisiné un gratin de riz à la tomate et au curry. Bon, j’ai un peu raté la cuisson. Aujourd’hui, grâce à la cicatrisation incroyablement rapide de sa blessure au genou, nous allons faire quelques courses au village. Une balade test de 6 km environ. Et sans surprise, il MARCHE ! Quel courage ! Ce soir, nous apprenons que nous partons demain pour le village de François près de Toulouse. On y rencontrera d’autres personnes dont une jeune adulte de Seuil qui a marché six mois. Ca va faire du bien. L’aventure continue.

 

Vendredi 13 décembre

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Nous nous sommes levés tôt ce matin. Je suis rincé. J’ai fini tard le ménage du gîte. Heureusement, M m’a beaucoup aidé. J’ai préparé notre transport.  Dur de trouver un taxi dispo à l’Isle-Jourdain. M a passé admirablement cette épreuve : départ 7h10 du gîte. Arrivée à l’Abbaye pour dormir à 18h10. Je vous laisse faire le calcul. En plus, il était épuisé. Ici, au village de François, Abbaye Sainte Marie du Désert, le vendredi, il y a un repas partagé. Nous sommes arrivés à point.

 

Samedi 14 décembre

 

M : Je vous raconte ma journée. On s’est levés à 8h30. Je suis parti me laver, puis on a déjeuné. Après on s’est préparés pour la marche. Puis on s'est mis en route. On a marché pendant 9h. C’était vraiment agréable. On a vu un super paysage, puis nous sommes rentrés manger. Cela m’a fait du bien de manger, après on a été faire des courses, puis on est rentrés. J’ai fait à manger. Voilà, super belle journée.

 

Mathieu : On se lève motivés. Au réveil, nous avons le plaisir de découvrir un nouveau lieu, un nouveau paysage. Décollage vers 10 h pour une marche tranquille. La blessure de M va mieux mais il faut être attentif. Nous devions prendre un chemin de terre qui traverse la forêt. Impossible, il est privé et en plus, il y a une battue aux sangliers. Chic ! Une petite pluie vient à notre rencontre, allez on essaie nos capes de pluie ! Nous allons en courses l’après-midi. M est mal à l’aise en arrivant, puis rapidement prend du plaisir. Au retour, il prépare des wraps au nuggets. Il est fatigué et une très légère douleur autour de sa blessure est apparue. Cela ne l’empêche pas de faire quelques jongles avec son nouveau ballon de foot. Il part se coucher vers 20h45. Dur de s’endormir ce soir. Nous avons partagé nos ressentis du moment et après une lecture de la BD de Seuil où l’on suit les péripéties de Samia et Kévin, des anciens jeunes marcheurs. Bonne nuit.


Dimanche 15 décembre

 

M : Au lac, j’ai aimé jeter des cailloux, puis on a pique-niqué. Les sandwichs que j’avais faits, Mathieu les a dévorés. En courant chercher des cailloux, je me suis pris une butte d’herbe. J’ai joué au ping pong avec un habitant du lieu. Le soir, c’était super. J’ai rencontré une ancienne jeune de Seuil.

 

Mathieu : Malgré sa blessure, M qui, habituellement a besoin de bouger beaucoup, arrive à s’occuper et à prendre le temps de manger, de prendre soin de son hygiène. Lors de notre petite randonnée du jour, j’ai découvert l’incroyable habileté de M pour jeter des cailloux vraiment loin dans le lac. Nous avons mangé un sandwich sous le chaud soleil. Maladroitement, M s’est pris le pied dans une butte d’herbe, ce qui a réveillé sa douleur au genou. Nous avons visité notre lieu d’accueil à la recherche d’un espace pour faire quelques tirs au but. Il y avait des habitants dans une salle et il a pu faire un ping pong avec l’un d’entre eux. Et ce soir, il a rencontré une ancienne jeune de Seuil qui a marché six mois et qui réside ici. Un moment très agréable fait de récits de marche, de sa vie à l’abbaye.  Chacun/ne a pu partager un bout de son histoire. Autour d’une infusion aux fruits rouges, nous avons joué à “The Game”. Il est tard et le lit nous appelle, sans oublier le moment de lecture de la BD Seuil où nos jeunes marcheurs, Kévin et Samia, sont arrivés au bout de leur projet de marche : trois mois pour se connaître autrement.

 

Lundi 16 décembre

 

M : J'ai fait ma première lessive à la main. Après on a été au lac, on a pique-niqué au bord de l’eau. C’était agréable. Ce que j'ai super adoré, c’est digérer en fumant une cigarette au bord de l'eau avec les rayons de soleil.

 

Mathieu : Ce matin, j’ai montré comment faire la lessive à la main à M. Il était attentif et doué. J’ai passé un moment agréable. Le lac nous appelait encore. Je prends goût aux bains d’eau glacée, en plus, cette nuit, il a gelé, 7 mn. C’était intense. Il s’en est suivi un moment difficile à décrire d’euphorie ; l’impression d’être là, ancré dans le présent. Je n’avais jamais vécu ça aussi intensément. Je revois M qui me regardait avec un air intrigué. Je crois qu'il m’a pris un peu pour un fou. J'avais mal pour lui, sa douleur au genou s’est intensifiée. En même temps, il a du mal à rester en place : le voilà à peine rentré qu’il fait une partie de ping-pong. On aurait dit un match de professionnels.      

 

Mardi 17 décembre

 

M : Ce matin, je me suis réveillé avec une douleur intense. Mon humeur a vite changé. J'étais vraiment énervé. Je ne pouvais rien faire. J’ai vraiment pris sur moi malgré l'énervement.

 

Mathieu : Le match de ping pong était de trop. En même temps, c’est comme ça qu’on apprend. Ce matin, M après 12h de sommeil s’est réveillé avec une intense douleur au genou. Je lui ai lu le début de “L’homme qui voulait être heureux” de Laurent Gounelle pendant qu’il appliquait de la glace ;;;; au genou. Le soleil chaud traversait les fenêtres de notre appartement nous appelant dehors. Après avoir salué les chèvres et moutons, repéré notre lieu de “travail” de demain matin 8h au maraîchage, nous rencontrons des habitants de ce lieu si atypique. Pour rappel, nous sommes dans une abbaye en rénovation où vivent 64 personnes d’horizons bien inhabituels pour moi. A la recherche de l’animation “dessin/peinture”, nous finissons devant un conteur et ”La petite fille aux allumettes”. Et comme M a besoin de bouger, nous testons la salle de musculation et faisons une partie de ping-pong, à mon rythme cette fois et en conscience de la blessure.

Pâtes carbonara !

Ce soir, après une incompréhension, M explose, il claque deux portes, renverse deux chaises et m’annonce que demain, il quitte le projet… 1 mn, 2 mn, 5 mn plus tard, je le vois couché. Il a l’air tellement mal. Mais à peine 5 minutes plus tard, le voilà réapparaître plus calme. Finalement, la brève et petite tempête est passée. Au fil de nos mots échangés, nous nous comprenons, un apprentissage de plus à la construction de notre relation. Et oui, c’est du boulot de vivre 24h/24 et 7/7j avec une autre personne.  Qui d’autre fait ça ?  

 

Mercredi 18 décembre

 

M : Avec Mathieu, on a fait une belote au soleil et on a filé un coup de main à des personnes et j’ai rencontré Claude, un sourd et muet.  Je me suis vraiment attaché à lui, c'est une incroyable personne et j’ai fini par une super partie de ping-pong avec Jean-Marie. C’était vraiment une belle partie. Il a du talent. L’infirmière vient aujourd’hui pour enlever mes points de suture.

 

Mathieu : Encore une journée de convalescence. La douleur est moindre aujourd’hui pour M. Le soleil fait tellement de bien, on se croirait en été. C’est fou ! Il a eu l’idée de faire des sandwichs pain-grillé-nuggets bien gras. Il s’est goinfré. Thibault, un habitant, nous a demandé de l’aider pour débarrasser une espèce de cave. On a trié les anciennes affaires de travail des moines qui ont quitté le lieu il y a quatre ans. C’était très agréable. M m’a raconté qu’il adore la présence des personnes handicapées et ça s’est vu cet après-midi. Nous nous dirigeons au lac voisin. M a mal dans la descente. Nous faisons demi-tour en haut de la montée suivante. Nous avons parcouru 300 m, et pourtant il a fait attention à son genou aujourd’hui. Frustration. Au retour, il se sent mal. Mais après une quinzaine de minutes, l’orage est passé. Le voilà qu’il chante sous la douche, un rap improvisé sur son histoire m’a-t-il dit. J’espère qu’il nous partagera les paroles dans son blog. 20h, l'infirmière est passée ; les points de suture font partis du passé.


Jeudi 19 décembre

 

M : J’ai joué au ping-pong avec un des plus forts du village, c’était vraiment agréable. Après nous sommes partis manger chez une ancienne jeune de Seuil. C’était un chouette repas partagé et il y a eu une soirée de Noël au village. J’ai parlé avec un des meilleurs bouchers de Belgique et il m’a motivé en disant “tu peux réussir dans la vie”.

 

Mathieu : Matinée tranquille. M avait besoin de repos, il a dormi jusqu’à 10h. Nous faisons une visio avec un médecin pour renouveler l’ordonnance pour des pansements : 3 min. Qu’est-ce que je vous sers ? On se dépêche, j’ai d’autres clients. Emballé, c’est pesé. Une première pour moi. Un sketch.

Nous sommes invités à la colocation de femmes où vit M, la jeune majeure suivie par Seuil en distanciel depuis la fin de ses six mois de marche. Le dilemme, c’est que ce soir se joue en même temps la finale trimestrielle de ping-pong du village. M ne voit pas comment gérer cette situation. Je le vois être mal à l’aise. Il craque et fume une cigarette à la fenêtre de l’appartement, ce qui est interdit. Il part une dizaine de minutes sans dire où il va et revient en silence. Nous allons faire un ping-pong, modéré, et un des finalistes arrive et fait une superbe partie avec lui. Il s'ensuit, le repas à la colocation, puis la soirée de Noël avec des desserts partagés. Super ambiance !

Vers 22h45, nous rentrons à l’appartement et quelle ne fut pas notre surprise, toutes les lumières sont allumées. J’ai d’abord pensé à une blague de M et M lorsqu’ils sont partis fumer. Il me dit que non. Nous visitons le lieu, rien n’a l’air de manquer. Seulement un tas de couvertures et de draps retournés et froissés et mon couteau opinel qui était caché juste à côté de son emplacement dans une boîte en carton. Heureusement, M l’a vite vu. Je l’aurais cherché longtemps moi qui ne trouve jamais rien. Beaucoup d'événements. Bref, une journée où il a grêlé.


Vendredi 20 décembre

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Nous ne ferons finalement pas de maraîchage. Nous avons appris l’existence d’une recyclerie de jouets au village. Nous irons probablement y faire un tour. Bénédicte, hier soir, nous a proposé de les aider à la répartition de la banque alimentaire. 1h30 de travail, à 6-7 personnes. Un moment très sympa. Et comme il y avait beaucoup de surplus (“t’en veux des bananes ? t’en as !) nous sommes repartis les bras très chargés de vivres diverss. Alors que nous avons l’impression d’être sous un soleil de printemps. Ensuite on nous a emmené en courses, à la pharmacie. Et grâce à la magie de la SNCF et de ses retards, nous avons pu bénéficier d’une heure bonus où M a pu aller chez le coiffeur. Le voilà ravi par sa nouvelle coupe. Ce soir, nous avons rendez-vous pour l’organisation de Noël avec quelques habitants dans une bibliothèque digne d’Harry Potter. Et oui, afin d’assurer le rétablissement de son genou, nous serons encore au village pour Noël. Et voilà un M ravi. Marchera bien qui marchera guéri. Et bien le bonjour, bonsoir à vous lecteurs et lectrices.

 

Samedi 21 décembre

 

M : Je me suis réveillé avec un mal de tête. J’ai dormi presque toute la journée. On a invité des gens le soir

 

Mathieu : La chaudière est tombée en panne. On peut dire qu’on a eu la chance d’observer le réparateur en action et d’apprendre le fonctionnement d’une chaudière à fioul. M, malgré un mal de tête et un manque d’appétit, a réussi à cuisiner. Et finalement, il s’est régalé et surtout moi aussi : une des spécialités : les pâtes “scampies” (pâtes aux crevettes et à la crème). Après-midi ménage du gîte aujourd’hui. M a tellement mal à la tête et se sent fatigué ; heureusement, juste à la fin du ménage, il s’est réveillé. Nous recevons la colocation des femmes ce soir à dîner. M (jeune de Seuil) et Myriam qui est ici depuis plus d’un an. Les “pétotes au four” un plat du ch’nord : des patates au fromage, à l’ail, au lard. La diététique…. Notre spécialité ! Nous avons joué à Time's Up. C’était vraiment un moment drôle et agréable. On a eu le plaisir de suivre le récit de ses six mois de marche avec l’association en regardant ses deux albums photos qu’elle nous a commentés.


Lundi 23 décembre

 

M : Nous sommes partis marcher ce matin. On a fait 5 km, ça fait du bien au genou et au mental. L’après-midi, on a chargé nos sacs avec 20 briques. C’était lourd. Non, je rigole. On a chargé nos sacs avec des pâtes pour m’adapter à la marche.

En rentrant, on a fait 4 parties de ping-pong où j’ai tout défoncé. Bonne soirée mes lecteurs.

 

Mathieu : Aujourd’hui tartiflette et pizza. Le gras, c’est la vie ! Test de marche aujourd’hui. M, malgré l'envie de bouger beaucoup, a réussi à prendre soin de lui. Il n’a plus de douleur et les 15 jours d’arrêt de marche sont terminés. La cicatrisation avance toujours bien ; 2 - 5 km de marche aujourd’hui, dont 5 avec sac à dos chargé. Bravo M, tu peux être fier. On a même fait des parties de ping-pong en rentrant et j’ai même gagné mon premier match contre lui. Je suis fier de moi. Je m’améliore. Ce soir, nous sommes fatigués.


Mardi 24 décembre :

 

M : On est partis à 9h marcher. On a fait 10 km. C’était vraiment pénible. On est rentrés. Je me suis endormi à 15 h et me suis réveillé à 18h. Ça m’a fait du bien. Ensuite on a fêté Noël au village. C’était bien.

 

Mathieu : Deuxième test de marche aujourd’hui, nous partons avec les sacs à dos chargés. 9h - 9 km comme ça sonne bien. La fine pluie nous accompagne, une de celles qui ne mouille pas à vue de nez mais vous trempe. Heureusement, nous ne craignons pas les éléments, nous avons la chance de nous réchauffer autour d’un feu, chaleureux forcément. Nous retrouvons le lac. Pas de bain d'eau froide ce jour, je n’ai pas le goût. Nous partons à la découverte d’une nouvelle vue à l’assaut de la colline. Je crois avoir encore grossi, à force de manger comme un ado sans marcher.


Mercredi 25 décembre

M

 

Mathieu : Noël, Joyeux Noël ! Petite balade matinale de 3 km ce matin. Nous sommes montés au calvaire. J’ai vécu une expérience incroyable : le plus long écho de ma vie. 7 répétitions : écho - écho - écho - écho etc…On pouvait presque voir le son s’amplifier dans la vallée, passer derrière le vallon, en revenir tel un boomerang qui rapetissait jusqu’à disparaître. S’en est suivi un autre repas de Noël accompagné de 20 personnes. Cette fois, M a mangé à une table et moi à une autre. J’ai l’impression qu’il se sent plus à l’aise avec ces nouvelles rencontres qu’il commence à mieux connaître. Sans surprise après-midi ping-pong avec quand même un peu de logistique car nous partons dans deux jours. Puy en Velay nous voilà. Achat des billets de train, début de recherches d'hébergement. Ce soir, c’est la distribution des cadeaux sous le sapin. Nous avons été gâtés par de jolis mots et chocolats (aïe aïe aïe mon gras !) J’ai reçu un chapelet (merci Christine) et un joli mot. M a reçu aussi un joli mot et un livre avec son ancienne religion, l’Islam. Ça l’a beaucoup touché, il me semble. Pour finir, la soirée a commencé avec un moment tendu entre nous. Je suis parti voir le film de Noël pendant qu’il passait un temps agréable avec des habitants, puis ils nous ont rejoints au film, que je conseille Santa et Cie d’Alain Chabat. Ce soir, c’est M qui me fait la lecture et demain première grande marche chargés de nos sacs à dos. 15 km pour une victoire !

 

Jeudi 26 décembre

 

M : Je suis fier car j’ai réussi à faire 15 km avec le sac chargé.

 

Mathieu : Incompréhension au réveil avec M. Il est difficile à lever ce matin. Il vrille. Silence entre nous pendant au moins 2h. Aujourd’hui, 15 km à faire avec sac à dos chargé. Je trouve le temps long, M est très vite distrait par beaucoup de choses. Aujourd’hui, c’est son record de blagues : une toutes les 7 mn maximum. Ma difficulté étant de faire la différence entre la blague et la réalité : “attention un sanglier !”, “attention un chien”, “aïe je me suis tordu la cheville", “arrête ou je vais câbler”... A crier au loup…. Cela dit, il fait soleil et le paysage est à tomber. J’ai de la chance d’être ici avec cet asticot. La nuit tombe et les derniers kilomètres ne nous mettent même pas en difficulté. Cette montée à l’arrivée à l’abbaye qui, il y a quelques jours, était insurmontable, n’a même pas existé tellement nous étions pris dans notre discussion. Ce soir, nous sommes invités à partager une raclette avec les habitants du village. Merci à Hermine et Mayeul qui nous ont reçu chez eux. Encore une belle tablée remplie de bienveillance. Merci pour tout ! Et MIAM !

 

Vendredi 27 décembre

 

M : Ce matin, on a lavé le gîte puis on est allé à Toulouse. On a pris le train et à 20h30 on est partis au tacos

 

Mathieu : Bip, bip, bip bip… 7h30 Ça pique ; On a négocié. 9h30 pour M car nous nous sommes couchés tard. Je range et nettoie la colocation. M galère à se lever…. 9h et à la cool. Je sens que le ménage ne sera pas sa passion cette fois. Sans surprise, nous avions trop de réserves de nourriture. On en laisse sur la table des dons du village ; ça fera d’autres heureux. 11h Au revoir l’abbaye. J’avoue que ça m’a touché. Je me suis vite habitué aux bonnes choses de la vie, de recevoir autant. Ça donne envie d'en donner plus. Enfin… je crois… peut-être… Je sais pas… Toulouse Matabiau - Arvant - Le  Puy en Velay. 7h de trajet, d’organisation (logements, courses) de jeux, de paysages, d’échanges avec nos voisins, nos proches voisins (seulement deux wagons : pas assez de places pour tout le monde). Avantage - inconvénient / inconvénient - avantage. Spéciale dédicace à notre jeune camarade de rail qui a vomi ses tripes. Ce soir, grand luxe = hôtel et tacos : bonne nuit.

 

Samedi 28 décembre : notre nouveau monde

 

M : Nous sommes partis du Puy en Velay jusqu’à Montbonnet. On a marché 17 km. C’était vraiment dur vers la fin. Mathieu m’a poussé par derrière vers la fin, puis nous sommes arrivés au gîte. Ils nous ont super bien accueillis avec une tisane et nous avons mangé une choucroute de la mer et comme dessert une tarte, flan ou framboisier super bon. C’était une journée bien remplie

 

Mathieu : Départ ce matin du Puy en Velay ; lever 8h30. Il fallait acheter notre “passeport” le crédencial qui sera tamponné à chaque auberge. Quelques achats, cartes postales, un reste d’équipement, une gourde. Nous sommes prêts. Maintenant, ce sera dans une seule direction : Saint Jacques de Compostelle. Je trouvais mon sac lourd (et pas que le sac en vérité…). Je me suis senti fier quand j’ai passé avec peu d’efforts la première montée. Le soleil nous a gâtés toute la journée. M, on peut le dire en a ch… et a réussi. Seulement les deux derniers kilomètres ont été intenses. Il ne voulait plus avancer. On a chanté très fort et malgré le mal aux épaules, au dos, aux jambes, il a vaincu. Il m’a dit être fier. Au “gîte de la première étape” à Montbonnet (après 17 km), nous avons été reçus comme des rois par Didier et Anne. En hiver, ici, c’est “donativo” : on donne la somme d’argent que l’on trouve juste à donner et pour une choucroute de la mer, une douche, un lit et surtout je dirais de l’amour. On a décidé de donner 70 €.

 

Dimanche 29 décembre

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Ce matin, réveil pèlerins à 7h pour un petit déjeuner à 7h30. Nous avons tellement discuté que nous sommes partis à 10h. Nos hôtes Anne et Didier nous ont accompagnés jusqu’au lac de l’Oeuf où il n’y a ni lac ni œuf. Trop sympa ! On n’a même pas senti la montée. Vite, il est dimanche, la boulangerie ferme à midi. Nous marchons d’un bon pas. Cette descente nous casse les pattes. Ce matin, le village pointe vite le bout de son nez. Soleil soleil soleil. Quel plaisir. Nous avons vraiment de la chance. Bon, comme d’habitude, nous faisons un pique-nique de rois. Je cherche à organiser nos hébergements pour la suite. M m’aide un peu malgré sa fatigue. Une longue pause sur une petite rando : 13 km de mémoire. Nos hôtes, ce soir à Rochegude, sont vraiment supers. Ils font tout eux-mêmes. Une belle soirée. Ce soir chacun dans sa chambre. Je suis épuisé. Bonne nuit.

 

Lundi 30 décembre : changement de programme

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Réveil de pèlerins à 7h. On commence à s’habituer. C’est agréable de voir le soleil se lever. Notre hôte, Franck, est éleveur de brebis. Nous le suivons (sans sac) voir si les agneaux derniers nés vont bien. Le troupeau est magnifique et est monté prendre les premiers rayons de soleil. Un moment inoubliable : Départ pour 17 km, petit échauffement, on est super motivés. Après une descente abrupte sur Monistrol, voilà la montée. Une montée longue qui te secoue le mental. Aujourd’hui, quatre pèlerins nous rattrapent M prend un coup de speed. Et sans prévenir, il prend confiance et part devant telle une fusée. Je n’avais jamais vu ça auparavant en lui. Je le cherche dans le village. Pas de M. J’imagine qu’il a continué. Je demande à des scouts qui bivouaquent sur le chemin quelques jours (shorts et jupes …) ils et elles ne l’ont pas vu. Cette fois, c’est sûr, il s’est trompé de chemin. Je fais demi-tour et le retrouve assez vite à grands coups de sifflet d’alarme. Après le pique-nique, presque au bout de cette montée à 10 km de l’arrivée, 13h45, chute, genou, M, Samu , hôpital, entorse - 10h - pharmacie - hôtel - sandwich - pharmacie - 00h30 aïe aïe aïe

 

Mardi 31 décembre

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Grasse matinée. Le Puy en Velay nous accueille de nouveau. Après 2 jours et demi de marche, retour à l’arrêt de nouveau.  15 jours. M a mal. Nous prenons un taxi pour rejoindre notre première auberge : le gîte de la première étape. Ils sont tellement gentils et bienveillants. M n’a le goût à rien. Il ne veut ni jouer, ni lire, encore moins écrire son blog ou faire les comptes, même pas son argent de poche. Coup dur ! Nous réfléchissons avec Seuil sur la manière de voir la suite, ce qui est sûr c’est que nous allons déguster une truffade à Saugues chez Maud au gîte du Lion d’Or. Ensuite… Demain est un autre jour. Ce soir, nous profitons. Nous sommes 7 à table pour partager une potée auvergnate alsacienne (si - si !) Nos hôtes, parents, une pèlerine et nous. Un moment vivant, drôle et plein de partage. Je fais la lecture de la BD de Seuil à M et aussi à Aurélie qui partage notre chambre. 23h la maison s’endort. 

 

Mercredi 1er janvier

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Réveil de randonneurs à 7h du matin. M a très mal ce matin. Il n’a plus goût à rien Il vient tout de même à table au petit déjeuner. Après un appel au 15 direction les Urgences. “Bonjour, on est de retour”. On retrouve la même médecin qu’il y a deux jours. M trouve le temps long et en même temps il refuse que je lui lise un livre, de jouer, de discuter. Tout son mental est, je dirais, comme projeté dans sa blessure, donc dans sa douleur.

Si cette énergie, si puissante qu’il possède en lui, pouvait le soigner. Comment faire ? Ce n’est pas facile. On prend les mêmes et on recommence. Hopital - hotel - pharmacie - infirmière - tacos  + film. Demain est un autre jour. Le Puy en Velay, pour sûr, je ne t’oublierai pas.

PS. M n’a plus le goût de faire les comptes communs, les comptes de son argent de poche et encore moins d’écrire son blog.

 

Jeudi 2 janvier

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Incertitudes. Après une longue nuit reposante, une journée inconnue commence. Nous ne savons pas ce que nous faisons aujourd’hui. M propose de stopper le projet, le temps de sa convalescence pour ensuite faire une marche Seuil de trois mois. Nous tentons de contacter sa référente en vain. Cette période de fêtes rend ce moment de latence plus long. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne sait pas. Nous commençons à en avoir marre. La journée s’est composée majoritairement de télévision TF1 - TF1, série, film. Heureusement, nous sommes sortis prendre l’air pour aller au cinéma voir “Sous écrou”. M avec ses béquilles avance en alternance, 10 m, puis une pause, 4m puis une pause et le voilà qui s’envole en traversant la route 20 m d’un coup. Je suis méchant. Je rigole. Il a très mal. Il n’arrive pas à poser sa jambe au sol. Le film était sympa. Nous achetons notre pique-nique. Il y a un match de foot ce soir. A demain.


Vendredi 3 janvier

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Longue grasse matinée. M se réveille vers 10h45. Nous ne savons pas encore si l’on reste ou si l’on part, ni où on va. Pas de nouvelles, nous gardons la chambre. Ce midi restaurant avec le budget spécial pour Noël et le Nouvel An (100 € pour les fêtes). La référente de M a été contactée ; nous en saurons plus lundi. En attendant, nous allons passer quelques jours au village de François. Demain 9h de train nous attendent. Ce soir, c’est la super Coupe d’Italie à la télévision.

 

Samedi 4 janvier

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, petites courses ce matin. Les sacs sont prêts. La journée a été très longue. M a émis l’idée de faire son blog… non pas cette fois. On a un peu joué aux cartes, discuté, rigolé. Il est 23h. Les lits de l’hôtel nous attendent. Un brossage de dents, un pansement, une attelle à la jambe gauche et au dodo.

PS. Bonne année à toutes et à tous ! Qu'elle soit profitable !

 

Dimanche 5 janvier

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Clémence, notre responsable de marche qui remplace Anthony est dans le coin et passe nous chercher à l’hôtel pour retourner à l’abbaye Sainte Marie du Désert. Un restaurant chinois à volonté et un trajet plus tard, nous faisons connaissance avec Clémence et sa chienne, trop chou, Gaïa. Voilà vite le moment de “au revoir”. Nous retrouvons les têtes connues du village et n’échappons pas à notre traditionnel ping-pong. M même avec une béquille est très bon et plus ou moins de douleurs à son entorse aujourd’hui. Il arrive à poser son pied au sol. L’évolution va dans le bon sens. C’est rassurant. Il accepte la glace sur le genou et comprend enfin que c’est pour son bien.

Ce soir, c’est chambre à part, cette proximité immobile à l’hôtel m’a donné envie de me retrouver un peu plus avec moi-même. Nous avons pu profiter du film du dimanche soir au village avec vidéo projecteur dans la bibliothèque : ”Le Seigneur des anneaux - Le Retour du Roi”, en version longue. 7h de bonheur


 

Lundi 6 janvier

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu :  Pas de nouvelles de l’assistance sociale ce jour. Peut-être demain ou après-demain. On attend. Ping-pong - salle de musculation ou plutôt cave de musculation - pâtes carbo - Uno - ping-pong - lecture - 21h30 dodo. Une journée éprouvante éprouvée

 

Mardi 7 janvier

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Encore une journée au village de François. M a dormi tout le matin. Cuisine - courses au village - infirmière à domicile - ping-pong. M arrive à jouer au ping-pong sans béquille, juste avec l’attelle. Quelle force de caractère dans la passion ! Il ne prend plus d’anti-douleurs et dort sans l’attelle une partie de la nuit. Impressionnant.


Mercredi 8 janvier : lassitude

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Soyons clairs. J’en ai marre. On attend des réponses qui ne viennent pas. Je n’arrive pas à avoir de rendez-vous chez le médecin pour faire le suivi des soins. M marche sans béquille, sans attelle, sans douleur.


Jeudi 9 janvier : Le froid c’est la vie

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Ce matin, pendant que M fait une grasse matinée, je pars faire le tour du lac voisin. Que ça fait du bien ! Mon cerveau, qui s’arrête rarement de penser, m’accorde une pause bien méritée lors de mon bain d’eau froide, que je qualifierai de méditatif. Fin de la dépression.

Malgré la douleur assez forte (trop de ping pong + pas d’attelle + trop.tôt = aie, aie, aie) M est plutôt de bonne humeur. On est lassés, c’est sûr, de ne pas savoir où nous serons le lendemain. Pour moi je sais où je vais, mais M ne sait pas où il va se retrouver. Je n’aimerais pas être à sa place.

Ce jour, petites parties de ping pong avec attelle, jeux de cartes et ce soir, nous avons reçu à dîner trois habitantes du village très sympas. Merci Bénédicte, Christine et Myriam pour votre présence. M, en ce moment, vous prépare un texte rappé sur son histoire. Il le publiera sur le carnet de voyage bientôt.

PS. Un mois vient de s’écouler depuis notre rencontre.


Vendredi 10 janvier : Le grand jour

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, nous tentons de voir un médecin. J’aimerais arrêter de lui faire ses injections d’anticoagulant et de faire faire des prises de sang. Après une heure d'attente, Bingo ! En trouvant la porte de sortie du cabinet du médecin derrière le bâtiment, je le saisis du regard, lui expliquant notre situation instable. Joie ! Il va nous recevoir. Comme M pose le pied et “marche”, il n’a, en effet, plus besoin de ces soins. Il reste une IRM (un jour peut-être), des séances de kiné et encore quelques pansements à sa plaie au genou qu’il a depuis plusieurs mois. Trois pharmacies plus tard, elles n’ont pas le pansement cicatrisant de notre nouvelle ordonnance.

Encore un tacos… C’est quasi sûr, j’ai pris au minimum 5 kg. Il faut avouer que c’est bon. Le téléphone sonne. Enfin ! Bonne nouvelle, M va rejoindre un Foyer pour faire 15 jours de convalescence avant de reprendre un nouveau projet de trois mois avec moi.  Douai nous voilà.  Nous rangeons nos affaires. Ménage de l’appartement. 20h15 taxi - 21h train.

 

Samedi 11 janvier : A bientôt

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Nous avons pris le train de nuit. M a bien dormi. C’est trop bien les couchettes. Bon, j’ai eu trop chaud et je crois que la séparation à venir me travaille. 10h, rendez-vous à la gare de Douai. Ce trajet est finalement passé vite. On rigole, on se chamaille. Nos regards sont remplis de tendresse et d’affection. Il va me manquer ce petit c... Il est dans le doute. Il me dit que la marche n’est pas faite pour lui. Il se projette dans son nouveau Foyer. Il espère qu’il n’est pas mixte, car je cite : “les filles en Foyer, elles font trop les bonhommes !”. Il pense à son téléphone qui arrivera par colis d’ici lundi. Il aimerait pouvoir visiter sa nounou (son ancienne famille d’accueil). Il se met déjà en colère contre ceux qui vont mal le regarder, ceux qui vont le chercher et le faire craquer. Et dire que ça fait un mois que, bien entouré, isolé de son monde malfaisant, il n’a pas craqué, aucune bêtise comme on dit. P…, je suis en colère, j’en pleure. Reviens dans 15 jours. Je suis sûr que le projet peut prendre, que tu vas être happé par la marche. Plus de carnet de voyage pendant 15 jours. Au plaisir de vous écrire.


Samedi 25 janvier : Les retrouvailles

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu: Je suis arrivé hier à Douai. Après 15 jours à retrouver mes proches après cet intense mois passé avec M, à couper mon bois de chauffage dans la forêt presque tous les jours (merci, la favorable météo, tu étais parfaite ! ), après avoir digéré tout ça, nous revoilà ! 10h30 gare de Douai “bonjour M, comment vas-tu depuis notre appel d’hier ?”. Il n’a pas chômé pendant ces 15 jours. De ce que je sais, il est allé 3 ou 4 fois à l’hôpital. “Encore quelques passages et ta carte de fidélité sera pleine. Que vas-tu gagner ? “ Il est régulièrement sorti… Normal, c’était interdit. 

Tout ça pour dire que je retrouve M tranquillement motivé avec un bon rhume en route, car il est sorti en tee-shirt sous la pluie hier soir. Le voyage en train s’est bien passé : 6h30 de récits de retrouvailles et une bonne sieste à l’arrivée. Ce soir, nous dormons dans une chambre pour deux personnes au Grand Séminaire du Puy en Velay. Un peu de ménage dans le sac à dos. Nous voilà fin prêts ! Deux mois de marche se profilent devant nous… Commençons par demain. Bonne nuit. 

 

Dimanche 26 janvier : la 1ère vraie journée de randonnée

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Sur demande de M, nous partons tôt. Réveil : 6h30. A 8h30, nous sommes en route. Quelle chance, le soleil est avec nous. Il fait froid et le vent nous fouette le visage par rafales. Je n’ai jamais vu M aussi motivé. Il s'intéresse au déroulement de la journée, fait des calculs. Il anticipe. Nous discutons beaucoup. Il s’en est passé des choses pendant nos 15 jours de pause. En plus, nous faisons le chemin que nous avons parcouru le 28 décembre dernier. Et oui, il y a presque un mois. Les souvenirs réapparaissent, c’est fou comme les détails restent. Ici, nous avons croisé un chien, après il y a un virage. Il y a même un monsieur un peu âgé qui nous a reconnus et qui a encore essayé de nous faire passer par un autre chemin. Bravo M ! 16 Km faits ! 


Lundi 27 janvier : encouragement

 

M : Bonjour les amies me revoilà. J’ai été en convalescence pendant 15 jours car j’ai eu une entorse au genou, du coup pendant deux semaines, j’ai été en Foyer et j’hésitais à arrêter la marche, mais je me suis dit que la marche va m’apporter beaucoup de choses et plein de bonheur.

Ça fait deux jours que j’ai repris la marche et je trouve que je m’améliore de plus en plus, ça fait vraiment plaisir et je prends goût à la marche et déjà ça, ça me remonte le moral. Et en plus, j’ai un animateur vraiment excellent. 

 

Mathieu : Hier soir, M après avoir dormi pendant 2 ou 3h l’après-midi partage le repas avec nos hôtes bien connus. C’est la 3ème fois que nous faisons halte chez eux. Anne et Didier merci pour votre, si pertinente, façon de voir la vie. On en part chargés d’énergie.

Ce matin, M se réveille facilement et arrive pour la première fois à boucler son sac à dos tout seul. Bravo à lui. Il peut être fier car avec tout ce qu'il transporte, j’avoue qu’il n’est pas facile à fermer.

Cette étape aujourd’hui, nous la connaissons. : 11 km. M passe la première montée comme une fusée. La première fois, il avait fait 3 ou 4 pauses. La route se passe plutôt bien malgré un temps froid avec des averses. Vive la cape magique !

Nous avons rencontré deux pèlerins : - un qui était sur le retour après 35 semaines de marche et qui parlait anglais, - un autre qui fait le chemin d’une manière atypique : il voyage en voiture, vélo et à pied. Le matin, il pose la voiture à l’arrivée, il rejoint le départ en vélo, fait l’étape à pied, reprend sa voiture pour aller chercher son vélo et dort dans sa voiture. On le reverra sûrement. 14h30 : arrivée au gîte


Mardi 28 janvier : Rebondissement

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : La soirée d’hier a été très agréable. Nous avons profité du temps l’après-midi. C’est vraiment plaisant d’avoir le temps. Nous avons préparé les étapes à venir, la distance, les auberges ouvertes, afin d’anticiper nos réservations. C’est agréable de partager l’organisation avec M. Il semble intéressé par le projet. Franck est un hôte très accueillant. Je passe un très bon moment. M fait sa lessive, se repose. La nuit nous fait du bien. Au matin, nous sommes frais. Après l’échauffement, nous partons d’un bon pas. M ouvre la marche. Nous avons la chance de voir un écureuil. Les souvenirs de cette étape nous sautent aux yeux à chaque instant. Aujourd’hui, c’est le grand jour ! Cette étape où M avait glissé sur une plaque de verglas et s’était fait une entorse au genou, sera terminée. De nouveaux paysages, nouveaux lieux, nouvelles rencontres. La grande montée se passe bien. Le mental de M commence à faiblir presque arrivé en haut. Soudain, une averse de neige accompagnée de vent nous fouette le visage. C’est trop pour M. Il peste et rapidement parle d’arrêter le projet de marche. Il jette son sac au sol et refuse de marcher plus. Il veut qu’on appelle un taxi. Stop à Seuil ! On appelle Anthony, le responsable de marche. M s’engage à finir l’étape. 30 mn s’écoulent, nous repartons. La météo venait de nous accorder sa dernière accalmie. Nous finissons l’étape, 8 km plutôt plat, sous une tempête de neige qui heureusement ne nous mouille pas. Malgré une arrivée de conquérants, M souhaite toujours arrêter le projet de marche. Arrivés à Saugues, nous retrouvons Patrice, un personnage que nous avions rencontré aux Urgences le 1er jour de l’an. Il est patron de bar et connaît bien notre hôte Maud du gîte Le Lion d’Or. Quel accueil ! Ce soir, c’est la fête, nous sommes 8 adultes et 5 enfants. On a beaucoup ri et la soirée s’est terminée tard. Tout le monde a essayé de le motiver à reprendre la marche. Sans succès.

 

Mercredi 29 janvier : stand by

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, nous ne marchons pas. Nous attendons des informations. Le projet est donc stoppé. Où va aller M maintenant ? Impossible pour Anthony de contacter la référente de l’ASE. Nous restons à Saugues et cette fois dans une ambiance familiale. Cet après-midi, nous sommes allés au citystade jouer au foot avec le plus grand des enfants de la famille. Il a 11 ans et s’entend bien avec M. Il joue aux jeux vidéo, regarde la télé. Il a cuisiné ce midi nos traditionnelles pâtes à la carbo. Quel régal ! M est toujours malade. Il a une toux grasse, il fait des efforts. Ce soir, nous mangeons avec la famille et une marcheuse qui arrive de Genève. Notre hôte accepte de nous garder demain si besoin. Merci à elle. Allez. A table !


Jeudi 30 janvier : début de la fin

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu :  Encore un jour sans marcher. Nous restons au gîte du Lion d’Or sous une neige à gros flocons. M est toujours malade. Sa référente, assistante sociale, l’a appelé. Nous sommes en attente de connaître son prochain lieu de prise en charge, son nouveau lieu de vie, temporaire… mais pour combien de temps. Suite à une crise due à une frustration, nous ne sommes plus les bienvenus demain. M a tenté de me jeter un briquet dessus, puis a jeté deux chaises contre le mur, ainsi qu’un livre. Notre hôte a été en colère quand il n’est pas venu de suite ramasser les chaises, s’excuser. Nous avons mangé seuls ce soir et comme il n’a pas voulu aller en courses, nous mangeons des pâtes à l’ail et à la mayonnaise. Il est très fatigué de toutes ces émotions. Il est 19h45. Il part se coucher. De mon côté, je fais les comptes et en profite pour téléphoner à mes proches. Demain matin, nous partons au Puy en Velay en taxi. Départ 10h. Nouvelle journée - nouvelle aventure


Vendredi 31 janvier : Encore le début…ou la fin

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, direction le Puy en Velay. J’ai l’impression de devenir un habitant de cette ville. L’accueil Saint Georges, Grand Séminaire, nous loge pour 3 nuits. Nous laissons passer le week-end. Lundi nous aurons peut-être des nouvelles.

Ce midi, avec une météo clémente, nous faisons un pique-nique au bord d’un petit canal. A 14h, après s’être réchauffés dans la cathédrale, nous rejoignons nos quartiers. Cette fois, nous sommes au 1er étage. Vers 18h30, nous allons au cinéma voir un film d’horreur “Wolf Man”. On a bien sursauté. M demande à revoir nos photos depuis le début, à relire notre carnet de route aussi. Les souvenirs fusent, ressurgissent et s’ancrent dans nos mémoires. Une journée pleine d’émotions. Entre colère, tristesse et joie. Je me demande à quelle sauce notre M international va être mangé. En même temps, pour l'instant, c’est lui qui, inconsciemment, choisit la température et les assaisonnements. Quand ce n’est pas le moment…. Il n’est pas prêt pour cette marche. Entre sabotage et auto-destruction, c’est dans ces navires qu’il a l’habitude de voguer. C’est probablement le chaos qui le sécurise. Comme je lui dis : “quand tu auras touché le fond, que tu n’auras plus d’air, à la limite de te noyer, pense à nous, à celles et ceux qui ont vu en toi ce M, LE M. Toi qui au fond de toi est gentil, attentionné, intelligent, patient avec les enfants, qui prends du plaisir à cuisiner, à admirer et j’en oublie. Tu es bon à l’intérieur et Nous, on l’a vu.

Alors quand les profondeurs atteintes seront tellement sombres que tu n’auras plus d’espoir, sauve-toi de toi-même en faisant briller cette lumière qui nous a éblouis et m'éblouit tous les jours”.

Entre colère, tristesse et espoir, je vous salue. Il est temps de dormir. Demain, nous allons à la piscine et pour l’instant, la tempête de l’océan n’est pas encore là.

 

Samedi 1er février : plaisir et petits tracas

M

 

Mathieu : Tout d’abord, en exclusivité, le rap de M; qu’il me dicte :

“J’ai grandi en famille d’accueil ;

de famille d’accueil, je suis passé en Foyer ;

Etre en Foyer, c’est vraiment très compliqué ;

Tous les jours, la police venait m’interpeller ;

 Je me suis mis à vendre et à fumer pour oublier tout mon passé ;

La Juge m’a privé de liberté ; c’était vraiment compliqué ;

La daronne vraiment énervée, elle me l’a fait payer”.

 

M a perdu quelques affaires dont son carnet de notes, de comptes, sa coquille Saint Jacques et son livre sur l’Islam auquel il tenait beaucoup. C’est pour ça que j’ai écrit son rap, pour vous, pour moi, avant qu’il ne disparaisse de sa mémoire, s’il disparaît.

Ce matin, nous passons en courses, puis allons à la piscine de 10h à 16h environ. Quel plaisir ! Bassin de vagues, toboggan, zone à bulles détentes, ballon + cage. Trop bien ! Pendant le pique-nique, nous avons pu découvrir un sport : le hockey subaquatique. A vrai dire, de la surface, on ne voit pas grand-chose.

Dès l’arrivée, M, que je n’ai jamais connu sans problème de santé, a une douleur à des dents sur le côté de la mâchoire. Hier, il s'est fait mal en ouvrant une bouteille de soda difficile à dévisser. Il focalise dessus et n’arrive pas à se changer les idées. Je finis par lui donner du paracétamol. Au retour, il est épuisé. Après la sieste, la douleur est revenue. Il finit par en pleurer. Il veut aller aux Urgences, ça tombe bien, c’est à 15 mn à pied et en plus on connaît la Maison. Ça fera la 3ème fois au Puy et je crois sa 6ème fois en deux mois. Ça doit être un lieu sécurisant pour y aller aussi souvent. Quel dommage ! Nous qui allons manger au tacos ce soir.

Sur le chemin, j’appelle un médecin régulateur. Pendant l’attente téléphonique, M me dit de laisser tomber. Il a faim et aimerait aller manger. On ira aux Urgences après. Magic M, ou quand l’urgence dans sa tête prend la place de l’ancienne urgence. Et pourtant, nous sommes à 150m de l’hôpital “allo, allo, oui docteur, du paracétamol, d’accord docteur, merci”. Finalement, plus besoin d’aller aux Urgences. Par contre, la pharmacie ferme dans 10 min et le GPS annonce 12 min à pied. Go, go, go ! M peine, il est fatigué, ça monte un peu. Heureusement, nous allons dans la même direction que notre repas au tacos. No comment !

Après avoir bien mangé, en ce samedi soir à 21 h, nous traînons en ville à observer les gens. M s’assoit pendant 20 mn, en ce lieu où l’on peut lire qu’il est le début de la voie du Puy en Velay qui mène à Saint Jacques… Le tableau qui se dessine sous mes yeux est aussi surprenant que notre voyage : M assis à côté d’une statue en bronze d’une jeune pèlerine prête au départ, les deux regardant dans la même direction.

 

Dimanche 2 février : En être, paraître et mal être

 

M n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, nous avons bien rigolé devant l’avant-première du film God save the Tuche” au cinéma. Journée plus sombre pour M. Il est distant, n’a rien envie de faire. Ses colères se tournent contre moi, contre Anthony, le responsable de marche, contre Seuil. Il a toujours mal aux dents. Après un nouvel appel à Nounou, il paraît plus apaisé. Il essaie de contenir sa colère. On dirait qu’il bouillonne. M fait probablement partie de ces jeunes qui, telles des cocottes minute, sont à la limite d’exploser ou d’imploser, je ne saurais dire la différence. Demain, c’est lundi. Peut-être que nous en saurons plus, peut-être pas. Quoi qu'il en soit, nous espérons aller à la piscine le matin.



Lundi 3 février : Le Puy. : Peut-être on se reverra

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Aujourd’hui, après la piscine vers 14h, juste avant d’aller jouer au foot au city stade, nous apprenons notre départ demain pour notre bien connue abbaye : Abbaye du Désert. Nous revoilà ! Nous allons améliorer notre niveau au ping-pong en attendant que la référente de M trouve un nouveau lieu de vie.  Le Puy en Velay, adios !


Mardi 4 février : Abbaye, on se retrouve

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : Départ tranquille du Puy en Velay. Nous prenons un bus puis 3 TER

9h45 ---> 16h24. Irène de l’Abbaye nous attend pour nous ramener. Cette fois, nous logeons à l’hôtellerie avec chacun une petite chambre. Ça va faire du bien de retrouver un peu d’intimité. Nous sommes en pension complète : c’est le luxe ! Et en même temps, je pense que nos moments “cuisine” vont me manquer. Je suis un peu patraque ce soir. Je pense que j’ai trop mangé. Il faut que j’accepte de jeter de la nourriture quelques fois.

Bref, Abbaye Sainte Marie du Désert : Bonjour. Combien de temps allons-nous rester ? Telle est la question.


Mercredi 5 février : Pension complète - pétanque - ping-pong

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu :Presque tout est dans le titre. Ajoutez soleil, balade, bain froid, retrouvailles et vous avez la recette de notre journée. Un plat idéal pour des vacances réussies.


Lundi 10 février :  Procréation et déprime

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu :  Je savais que je n’écrivais plus le carnet de blogs. Je viens de me rendre compte que ne l’ai pas écrit depuis le 6 février. Bravo ! Que dire ?

M a décalé son rythme. Il se lève entre llh et 13h. Il passe la plupart du temps dans sa chambre. Peu de choses le motivent. Il reste le ping pong et vite fait. Il a pu communiquer avec son petit frère. Il échange quotidiennement avec Nounou et sa copine. Il est connecté avec ses amis et amies. Pour ma part, je participe à la vie de village en me rendant aussi disponible si M a besoin. Ce qui arrive peu souvent. Il a demandé à faire un album photos. Il a tout, mais n’arrive pas à se motiver. Je crois que cette attente nous ronge. Hier, j’étais mal dans ma peau. Mieux ce jour

 

Mardi 11 février : dernier blog en ligne

 

M : n’a pas écrit

 

Mathieu : M depuis un jour et demi ne mange plus, ne prend plus son traitement médical et reste presque en permanence dans sa chambre. Il refuse de parler à qui que ce soit. Avec l’équipe du suivi, comme M n’écrit pas son carnet de route, il a été décidé de ne plus le publier sur le site internet. Je vais continuer de mon côté, car il est quelquefois demandeur pour que je lui relise.

Et c’est depuis le village de François, sous le soleil de Toulouse, que d’autres “aventures” se profilent. Je vous salue. Bon vent !





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